Résumé législatif du Projet de loi C-17

Résumé Législatif
Résumé législatif du projet de loi C-17 : Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues
Sonya Norris, Division des affaires juridiques et sociales
Marlisa Tiedemann, Division des affaires juridiques et sociales
Publication no 41-2-C17-F
PDF 305, (11 Pages) PDF
2014-01-08
Révisée le : 2014-07-03

1 Contexte

Le projet de loi C-17 : Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (titre subsidiaire : « Loi visant à protéger les Canadiens contre les drogues dangereuses (Loi de Vanessa)1 ») a été présenté à la Chambre des communes par la ministre de la Santé le 6 décembre 2013. Selon le sommaire, il modifie la Loi sur les aliments et drogues (LAD)2 pour renforcer la surveillance des produits pharmaceutiques et des instruments médicaux et améliorer la déclaration des réactions indésirables qui y sont associées3. Le projet de loi aborde les questions relatives à la sécurité des patients figurant dans le discours du Trône prononcé en octobre 2013, à l’ouverture de la 2e session de la 41e législature, notamment la nécessité de veiller à ce que : 1) les effets secondaires des médicaments soient clairement indiqués sur l’emballage et 2) les médicaments dangereux fassent l’objet d’un rappel rapide4.

En 2007, le gouvernement fédéral a annoncé le Plan d’action pour assurer la sécurité des produits alimentaires et de consommation5. Ce plan préconisait la réglementation des produits de santé au moyen d’une « approche fondée sur le cycle de vie », c’est-à-dire remplacer l’évaluation de l’innocuité et de l’efficacité avant la commercialisation par l’évaluation continue des risques et des bienfaits avant et après la mise en marché6. Une partie du plan devait être mise en œuvre au moyen du projet de loi C-51 : Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues, qui a été déposé en avril 20087 et qui, entre autres, aurait conféré au ministre de la Santé des pouvoirs supplémentaires pour :

  • imposer plus d’obligations aux fabricants;
  • exiger la tenue d’études après approbation;
  • obliger les établissements de soins de santé à signaler les effets indésirables des médicaments;
  • ordonner le rappel de produits;
  • étendre les pouvoirs en matière d’inspection.

Le projet de loi C-51 est mort au Feuilleton lorsque la 39e législature a été dissoute. Le projet de loi C-17 reprend quelques-unes des modifications qu’il devait apporter à la Loi sur les aliments et drogues en ce qui a trait aux médicaments et aux instruments médicaux.

En mars 2013, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a déposé un rapport intitulé Les produits pharmaceutiques sur ordonnance au Canada : Suivi post-approbation effectué pour en assurer l’innocuité et l’efficacité, dans lequel il réitère l’appel en faveur d’un cadre législatif modernisé pour les médicaments8.

2 Description et analyse

Le projet de loi C-17 compte 15 articles, dont le premier donne le titre subsidiaire du projet de loi. Les articles 2 à 12 présentent les modifications apportées à la LAD et les articles 13 et 14, les dispositions transitoires et de coordination. L’article 15 prévoit l’entrée en vigueur du projet de loi. La description qui suit porte sur les articles 2 à 15.

2.1 Définitions (art. 2)

2.1.1 Définition modifiée du terme « instrument »

La définition modifiée du terme « instrument » apporte des changements qui visent à assurer l’uniformité grammaticale du libellé et précisent que les modifications produites par un instrument peuvent s’appliquer à des parties du corps et non seulement au corps entier. La définition modifiée substitue à la mention « les drogues en sont exclues » un énoncé selon lequel est exclu de la définition un dispositif qui produit le diagnostic ou l’effet thérapeutique uniquement au moyen d’un médicament ou d’une autre substance à l’intérieur ou à la surface du corps.

2.1.2 Ajout des termes « produit thérapeutique », « autorisation relative à un produit thérapeutique » et « renseignements commerciaux confidentiels »

L’article 2 ajoute de nouvelles définitions concernant des produits régis par la LAD, à savoir celles de « produit thérapeutique » et d’« autorisation relative à un produit thérapeutique ». Un produit thérapeutique est une drogue ou un instrument ou toute combinaison des deux, à l’exception d’un « produit de santé naturel » au sens du Règlement sur les produits de santé naturels9. L’autorisation relative à un produit thérapeutique permet l’importation, la vente, la publicité, la fabrication, la préparation, la conservation, l’emballage, l’étiquetage, l’emmagasinage ou l’examen d’un tel produit. Enfin, le projet de loi introduit le terme « renseignements commerciaux confidentiels » en ce qui a trait aux dispositions sur la divulgation publique dont il sera question plus loin.

2.2 Produits thérapeutiques (art. 3 à 5)

Les articles 3 à 5 du projet de loi renferment la majorité des dispositions nécessaires pour donner suite à l’objet du projet de loi, c’est-à-dire la surveillance accrue de l’innocuité des médicaments approuvés. Ces articles modifient la LAD en ajoutant un nouvel article sur les produits thérapeutiques après les dispositions actuelles relatives aux instruments. Ils confèrent de nouveaux pouvoirs au Ministre, imposent de nouvelles exigences aux titulaires d’une autorisation et aux établissements de soins de santé et créent une nouvelle interdiction.

2.2.1 Pouvoirs du Ministre

Le nouveau paragraphe 21.1(1) de la LAD autorise le Ministre à ordonner à toute personne de lui fournir tous les renseignements qu’elle détient concernant un produit thérapeutique, s’il estime que ce produit « peut présenter un risque grave de préjudice à la santé humaine » et que ces renseignements sont « nécessaires pour décider si tel est le cas ». En outre, le nouveau paragraphe 21.1(2) permet au Ministre de communiquer des renseignements commerciaux confidentiels concernant un produit thérapeutique sans aviser la personne dont l’entreprise ou les activités sont concernées si, à son avis, ce produit peut présenter un « risque grave de préjudice à la santé humaine ». Enfin, selon le nouveau paragraphe 21.1(3), le Ministre peut communiquer des renseignements com¬merciaux confidentiels à toute administration, à toute personne qu’il consulte ou à toute personne exerçant des fonctions relatives à la protection de la santé ou de la sécurité humaines si « l’objet de la communication est relatif à la protection ou à la promotion de la santé humaine ou de la sécurité du public ».

Le nouvel article 21.2 de la LAD autorise le Ministre à ordonner la modification de l’étiquette ou de l’emballage d’un produit thérapeutique, « s’il l’estime nécessaire pour prévenir un préjudice à la santé ».

Le pouvoir d’ordonner un rappel est prévu au nouvel article 21.3. Le Ministre peut ordonner le rappel d’un produit, ou son envoi à l’endroit qu’il précise, « s’il estime qu’un produit thérapeutique présente un risque grave ou imminent de préjudice à la santé ». Ce nouvel article lui permet aussi d’ordonner la prise de mesures correctives (nouveau par. 21.3(2)), et il interdit la vente d’un produit thérapeutique visé par un rappel, à moins que le Ministre l’autorise expressément (nouveaux par. 21.3(3) et 21.3(5)). La disposition sur le rappel dit aussi qu’une personne ne peut être condamnée pour violation de l’interdiction à l’égard de la vente de produits rappelés que s’il est établi que l’avis de rappel avait été porté à sa connaissance ou que des mesures raisonnables avaient été prises pour l’en informer.

Les nouveaux articles 21.31 et 21.32 remplacent l’article 21.4 de la LAD. Ils disposent que, sous réserve des règlements, le Ministre peut ordonner au titulaire d’une autorisation relative à un produit thérapeutique :

  • d’effectuer une évaluation de ce produit et de lui en fournir les résultats (nouvel art. 21.31 de la LAD);
  • afin d’améliorer la compréhension des effets du produit sur la santé et la sécurité :
    • de compiler des renseignements, mener des études et des essais ou surveiller l’expérience portant sur le produit thérapeutique (nouvel al. 21.32a) de la LAD);
    • de lui soumettre les informations demandées (nouvel al. 21.32b) de la LAD).

Le nouvel article 21.4 précise que les ordres donnés en vertu de ces nouveaux pouvoirs ne sont pas des textes réglementaires au sens de la Loi sur les textes réglementaires. Il habilite aussi le Ministre à rendre accessible au public tout ordre donné en application des articles 21.1 à 21.3. Selon le nouvel article 21.5, le Ministre peut, dans certaines circonstances, présenter une demande au tribunal compétent afin d’obtenir une injonction.

2.2.2 Interdiction, conformité et divulgation publique

Le nouvel article 21.6 de la LAD interdit à quiconque de faire sciemment une déclaration fausse ou trompeuse au Ministre ou de lui fournir sciemment des renseignements faux ou trompeurs relativement à un produit thérapeutique. Le nouvel article 21.7 oblige le titulaire d’une autorisation relative à un produit thérapeutique à se conformer à toute condition dont celle-ci est assortie. Conformément au nouvel article 21.71, les renseignements réglementaires concernant les essais cliniques ou expérimentaux doivent être rendus publics selon les modalités réglementaires de temps ou autres.

2.2.3 Déclaration obligatoire pour les établissements de soins de santé

Aux termes du nouvel article 21.8 de la LAD, tout établissement de soins de santé désigné par règlement devra signaler au Ministre, lorsqu’un produit thérapeutique est en cause, les réactions indésirables graves à une drogue et les incidents liés à un instrument médical. Les détails, comme le type de renseignements à fournir, les modalités de déclaration et les établissements de soins de santé visés, seront désignés par règlement.

2.3 Règlements (art. 6 et 7)

2.3.1 Pouvoirs de réglementation à l’égard des produits thérapeutiques

Les paragraphes 6(1) à 6(3) du projet de loi contiennent le nouveau paragraphe 30(1.2) de la LAD, qui décrit les pouvoirs de réglementation du gouverneur en conseil concernant les produits thérapeutiques.

Le paragraphe 6(1) du projet de loi concerne les autorisations, la modification des étiquettes et des emballages, les rappels de produits et la communication de renseignements par les titulaires d’une autorisation.

Les paragraphes 6(2) et 6(3) établissent d’autres pouvoirs de réglementation, qui sont assujettis à des dispositions d’entrée en vigueur distinctes. Ils prévoient des règlements concernant les évaluations, les essais et les études, la surveillance de l’expérience, la compilation de renseignements, la définition des termes « réaction indésirable grave à une drogue » et « incident lié à un instrument médical » et la communication de renseignements par les établissements de soins de santé.

Selon le nouveau paragraphe 30(1.3) de la LAD, le Ministre doit tenir compte des systèmes de gestion de l’information avant de prendre des règlements concernant la communication de renseignements par les établissements de soins de santé afin de réduire au minimum le fardeau administratif.

Les paragraphes 6(5), 6(6) et 6(7) du projet de loi apportent des modifications de forme aux actuels paragraphes 30(2), 30(3) et 30(5) de la LAD.

2.3.2 Incorporation par renvoi

Le paragraphe 30.5(1) de la LAD permet de prendre des règlements pour incorporer des documents par renvoi. L’article 7 du projet de loi modifie ce paragraphe pour inclure les règlements relatifs aux produits thérapeutiques.

2.4 Infractions et peines (art. 8 à 12)

L’article 8 du projet de loi ajoute à la LAD des peines applicables expressément aux personnes qui contreviennent aux dispositions relatives aux produits thérapeutiques. Ces peines sont plus sévères que celles déjà prévues aux articles 31 (à l’égard des infractions à la LAD, notamment celles relatives aux produits de santé naturels et aux cosmétiques) et 31.1 (à l’égard des infractions à la LAD ayant trait expressément aux aliments).

L’article 9 du projet de loi fixe les peines applicables aux personnes qui contrevien-nent aux dispositions de la LAD relatives aux produits thérapeutiques. Le nouvel article 31.2 de la LAD augmente ou modifie les peines comme suit :

  • pour une première déclaration de culpabilité par procédure sommaire : d’une amende maximale de 500 $, un emprisonnement maximal de trois mois ou ces deux peines, à une amende maximale de 250 000 $, un emprisonnement maximal de six mois ou ces deux peines;
  • pour une déclaration de culpabilité par mise en accusation : d’une amende maximale de 5 000 $, un emprisonnement maximal de trois ans ou ces deux peines, à une amende maximale de 5 000 000 $, un emprisonnement maximal de deux ans ou ces deux peines.

Les infractions subséquentes peuvent faire l’objet de peines plus lourdes. Le nouvel article 31.3 permet d’invoquer la prise de précautions voulues en guise de défense.

Le projet de loi fixe aussi les peines applicables aux personnes qui contreviennent délibérément ou par insouciance aux dispositions de la LAD relatives aux produits thérapeutiques. Selon le nouvel article 31.4 de la LAD :

  • sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, la peine pour une pre-mière condamnation est une amende maximale de 500 000 $, un emprisonne-ment maximal de 18 mois ou ces deux peines;
  • sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, la peine est une amende dont le montant est déterminé par le tribunal, un emprisonnement maximal de cinq ans ou ces deux peines.

Les infractions subséquentes peuvent entraîner des peines plus lourdes. La prise de précautions voulues ne peut être invoquée en guise de défense pour les infractions au titre de cet article.

Le nouvel article 31.5 de la LAD exige que, au moment de déterminer la peine à infliger, le tribunal tienne compte du dommage ou du risque de dommage associé à l’infraction et de la vulnérabilité des consommateurs concernés.

Selon le nouvel article 31.6 de la LAD, si l’infraction est commise par une personne morale autre qu’un particulier (c.-à-d. une société), certains dirigeants, administra-teurs ou mandataires peuvent être tenus responsables.

Enfin, l’article 31.7 de la LAD précise qu’une infraction aux articles 31.2 ou 31.4 qui s’étend sur plus d’une journée est comptée comme une infraction distincte pour chacun des jours où elle est commise ou continue de l’être.

L’article 12 du projet de loi modifie le paragraphe 35(1) de la LAD pour intégrer les nouveaux articles 31.2 et 31.4 créés par le projet de loi.

2.5 Dispositions transitoires et de coordination (art. 13 et 14)

Selon l’article 13 du projet de loi, la définition de l’expression « autorisation relative à un produit thérapeutique » s’applique à toutes les autorisations délivrées avant son entrée en vigueur et visant l’importation, la vente, la publicité, la fabrication, la préparation, la conservation, l’emballage, l’étiquetage, l’emmagasinage ou l’examen d’un produit thérapeutique. L’article 14 permet d’ajuster la numérotation des pouvoirs de réglementation conférés par le nouveau paragraphe 30(1.2) de la LAD en fonction de l’ordre d’entrée en vigueur des dispositions.

2.6 Entrée en vigueur (art. 15)

L’article 15 permet de fixer par décret deux dates d’entrée en vigueur : l’une pour l’article 4, le paragraphe 6(2) et les articles 10 et 11 (par. 15(1)), et l’autre pour l’article 5 et les paragraphes 6(3) et 6(4) (par. 15(2)).

3 Commentaire

Le projet de loi a été renvoyé au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes après la deuxième lecture, le 30 mai 2014. Des témoins enten¬dus au cours de l’étude faite par ce comité ont laissé entendre que le projet de loi devrait s’appliquer aux produits de santé naturels. Comme il a été mention¬né à la rubrique 2.1.2 du présent résumé législatif, ces produits sont expressé¬ment exclus de la définition proposée de « produit thérapeutique ». D’autres témoins, toutefois, étaient favorables à la définition proposée dans le projet de loi, affirmant que sa modification aurait des conséquences importantes et ralentirait – voire interromprait – une mise à jour essentielle de la Loi sur les aliments et drogues. La définition de « produit thérapeutique » n’a donc pas été modifiée, et les produits de santé naturels ne sont pas visés par le projet de loi C-17.


Notes

*  Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur.Retour au texte ]

  1. Le titre subsidiaire « Loi de Vanessa » honore la mémoire de la fille de Terence Young, député d’Oakville, en Ontario, décédée à la suite de complications attribuables à un médicament sur ordonnance. [ Retour au texte ]
  2. Loi sur les aliments et drogues, L.R.C. 1985, ch. F-27. [ Retour au texte ]
  3. Projet de loi C-17 : Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues, 2e session, 41e législature. [ Retour au texte ]
  4. Gouvernement du Canada, Discours du Trône, 2e session, 41e législature, 16 octobre 2013. [ Retour au texte ]
  5. Santé Canada, Santé Canada – Plan d’action pour assurer la sécurité des produits alimentaires et de consommation. [ Retour au texte ]
  6. Ibid. [ Retour au texte ]
  7. Projet de loi C-51 : Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues, 2e session, 39e législature. [ Retour au texte ]
  8. Sénat, Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, Les produits pharmaceutiques sur ordonnance au Canada : Suivi post-approbation effectué pour en assurer l’innocuité et l’efficacité pdf (4,3 Mo, 48 pages), 1re session, 41e législature, mars 2013. [ Retour au texte ]
  9. Règlement sur les produits de santé naturels, DORS/2003-196. [ Retour au texte ]

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