Résumé législatif du Projet de loi C-27

Résumé Législatif
PROJET DE LOI C-27 : LOI CONCERNANT LA GESTION À LONG TERME DES DÉCHETS DE COMBUSTIBLE NUCLÉAIRE
Jean-Luc Bourdages, Division des sciences et de la technologie
Publication no 37-1-LS-405-F
PDF 210, (15 Pages) PDF
2001-08-09
Révisée le : 2001-11-23

TABLE DES MATIÈRES

CONTEXTE

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A.  Titre abrégé, définitions, objet et champs d’application (article 1 à 5)

   B.  Société de gestion des déchets nucléaires (articles 6 à 8)

   C.  Financement (articles 9 à 11)

   D.  Exposé des propositions de la société de gestion (articles 12 à 15)

   E.  Rapports, approbations et vérification (articles 16 à 26)

   F.  Infractions et peines (articles 27 à 31)

COMMENTAIRE


PROJET DE LOI C-27 :
LOI CONCERNANT LA GESTION À LONG TERME DES
DÉCHETS DE COMBUSTIBLE NUCLÉAIRE*

CONTEXTE

Le 25 avril 2001, le ministre des Ressources naturelles du Canada, l’honorable Ralph Goodale, a déposé à la Chambre des communes le projet de loi C-27 : Loi concernant la gestion à long terme des déchets de combustible nucléaire.  Ce projet de loi a essentiellement pour but d’obliger les propriétaires de ces déchets à assumer pleinement leurs responsabilités financières et à mener leurs activités de gestion des déchets d’une façon globale, intégrée et efficiente.  Pour ce faire, il s’appuie sur trois mesures distinctes :

  • l’obligation faite aux principaux propriétaires de déchets de combustible nucléaire de créer, comme entité juridique distincte, une société de gestion chargée des activités nécessaires – notamment de financement et d’exploitation – à la mise en oeuvre de la proposition de gestion retenue par le Canada;

  • l’obligation faite à ces mêmes propriétaires d’instituer des fonds en fiducie et d’y verser l’argent nécessaire au financement de la gestion des déchets;

  • la décision prise par le gouverneur en conseil sur la stratégie de gestion à long terme des déchets de combustible nucléaire qu’il incombe à la société de gestion de proposer puis de mettre en œuvre.

Selon le ministère des Ressources naturelles, le projet de loi est le reflet des consultations menées par le gouvernement fédéral auprès du public, des provinces, des propriétaires de déchets et d’autres parties intéressées. 

Il existe trois catégories de déchets radioactifs :

  • les déchets de combustible nucléaire;

  • les déchets faiblement radioactifs;

  • les résidus des mines et des usines de concentration d’uranium. 

Le projet de loi C-27 ne concerne que la première catégorie, soit les déchets de combustible nucléaire.  

Au Canada, ces déchets proviennent principalement des grappes de combustible nucléaire irradié dans les 22 réacteurs CANDU, dont la plupart sont entrés en activité dans la deuxième partie des années 70.  Vingt de ces réacteurs sont exploités par Ontario Power Generation Inc. et produisent environ 90 p. 100 des déchets nucléaires.  Les deux autres réacteurs appartiennent à Hydro-Québec et à la Société d’énergie du Nouveau-Brunswick, et ils produisent respectivement 3 et 5 p. 100 des déchets.  Enfin, environ 2 p. 100 des déchets sont produits par les réacteurs expérimentaux d’Énergie atomique du Canada limitée (EACL) et une petite quantité provient d’autres sources, notamment les universités.

On estime à environ 1,3 million de grappes (18 000 tonnes) la quantité totale des déchets de combustibles nucléaires générés au Canada à ce jour, ce qui pourrait remplir plusieurs piscines olympiques.  À l’heure actuelle, ces déchets sont entreposés dans des piscines de désactivation situées dans les centrales.  Ces piscines sont conçues pour accueillir le combustible épuisé après 15 à 20 ans d’exploitation.  Même si le combustible peut y être conservé en sécurité pendant longtemps, les piscines des centrales nucléaires les plus anciennes sont remplies à capacité.  Depuis 1995, une partie des combustibles entreposés dans l’eau pendant plus de 10 ans à la centrale de Pickering a été transférée dans des conteneurs de stockage à sec au même endroit.  Des installations de stockage à sec du même type devraient ouvrir à Bruce en 2002 et à Darlington en 2007.   Or, le stockage en surface n’apparaît pas comme une solution à long terme pour l’entreposage des déchets, ce qui a amené le gouvernement fédéral et les producteurs à proposer une solution plus appropriée.

Pour faire face au problème, le gouvernement fédéral a établi un Plan de gestion des déchets de combustible nucléaire.  Ce plan, qui prévoit l’entreposage permanent dans des couches géologiques profondes du bouclier canadien, a été élaboré sur 20 ans par EACL.  En 1989, une fois le plan élaboré, une commission indépendante d’évaluation environnementale, la Commission Seaborn, a été créée pour examiner non seulement les mérites techniques de la solution proposée, mais aussi les critères pour évaluer sa sécurité et son acceptabilité.  Les démarches de la Commission Seaborn se sont échelonnées sur une dizaine d’années, pendant lesquelles toutes les facettes du stockage à long terme des déchets de combustible nucléaire ont été étudiées dans le contexte d’une évaluation environnementale approfondie. 

Après avoir encadré la préparation, par EACL, de l’étude d’impact environnemental, la Commission Seaborn a procédé à l’examen public de l’étude et tenu des audiences publiques de mars 1996 à mars 1997.  La Commission s’est d’abord attachée aux grands enjeux sociétaux de la gestion des déchets de combustible nucléaire; puis, elle a étudié la sûreté du concept d’EACL d’un point de vue technique; enfin, elle s’est arrêtée sur les vues du public au sujet de la sûreté et de l’acceptabilité du concept. 

En se basant sur les 531 communications verbales et les 536 communications écrites soumises, la Commission Seaborn a présenté ses recommandations au gouvernement fédéral le 3 mars 1998.  Elle a d’abord conclu que, du point de vue technique, la démonstration de la sûreté du concept de stockage en profondeur proposé par EACL était jugée suffisante pour une étude d’avant-projet, mais non du point de vue social.  En effet, il n’avait pas été démontré que le concept jouissait d’un vaste appui du public, ce qui faisait que, sous sa forme proposée, il n’avait pas le degré voulu d’acceptabilité pour devenir le mode canadien de gestion des déchets de combustible nucléaire.

Dans sa réponse au rapport de la Commission, en décembre 1998, le gouvernement fédéral a fait part de ses attentes en matière de gestion des déchets de combustible nucléaire :

  • la création, par les producteurs et propriétaires de ces déchets, d’un organisme de gestion des déchets (OGD), constitué en personne morale distincte et chargé de gérer et de coordonner toutes les activités de gestion à long terme de ces déchets, y compris leur évacuation;

  • l’établissement par ces mêmes producteurs et propriétaires de déchets d’un fonds destiné à financer intégralement toutes les activités et opérations de l’OGD, de l’élaboration et de la comparaison des options jusqu’à l’implantation et au déclassement des installations de gestion des déchets;

  • la remise au gouvernement fédéral par l’OGD d’un rapport expliquant et justifiant l’approche qu’il privilégie pour la gestion à long terme des déchets de combustible nucléaire.

À suite de cette démarche c’est au gouvernement fédéral que reviendra la décision ultime relativement à l’approche de gestion et d’évacuation des déchets de combustible nucléaire qu’il conviendra d’adopter. 

Il s’agit justement de cette démarche globale que le gouvernement fédéral vise à encadrer et à mettre en œuvre au moyen du projet de loi C-27, qui fait suite à sa réponse de 1998 et qui s’inscrit directement dans le cadre de sa stratégie de gestion des déchets de combustible nucléaire. 

Pour le gouvernement, ce projet de loi vient compléter la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires, qui fait en sorte que les activités reliées à l’industrie nucléaire doivent être exécutées de manière sécuritaire et respectueuse de l’environnement.  La loi proposée sur les déchets de combustible nucléaire est jugée nécessaire pour remplir les autres obligations imposées par la politique du gouvernement en cette matière, c’est-à-dire voir à ce que les activités soient aussi exécutées de manière complète, rentable et intégrée.  De fait, il s’agit d’encadrer par ce projet de loi une approche dont les coûts pourraient dépasser 12 milliards de dollars sur une période de 70 à 100 ans. 

DESCRIPTION ET ANALYSE

Outre la section relative aux titre, définitions, objet et champs d’application, le projet de loi C-27 comporte cinq principales parties :

  • la société de gestion des déchets de combustible nucléaire;

  • le financement;

  • les propositions de la société de gestion;

  • les rapports, les approbations et les vérifications;

  • les infractions et les peines.

   A.  Titre abrégé, définitions, objet et champs d’application (articles 1 à 5)

L’article premier du projet de loi établit que le titre abrégé de la loi est Loi sur les déchets de combustible nucléaire.

L’article 2 définit les principaux termes et expressions utilisés dans la loi.

  • « Déchets nucléaires » s’entend spécifiquement les grappes de combustible irradié retirées des réacteurs à fission nucléaire, qu’ils soient à vocation commerciale ou de recherche. 

  • « Gestion » est utilisé pour désigner la gestion à long terme des déchets nucléaires par entreposage ou évacuation, et comprend leur manutention, transport, traitement et conditionnement. 

  • « Ministre » s’entend du ministre responsable de l’application de la loi – celui des Ressources naturelles – ou du membre du Conseil privé de la Reine chargé par le gouverneur en conseil de son application. 

  • La définition de « région économique » correspond à celle donnée par Statistique Canada dans son Guide de l’Enquête sur la population active

  • « Société de gestion » s’entend de la société responsable de la gestion des déchets nucléaires qui est constituée en application de l’article 6. 

  • Les « sociétés d’énergie nucléaire » sont Ontario Power Generation Inc., Hydro-Québec, la Société d’énergie du Nouveau-Brunswick, ainsi que toute autre entité propriétaire de tels déchets; leurs successeurs ou concessionnaires éventuels, tout comme ceux d’Énergie atomique du Canada limitée sont aussi concernés par la loi. 

  • « Taux de base » s’entend du taux d’intérêt préférentiel fixé et publié pour le mois par la Banque du Canada.

L’article 3 présente l’objet précis de la loi, soit l’encadrement de la prise de décision – par le gouverneur en conseil et sur proposition de la société de gestion – concernant la gestion des déchets nucléaires, dans une perspective globale, intégrée et efficiente.  L’article 4 dispose que la loi lie Sa Majesté du chef du Canada ou d’une province, tandis que l’article 5 précise qu’elle s’applique aux sociétés d’énergie nucléaire et à EACL dans la mesure où elles sont propriétaires de déchets nucléaires.

   B.  Société de gestion des déchets nucléaires (articles 6 à 8)

L’article 6 prévoit la constitution, par les sociétés d’énergie nucléaire définies à l’article 2, d’une société de gestion ayant pour mission de formuler des propositions de gestion des déchets nucléaires à l’intention du gouvernement du Canada et de mettre en oeuvre celle qui sera retenue sous le régime de la loi.  Il prévoit que toutes les sociétés d’énergie nucléaire doivent faire partie de la société de gestion et que celle-ci n’est pas mandataire de Sa Majesté du chef du Canada.

En vertu de l’article 7, la société de gestion doit offrir à EACL et à tout propriétaire de déchets nucléaires produits au Canada qui ne fait pas partie de la société les services de gestion de déchets nucléaires prévus dans la proposition retenue par le gouverneur en conseil.  Elle doit les offrir sans discrimination et à prix raisonnable, compte tenu de ce qu’il lui en coûte pour gérer les déchets nucléaires des propriétaires qui en font partie.

La société de gestion doit s’adjoindre un comité consultatif chargé d’étudier l’exposé des propositions de gestion et les rapports visés à l’article 18, et de lui faire part de ses observations écrites à ce sujet (paragraphe 8(1)).  Les membres de ce comité sont nommés par les dirigeants de la société de gestion et choisis de manière à assurer une représentation équilibrée des disciplines scientifiques et techniques se rapportant à la gestion de déchets nucléaires, de l’expertise en affaires publiques appliquées au domaine de l’énergie nucléaire, de l’administration publique ou de l’organisation autochtone dont la région économique est visée par la proposition retenue par le gouverneur en conseil (paragraphe 8(2)).  Le Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles de la Chambre des communes a ajouté l’« expertise en connaissances traditionnelles autochtones » à la liste des critères régissant la nomination des membres du comité consultatif.

   C.  Financement (articles 9 à 11)

Un élément fondamental du projet de loi C-27 concerne l’établissement, par les sociétés d’énergie nucléaire et EACL, d’un fonds en fiducie auprès d’une institution financière, chargée de tenir les documents afférents au fonds au Canada (article 9).   La quote-part initiale qui doit être versée par chacune des entités au plus tard dix jours après l’entrée en vigueur de la loi est établie comme suit   (article 10) :

a)   Ontario Power Generation Inc. – 500 000 000 $;

b)   Hydro-Québec – 20 000 000 $;

c)   la Société d’énergie du Nouveau-Brunswick – 20 000 000 $;

d)   Énergie atomique du Canada – 10 000 000 $.

Chacune doit ensuite verser annuellement le cinquième de la somme initiale (respectivement : 100, 4, 4 et 2 millions de dollars), jusqu’à ce que le Ministre agrée les quotes-parts proposées par la société de gestion conformément au paragraphe 16(3).  Des intérêts, majorés de 2 p. 100 sur le taux de base, seront appliqués à tout versement en souffrance, et devront être versés au fonds, tout comme la quote-part, au plus tard trente jours après la date de la décision du gouverneur en conseil concernant la gestion des déchets nucléaires (paragraphes 10(4) et (5)).

En vertu de l’article 11, seule la société de gestion peut retirer de l’argent d’un fonds en fiducie.  Les fonds ainsi détenus ne peuvent servir qu’au financement de la mise en oeuvre de la proposition retenue par le gouverneur en conseil, notamment pour prévenir ou atténuer les répercussions socioéconomiques sur le mode de vie d’une collectivité, ou sur ses aspirations sociales, culturelles ou économiques.  Le premier retrait de fonds ne peut servir qu’au financement d’une activité de construction ou d’entreposage autorisée, après la décision du gouverneur en conseil, au titre de l’article 24 de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires

(1). Il demeure possible pour le Ministre de subordonner tout retrait éventuel à son agrément préalable s’il y a dérogation aux conditions fixées aux paragraphes (2) ou (3) de l’article 11.  L’article 21 prévoit que le gouverneur en conseil peut, sur recommandation du Ministre, autoriser le bénéficiaire d’un fonds en fiducie à retirer tout ou partie des sommes qui y sont détenues lorsque le solde des fonds en fiducie excède le coût total estimatif de la mise en oeuvre de la proposition ou lorsque celle-ci est complètement mise en œuvre.

   D.  Exposé des propositions de la société de gestion (articles 12 à 15)

Aux termes de l’article 12, la société de gestion dispose d’au plus trois ans après la date d’entrée en vigueur de la loi pour remettre au Ministre un exposé de ses propositions de gestion des déchets nucléaires accompagné des observations de son comité consultatif.   Elle doit aussi indiquer la proposition qui a sa préférence, non sans avoir rigoureusement étudié trois méthodes différentes de gestion :

a)   l’évacuation en couches géologiques profondes dans le Bouclier canadien déjà décrite par EACL et ayant fait l’objet d’une évaluation approfondie par la Commission d’évaluation environnementale du concept de gestion et de stockage des déchets de combustible nucléaire, dont le rapport a été publié en février 1998;

b)   l’entreposage à l’emplacement des réacteurs nucléaires;

c)    l’entreposage centralisé en surface ou souterrain.

Chaque proposition doit faire l’objet d’une description technique détaillée, indiquer la région économique retenue pour sa mise en œuvre, et faire état des avantages, risques et coûts comparatifs, des considérations morales, sociales et économiques sous-jacentes.  De plus, chaque proposition énumère les services qu’il incombe à la société de gestion d’offrir aux termes de l’article 7 et comporte un plan de mise en oeuvre prévoyant notamment les activités nécessaires à cette fin, un échéancier, un programme de consultations publiques et les moyens envisagés pour prévenir ou atténuer ses répercussions socioéconomiques.  Doivent suivre, pour chacune, des consultations auprès du grand public – notamment les peuples autochtones – et un résumé des observations ainsi recueillies.

L’exposé de chaque proposition doit inclure une formule de calcul du financement annuel de sa mise en œuvre, la répartition motivée du coût total estimatif de la gestion des déchets nucléaires entre les sociétés d’énergie nucléaire et EACL, ainsi que la forme et le montant des garanties financières fournies par ces dernières aux termes de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires pour la gestion de déchets nucléaires (article 13).  Par ailleurs, s’il le juge nécessaire, le Ministre peut tenir ses propres consultations publiques et ordonner à la société de gestion de revoir les éléments qui seraient non conformes aux exigences des articles 12 et 13, et ce, dans le délai qu’il fixe (article 14).  Il appartient enfin au Ministre de recommander au gouverneur en conseil une des propositions de gestion des déchets nucléaires présentées dans l’exposé, décision qui doit être publiée dans la Gazette du Canada (article 15).

   E.  Rapports, approbations et vérification (articles 16 à 26)

Les articles 16 et suivants du projet de loi C-27 fixent une série d’obligations que la société de gestion doit remplir.  Parmi celles-ci, l’article 16 dispose que la société de gestion doit :

  • déposer annuellement le rapport de ses activités auprès du Ministre;

  • inclure, dans les rapports postérieurs à la décision du gouverneur en conseil sur la proposition de gestion, la forme et le montant des garanties financières fournies et la quote-part à verser, le coût total estimatif révisé de la gestion des déchets nucléaires, les prévisions budgétaires ainsi que la formule de calcul du financement que propose la société de gestion pour l’exercice suivant.  La formule de calcul du financement et les quotes-parts proposées par la société de gestion sont subordonnées à l’agrément du Ministre, qui peut aussi ordonner à la société de les revoir.

Les sociétés d’énergie nucléaire et EACL sont tenues de verser la quote-part qui leur est imputée dans les trente jours suivant le dépôt du rapport annuel ou, le cas échéant, l’agrément du Ministre.  Toutefois, une société d’énergie nucléaire peut être autorisée par le gouverneur en conseil à reporter d’une année le versement de tout ou partie de la quote-part qui lui est imputée si l’intérêt public exige l’affectation de ces fonds en priorité aux mesures de réparation à prendre par suite d’un sinistre constituant un cas de force majeure (article 17).

Tous les trois ans après la décision du gouverneur en conseil sur la gestion des déchets nucléaires, le rapport annuel de la société de gestion devra aussi comporter, en outre :

  • le sommaire des activités de gestion des déchets nucléaires des trois derniers exercices;

  • un plan d’orientations stratégiques pour les cinq exercices suivants pour la mise en oeuvre de la proposition de gestion retenue;

  • des prévisions budgétaires pour la mise en oeuvre du plan d’orientations stratégiques;

  • les résultats des consultations publiques tenues;

  • les observations du comité consultatif sur ces sujets (article 18).

Le Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles de la Chambre des communes a proposé d’amender l’article 19 pour que le Ministre soit tenu de faire une déclaration publique sur tous les rapports déposés, et ce, dans les 90 jours suivant leur réception.  Le Comité a aussi proposé que le Ministre fasse déposer un exemplaire de chaque rapport devant chaque chambre du Parlement.

L’article 20 traite des propositions de substitution à l’approche de gestion des déchets nucléaires retenue par le gouverneur en conseil.  Une telle substitution sera possible si la société de gestion démontre dans son rapport triennal qu’elle est incapable, pour des raisons techniques indépendantes de sa volonté, de mettre en oeuvre la proposition retenue ou si, par suite d’une innovation technique, une nouvelle méthode de gestion s’avère préférable.  Cette dernière aura au préalable fait l’objet d’un examen scientifique et technique par les experts d’organisations internationales gouvernementales spécialisées dans le domaine nucléaire et jouira de leur appui, tout comme elle devra respecter les modalités prévues aux articles 12 à 14.

L’article 21 traite de la remise de fonds aux bénéficiaires et a été abordé plus haut, à la suite de l’article 11.  L’article 22 donne des précisions sur la tenue de livres de la société de gestion, des sociétés d’énergie nucléaire, d’EACL et des institutions financières, tandis que l’article 23 dispose que la société de gestion, ainsi que l’institution financière responsable de l’administration d’un fonds en fiducie, doit, dans les trois mois suivant la fin de chaque exercice, fournir au Ministre des états financiers vérifiés par une personne ou un organisme indépendant.  En vertu de l’article 24 amendé par le Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles de la Chambre des communes, la société de gestion doit rendre publics les études, rapports et états financiers qu’elle est tenue de présenter au Ministre, ainsi que les états financiers de l’institution responsable de l’administration du fonds.

Les articles 25 et 26 fixent les exigences relatives à la désignation et aux pouvoirs des vérificateurs, ainsi que les devoirs de ces derniers et des sociétés vérifiées.

   F.  Infractions et peines (articles 27 à 31)

Le projet de loi C-27 prévoit des amendes de 300 000 $ pour chaque jour où se commet ou se continue une infraction en matière :

  • de versement de la quote-part par une société d’énergie nucléaire ou EACL;

  • de respect, par la société de gestion, de l’échéance de trois ans pour faire ses propositions de gestion.  

Le tribunal peut en outre ordonner de verser, dans le délai qu’il fixe, dans le fonds en fiducie que la société d’énergie nucléaire ou EACL a institué, la somme en souffrance avec intérêts au taux de base majoré de deux pour cent.  Si elle ne s’y conforme pas, la personne visée s’expose à une amende d’un montant représentant 20 p. 100 de la somme totale en souffrance.  Si, par ailleurs, la société de gestion ne se conforme pas à l’agrément ou aux demandes du Ministre concernant la révision de sa proposition ou la remise de son rapport d’activités, elle s’expose à une amende de 100 000 $ par jour.  L’amende sera de 50 000 $ si la société ne se conforme pas aux demandes du Ministre au sujet du contenu du rapport d’activités ou de la formule de calcul du financement.

Quiconque ne prêterait pas assistance ou ferait une déclaration fausse ou trompeuse à un vérificateur serait passible d’une amende maximale de 100 000 $.  Enfin, toute contravention à une autre disposition de la loi peut encourir une amende maximale de 50 000 $.  L’article 29 prévoit qu’il n’est pas besoin d’identifier ou de poursuivre l’employé ou le mandataire fautif, mais seulement d’établir que l’infraction a été commise par un employé ou un mandataire de l’accusé.  Par contre, une personne ne peut être déclarée coupable si elle prouve qu’elle a pris toutes les précautions pour prévenir l’infraction (article 30).   La prescription de poursuite est de deux ans après la perpétration d’une infraction (article 31).

Il est prévu que la loi entrera en vigueur à la date fixée par décret du gouverneur en conseil (article 32).

COMMENTAIRE

Le projet de loi C-27 : Loi sur les déchets de combustible nucléaire, s’inscrit directement dans la politique du gouvernement du Canada en matière de déchets radioactifs.  Il vise donc à mettre en place les instruments qui permettront, dans les trois ans suivant son adoption, de choisir une méthode de gestion à long terme de l’ensemble des déchets de combustible nucléaire accumulés à ce jour sur les sites de production.  Ce sont les sociétés publiques d’énergie nucléaire qui sont d’abord obligées par le projet de loi à créer un organisme et à établir un fonds distinct de gestion des déchets nucléaires.  Cette démarche comporte aussi un mécanisme fédéral d’examen et d’approbation pour encadrer la surveillance des déchets nucléaires et l’accès au fonds de gestion.

Parmi les sociétés de production d’énergie, la Ontario Power Generation Inc. (OPG) est la plus touchée par la démarche fédérale puisqu’elle produit à elle seule environ 90 p. 100 des déchets nucléaires.  Dans son document sur la gestion des déchets nucléaires

(2), l’OPG mentionne déjà la démarche proposée dans le projet de loi, notamment en ce qui a trait à l’établissement d’une société indépendante de gestion des déchets nucléaires et d’un fonds pour financer ces activités.  Comme elle le signale dans ce document, l’OPG verse annuellement 430 millions de dollars dans des fonds destinés à la gestion à long terme des déchets nucléaires et au démantèlement éventuel des réacteurs.  Selon le ministre fédéral des Ressources naturelles et des fonctionnaires de Ressources naturelles Canada, tout porte à croire que les deux autres sociétés provinciales (Hydro-Québec et la Société d’énergie du Nouveau-Brunswick), ainsi que EACL, partagent les vues de la société ontarienne.  Il faut aussi souligner que la nouvelle société de gestion des déchets nucléaires sera tenue de fournir à un coût raisonnable des services de gestion à long terme aux petits propriétaires de déchets.

De prime abord, on ne devrait pas s’attendre à une vive opposition à la démarche proposée dans le projet de loi C-27, surtout pour ce qui est de la création de la société de gestion des déchets nucléaires et d’un fonds de financement.  Par contre, la discussion et l’opposition pourraient porter davantage sur les options de gestion à long terme des déchets nucléaires.  Comme le prévoit le paragraphe 12(2), trois options devront être étudiées de façon exhaustive et prioritaire – l’évacuation en couches géologiques profondes, l’entreposage à l’emplacement des réacteurs nucléaires, et l’entreposage centralisé à long terme – avant que l’une d’entre elles soit proposée au ministre responsable.  La société de gestion pourra en outre proposer une autre méthode.  Il demeure fort possible que plusieurs personnes et organismes souhaitent intervenir sur ces questions au moment de l’étude du projet de loi en comité.  D’autre part, il n’est pas exclu que certains puissent proposer d’autres approches de gestion des déchets nucléaires; par exemple, lors des débats de deuxième lecture, un député s’est interrogé sur la possibilité d’extraire davantage d’énergie des barres de combustible avant de les entreposer ou les enfouir à long terme.  Il ne faudrait pas s’étonner non plus que l’étude en comité soit l’occasion, pour plusieurs, de débattre l’ensemble de la question de l’énergie nucléaire au Canada et dans le monde.


*  Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur.  Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur.

(1)   L’article 24 de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires concerne les licences et permis, y inclus l’affectation du produit de la garantie financière.

(2)  Ontario Power Generation, Nuclear Waste Management – Managing Ontario Power Generation’s Nuclear Waste Safely and Responsibly, 2000.



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