Résumé législatif du Projet de loi C-4

Résumé Législatif
PROJET DE LOI C-4 : LOI MODIFIANT LA LOI SUR LE PARLEMENT DU CANADA (CONSEILLER SÉNATORIAL EN ÉTHIQUE ET COMMISSAIRE À L'ÉTHIQUE) ET CERTAINES LOIS EN CONSÉQUENCES
Margaret Young, Division du droit et du gouvernement
Publication no 37-3-LS-464-F
PDF 248, (17 Pages) PDF
2004-02-12

TABLE DES MATIÈRES

CONTEXTE

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A.  Le poste de conseiller sénatorial en éthique
         (nouveaux art. 20.1 à 20.7 de la Loi sur le Parlement du Canada)
   B.   Le poste de commissaire à l’éthique
        (nouveaux art. 72.01 à 72.04 de la Loi sur le Parlement du Canada)
   C.  Rôle général du commissaire à l’éthique
   D.  Fonctions du commissaire à l’éthique à l’égard des députés
         de la Chambre des communes (art. 72.05 proposé)
   E.   Fonctions du commissaire à l’éthique à l’égard des titulaires
         de charge publique (art. 72.06 à 72.11 proposés)
   F.   Dispositions générales relatives au commissaire
         à l’éthique (art. 72.12 et 72.13 proposés)
   G.  Autres dispositions, modifications corrélatives et dispositions
         de coordination (art. 1 et 3 et art. 5 à 41)
   H.  Entrée en vigueur (art. 42)

COMMENTAIRE


PROJET DE LOI C-4 : LOI MODIFIANT LA LOI SUR
LE PARLEMENT DU CANADA (CONSEILLER SÉNATORIAL
EN ÉTHIQUE ET COMMISSAIRE À L’ÉTHIQUE)
ET CERTAINES LOIS EN CONSÉQUENCE*

CONTEXTE

Le 11 février 2004, l’honorable Jacques Saada, C.P., député, leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la Réforme démocratique, a déposé devant la Chambre le projet de loi C-4 : Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada(conseiller sénatorial en éthique et commissaire à l’éthique) et certaines lois en conséquence.  Ce projet de loi est l’ancien projet de loi C-34 qui a été rétabli conformément à la motion adoptée par la Chambre des communes le 10 février 2004(1).  Il a été renvoyé au Sénat le même jour.

L’ancien projet de loi C-34 avait franchi les trois étapes au Sénat, mais les sénateurs l’avaient amendé en troisième lecture avant de le renvoyer à la Chambre des communes avec un message(2).

Le projet de loi C-34 avait été présenté en avril 2003 et constituait une partie de l’initiative parlementaire en matière d’éthique qui avait été déposée comme avant-projet en octobre 2002 devant les deux chambres du Parlement.  Cette initiative concrétisait l’engagement que le premier ministre Jean Chrétien avait pris à la Chambre des communes le 23 mai 2002(3).

L’avant-projet de loi déposé en octobre 2002 a été examiné sous cette forme par les comités du Sénat et de la Chambre des communes(4).  Le 10 avril 2003, chaque comité a présenté à sa chambre respective un rapport accompagné de recommandations relatives à l’avant-projet de loi.  Presque toutes ces recommandations ont été prises en compte dans le projet de loi C-34.  Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a fait un amendement; le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement a fait rapport du projet de loi tel quel au Sénat, qui y a apporté un amendement à la troisième lecture.  Toutefois, le projet de loi est ensuite mort au Feuilleton.

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A.  Le poste de conseiller sénatorial en éthique
         (nouveaux art. 20.1 à 20.7 de la Loi sur le Parlement du Canada)

L’article 2 du projet de loi C-4 prévoit la nomination du conseiller sénatorial en éthique, établit le mandat du poste et précise sa nature.

Le gouverneur en conseil nomme le conseiller sénatorial en éthique, après consultation du chef de chacun des partis reconnus au Sénat et approbation par résolution du Sénat.  Sauf révocation motivée par le gouverneur en conseil sur adresse du Sénat, le conseiller exerce ses fonctions à titre inamovible pour un mandat de sept ans renouvelable pour une ou plusieurs périodes maximales de sept ans.  En cas d’absence ou d’empêchement du conseiller ou de vacance de son poste, le gouverneur en conseil peut confier l’intérim à une autre personne pour un mandat maximal de six mois.

D’autres dispositions portent sur la rémunération et les frais du conseiller et l’obligent à se consacrer à l’exercice de ses fonctions à l’exclusion de tout autre poste au sein du gouvernement ou de tout autre emploi rétribué s’il est nommé à temps plein.  S’il est nommé à temps partiel, il ne doit détenir ni accepter de charge ou d’emploi – ni exercer d’activité –incompatibles avec ses fonctions.  Le conseiller a rang d’administrateur général de ministère; il peut conclure des contrats, des ententes ou d’autres arrangements et s’assurer les services des personnes nécessaires à l’exercice de ses activités.  Ces pouvoirs peuvent être délégués.  Le projet de loi prévoit aussi un processus de préparation d’états estimatifs des dépenses du bureau du conseiller.

L’article 20.5 est court et décrit d’une manière générale les fonctions du conseiller sénatorial en éthique.  Sous l’autorité générale d’un comité du Sénat, il s’acquitte des fonctions qui lui sont conférées par le Sénat en vue de régir la conduite des sénateurs lorsqu’ils exercent la charge de sénateur.  Autrement dit, le mandat du conseiller sera décrit plus précisément dans le code de conduite que le Sénat pourra décider d’adopter.

Deux éléments de l’article 20.5 font ressortir le fait que les activités du conseiller sénatorial en éthique dans l’exercice de ses fonctions sont protégées par l’immunité parlementaire et que le Sénat conserve le plein contrôle de la discipline de ses membres.  Le paragraphe 20.5(2) se lit comme suit :

Lorsqu’il s’acquitte de ces fonctions, il agit dans le cadre de l’institution du Sénat et possède les privilèges et immunités du Sénat et des sénateurs.

Plus loin, le paragraphe 20.5(5) se lit comme suit :

Il est entendu que le présent article n’a pas pour effet de restreindre de quelque façon les pouvoirs, droits, privilèges et immunités du Sénat et des sénateurs.

Les dispositions précédentes semblent avoir pour objet d’empêcher toute intervention judiciaire visant les fonctions officielles du conseiller à l’éthique ou les décisions du Sénat à l’égard du conseiller.  L’article 7 du projet de loi, analysé plus loin, concerne aussi cet objectif, puisqu’il précise que le conseiller sénatorial en éthique n’est susceptible d’aucun contrôle judiciaire de la Cour fédérale.

Le conseiller et son personnel sont protégés contre la possibilité d’être assignés à comparaître en cour civile ou criminelle concernant toute information venue à leur connaissance dans l’exercice de leurs fonctions.  De même, ils bénéficient de l’immunité en matière civile ou pénale pour les actes accomplis de bonne foi dans l’exercice de leurs fonctions.

Tous les ans avant la fin de juin, le conseiller doit remettre un rapport annuel sur ses activités au président du Sénat, qui le dépose devant le Sénat.  Il ne peut inclure dans le rapport des renseignements dont il est tenu d’assurer la confidentialité.

   B.   Le poste de commissaire à l’éthique
         (nouveaux art. 72.01 à 72.04 de la Loi sur le Parlement du Canada)

L’article 4 du projet de loi C-4 prévoit la nomination d’un commissaire à l’éthique ainsi que les pouvoirs et immunités nécessaires à l’exercice de ses fonctions.

Le projet de loi prévoit que le gouverneur en conseil nomme le commissaire à l’éthique pour un mandat renouvelable de cinq ans.  Cette nomination a lieu après consultation du chef de chacun des partis reconnus à la Chambre des communes et approbation par résolution de la Chambre.  Sauf révocation motivée par le gouverneur en conseil sur adresse de la Chambre des communes, le commissaire exerce ses fonctions à titre inamovible.  En cas d’absence ou d’empêchement du commissaire ou de vacance de son poste, le gouverneur en conseil peut confier l’intérim à une autre personne pour un mandat maximal de six mois.

D’autres dispositions portent sur la rémunération et les frais du commissaire à l’éthique.  Bien qu’il soit envisagé que le conseiller sénatorial en éthique puisse occuper ses fonctions à temps partiel, le projet de loi exige que le commissaire à l’éthique n’occupe aucune autre charge gouvernementale ni aucun autre emploi rétribué.  Le commissaire a rang d’administrateur général de ministère; il peut conclure des contrats, des ententes ou d’autres arrangements et s’assurer les services des personnes nécessaires à l’exercice de ses activités.  Ces pouvoirs peuvent être délégués.  Le projet de loi prévoit aussi un processus de préparation d’états estimatifs des dépenses du bureau du commissaire.

   C.  Rôle général du commissaire à l’éthique

Le commissaire à l’éthique administre deux régimes différents en matière d’éthique destinés à au moins deux groupes différents.  Le premier groupe est formé des députés de la Chambre des communes, y compris les ministres, ministres d’État et secrétaires parlementaires lorsqu’ils exercent la charge de député.  Le deuxième groupe se compose des « titulaires de charge publique », qui comprend notamment les ministres, ministres d’État et secrétaires parlementaires, en plus d’un groupe important d’autres personnes(5).  Le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d’intérêts et l’après-mandat(6) (ci-après le Code du premier ministre) régit la conduite des ministres et des secrétaires parlementaires lorsqu’ils exercent la charge de ministre (ou de secrétaire parlementaire).  Les règles de chacun des régimes diffèrent actuellement sous plusieurs rapports.

À l’heure actuelle, les règles régissant les titulaires de charge publique sont administrées par le conseiller fédéral en éthique, qui est un fonctionnaire fédéral.  Le projet de loi renforcera l’indépendance et la transparence du processus par rapport au pouvoir exécutif.

   D.  Fonctions du commissaire à l’éthique à l’égard des députés
         de la Chambre des communes (art. 72.05 proposé)

Tout comme la disposition comparable relative au conseiller sénatorial en éthique, l’article 72.05 décrit brièvement et de manière générale les attributions du commissaire à l’éthique à l’égard des députés.  Il s’acquitte des fonctions qui lui sont conférées par la Chambre des communes en vue de régir la conduite des députés lorsqu’ils exercent la charge de député, et ce, sous l’autorité générale d’un comité de la Chambre(7).  Ainsi, dans l’exercice de ce volet de ses fonctions, le commissaire à l’éthique reçoit ses ordres et tire ses pouvoirs uniquement de la Chambre des communes.  Comme celui du conseiller sénatorial en éthique, le mandat du commissaire à l’éthique sera décrit plus précisément dans le code de conduite que la Chambre des communes pourra décider d’adopter(8).

Une nouvelle disposition du projet de loi C-4, qui ne figurait pas dans l’avant-projet de loi, a pour but de préciser la relation exacte entre les deux régimes mentionnés plus tôt et leur application à l’égard des titulaires de charge publique, c’est-à-dire les ministres et les secrétaires parlementaires.  Le paragraphe 72.05(1) se lit comme suit :

Le commissaire s’acquitte des fonctions qui lui sont conférées par la Chambre des communes en vue de régir la conduite des députés lorsqu’ils exercent la charge de député [souligné par l’auteur].

Ainsi, si une plainte est adressée au commissaire à l’éthique concernant un manquement à une obligation d’un ministre en vertu du code de la Chambre des communes, il semble que le commissaire devra en premier lieu déterminer si la personne en cause exerçait sa charge de ministre, auquel cas seul le Code du premier ministre s’appliquera.  Il convient de noter que les commissaires provinciaux chargés des conflits d’intérêts ont fréquemment déclaré, au fil des ans, que les ministres ne peuvent jamais faire complètement abstraction de leurs responsabilités ministérielles.  Bien que certaines actions d’un ministre soient de toute évidence liées uniquement à sa charge de député (p. ex. le fait de voter, le travail de circonscription), on peut tout de même avancer que la plupart de ses actions seront liées à sa charge ministérielle, ce qui fait que les règles du premier ministre s’appliqueront.  L’exception à cette règle générale pourrait être les dispositions du code de la Chambre des communes sur la divulgation, puisqu’il est possible qu’elles s’appliquent à tous les députés, y compris les titulaires de charge publique.

Le paragraphe 72.05(4) introduit une disposition qui ne se trouvait pas dans l’avant-projet de loi et qui renforce le principe selon lequel le rôle du commissaire à l’éthique consiste à appliquer un code ou l’autre, mais non les deux à la fois :

Il est entendu que ni le commissaire – au titre du paragraphe (1) – ni le comité ne sont compétents pour appliquer les principes, règles et obligations en matière d’éthique que le premier ministre établit pour les titulaires de charge publique et qui sont applicables aux ministres, ministres d’État et secrétaires parlementaires.

Comme les dispositions relatives au conseiller sénatorial en éthique, deux éléments de l’article 72.05 insistent sur le fait que les activités du commissaire à l’éthique dans l’exercice de ses fonctions à l’égard des députés(9) sont protégées par l’immunité parlementaire et que la Chambre des communes conserve le plein contrôle de la discipline de ses membres.  Le paragraphe 72.05(2) se lit comme suit :

Lorsqu’il s’acquitte de ces fonctions, il agit dans le cadre de l’institution de la Chambre des communes et possède les privilèges et immunités de cette chambre et des députés.

Plus loin, le paragraphe 72.05(5) dit :

Il est entendu que le présent article n’a pas pour effet de restreindre de quelque façon les pouvoirs, droits, privilèges et immunités de la Chambre des communes et des députés.

Comme il a déjà été mentionné relativement aux dispositions semblables concernant le conseiller sénatorial en éthique, les dispositions précédentes semblent avoir pour objet d’empêcher toute intervention judiciaire visant les fonctions officielles du commissaire à l’éthique ou les décisions de la Chambre à l’égard du commissaire.  L’article 7 du projet de loi, analysé plus loin, concerne aussi cet objectif, puisqu’il précise que le commissaire à l’éthique n’est susceptible d’aucun contrôle judiciaire de la part de la Cour fédérale.

   E.   Fonctions du commissaire à l’éthique à l’égard des titulaires
         de charge publique (art. 72.06 à 72.11 proposés)

Comme il a déjà été mentionné, le commissaire à l’éthique aura la responsabilité de différents groupes de titulaires de charge publique :

  • les ministres, ministres d’État et secrétaires parlementaires;
  • les membres du personnel politique des ministres et des ministres d’État;
  • les personnes nommées par le gouverneur en conseil (sauf exceptions prévues);
  • les titulaires d’une nomination ministérielle à temps plein désignés comme titulaires d’une charge publique par le ministre compétent.

Toutes ces personnes sont membres du pouvoir exécutif et sont actuellement soumises au Code du premier ministre,dont l’application relève de l’actuel conseiller fédéral en éthique, M. Howard Wilson.  Le nouveau commissaire à l’éthique assumera ce rôle.

Le commissaire à l’éthique a pour mission en ce qui touche les titulaires de charge publique :

  • d’appliquer les principes, règles et obligations en matière d’éthique que le premier ministre établit pour ceux-ci;
  • de donner, à titre confidentiel, des avis au premier ministre sur toute question d’éthique et notamment sur ces principes, règles et obligations;
  • de donner, à titre confidentiel, des avis aux titulaires de charge publique sur ceux de ces principes, règles et obligations qui leur sont applicables.

Le commissaire à l’éthique est tenu d’appliquer les principes, règles et obligations en matière d’éthique régissant le comportement des titulaires de charge publique que le premier ministre doit formuler et présenter au Parlement dans les 30 jours de séance suivant son entrée en fonction.  Toute modification apportée par la suite doit être présentée au Parlement dans les
15 jours de séance après avoir été formulée.

Tout parlementaire peut demander au commissaire de vérifier si un ministre, un ministre d’État ou un secrétaire parlementaire a respecté les règles que le premier ministre a établies à leur intention(10).  La demande doit être présentée par écrit et énoncer les obligations qui, de l’avis de son auteur, n’auraient pas été respectées ainsi que les motifs qui sous-tendent cette conclusion.  Le commissaire à l’éthique n’a pas le pouvoir de procéder à une enquête de sa propre initiative.

Dans le cadre de son enquête, le commissaire a le pouvoir d’assigner des témoins à comparaître devant lui et de leur enjoindre de déposer oralement ou par écrit et de produire les documents et autres pièces qu’il juge nécessaires.  Il a, pour contraindre les témoins à comparaître et à déposer, les pouvoirs d’une cour d’archives en matière civile.  Tous les éléments de preuve sont recueillis à huis clos.

Toute personne qui fournit des renseignements dans le cadre d’une telle étude est protégée contre le fait que ceux-ci pourraient être retenus contre elle devant les tribunaux ou dans quelque autre procédure, sauf dans le cas où elle serait poursuivie pour parjure relativement à sa déposition devant le commissaire à l’éthique.  Cette disposition est semblable au principe de protection prévu dans la Loi sur la preuve au Canada à l’égard des témoins assignés à comparaître.

Le commissaire est tenu de procéder à l’étude de toute question, même s’il peut, compte tenu des circonstances, interrompre l’étude.  L’article 72.11 prévoit que le commissaire doit suspendre sans délai l’étude visée s’il a des motifs raisonnables de croire que le ministre ou secrétaire en cause a commis, relativement à l’objet de l’étude, une infraction à une loi fédérale ou que l’on découvre qu’une enquête est en cours ou qu’une accusation a été portée.

Après étude relativement à une demande, ou lorsque la décision de suspendre l’étude a été prise, et après avoir donné au titulaire de charge publique en cause la possibilité de présenter son point de vue, le commissaire doit présenter au premier ministre un rapport énonçant les faits, son analyse de la question et ses conclusions.  Toutefois, la responsabilité de recommander des sanctions ne relève pas du commissaire.  Celui-ci ne peut inclure dans le rapport aucun renseignement dont il est tenu d’assurer la confidentialité.

Lorsqu’il remet le rapport au premier ministre, le commissaire en fournit un double à l’auteur de la demande et au secrétaire ou ministre en cause, et le rend accessible au public.

Les conseils confidentiels présentés au premier ministre relativement aux questions d’éthique générale et aux principes, règles et obligations éthiques établies par le premier ministre ainsi que les conseils confidentiels donnés aux titulaires de charge publique sur les principes, règles et obligations qui leur sont applicables demeurent confidentiels.

Le commissaire à l’éthique et son personnel sont tenus de respecter le caractère confidentiel de toute information dont ils prennent connaissance dans l’exercice des pouvoirs et fonctions relatifs aux titulaires de charge publique, et ce, à deux exceptions près : premièrement, s’il est essentiel de révéler cette information dans le cadre de leurs fonctions (p. ex. la conduite d’une étude ou la rédaction d’un rapport), et deuxièmement, en cas de poursuite pour parjure relativement à une déclaration faite au commissaire à l’éthique.

   F.   Dispositions générales relatives au commissaire
         à l’éthique (art. 72.12 et 72.13 proposés)

Le commissaire et son personnel sont protégés contre la possibilité d’être assignés à témoigner en cour civile ou criminelle concernant toute information venue à leur connaissance dans l’exercice de leurs fonctions.  De même, ils bénéficient de l’immunité en matière civile ou pénale pour les actes accomplis de bonne foi dans l’exercice de leurs fonctions.

Tous les ans avant la fin de juin, le commissaire à l’éthique doit remettre deux rapports annuels sur ses activités au président de la Chambre des communes, qui les dépose devant la Chambre.  Un des rapports porte sur ses activités à titre de commissaire à l’éthique à l’égard des députés et l’autre sur ses activités à l’égard des titulaires de charge publique(11).  Il ne peut inclure dans les rapports des renseignements dont il est tenu d’assurer la confidentialité.

   G.  Autres dispositions, modifications corrélatives et dispositions
         de coordination (art. 1 et 3 et art. 5 à 41)

Les articles 1 et 3 du projet de loi abrogent les articles correspondants de la Loi sur le Parlement du Canada qui traitent de la participation des sénateurs et des députés à des contrats du gouvernement fédéral.  Il est largement admis que ces dispositions sont désuètes et on s’attend à ce que les codes de conduite adoptés par la Chambre des communes et le Sénat prévoient de nouvelles dispositions relativement à cette question.

Comme il a été mentionné plus tôt, le rôle de l’actuel conseiller fédéral en éthique est incorporé dans celui du commissaire à l’éthique.  Ce nouveau rôle ne comprend toutefois pas les fonctions du conseiller en éthique à l’égard du lobbying.  Il faut donc apporter un certain nombre de modifications à la Loisur l’enregistrement des lobbyistes pour y supprimer toutes les références au conseiller à l’éthique.  Ces modifications sont apportées par les articles 19 à 24 du projet de loi.  La personne responsable du code de conduite des lobbyistes et de toutes les fonctions qui s’y rattachent, y compris les enquêtes, sera dorénavant le registraire.

Les articles 5 et 35 du projet de loi suppriment des annexes de la Loi sur l’accès à l’information et de la Loi sur la protection des renseignements personnels le terme « conseiller en éthique », puisque ce poste n’existera plus.  Puisque le conseiller sénatorial en éthique et le commissaire à l’éthique ne figurent pas dans ces annexes, ces deux loisne se rapportent pas à ces hauts fonctionnaires.

La modification apportée par l’article 6 du projet de loi à la Loi sur la Société canadienne des postes ajoute le conseiller sénatorial en éthique et le commissaire à l’éthique à la liste des postes du Parlement pour lesquels l’affranchissement du courrier n’est pas nécessaire.

L’article 7 du projet de loi modifie la Loi sur les Cours fédérales pour préciser que le conseiller sénatorial en éthique et le commissaire à l’éthique sont exclus de la définition d’« office fédéral ».  Le Sénat, la Chambre des communes et tout comité ou membre de l’une ou l’autre chambre en sont déjà exclus.  Cette exclusion a pour effet de soustraire les organes visés à la compétence de la Cour fédérale en matière de contrôle judiciaire.

Les autres modifications corrélatives ajoutent des renvois au conseiller sénatorial en éthique et au commissaire à l’éthique aux lois dans lesquelles on mentionne ensemble les institutions du Parlement.  En guise d’exemple, la Loi sur la saisie-arrêt et la distraction de pensions comporte une section distincte intitulée « Sénat, Chambre des communes et bibliothèque du Parlement ».  Les articles 9 à 17 du projet de loi ont pour effet d’ajouter le bureau du conseiller sénatorial en éthique et le commissariat à l’éthique à chaque article de cette section où les trois institutions parlementaires sont mentionnées.

Le projet de loi compte de nombreuses dispositions de coordination, parce que certaines modifications corrélatives ont trait à des lois qui font l’objet de modifications par voie de projets de loi que le Parlement étudie actuellement ou à des projets de loi qui ont été adoptés, mais qui ne sont pas encore entrés en vigueur(12).

   H.  Entrée en vigueur (art. 42)

À l’exception des dispositions de coordination, les dispositions du projet de loientrent en vigueur à la date, ou aux dates, fixées par le gouverneur en conseil.  Il s’agit d’un article utilisé habituellement pour permettre l’entrée en vigueur de certaines dispositions à des dates différentes, s’il est nécessaire de le faire.

COMMENTAIRE

Le mode de nomination du commissaire à l’éthique et la durée de son mandat originellement proposés dans l’avant-projet de loi ont été fortement critiqués par les comités du Sénat et de la Chambre de communes.  Les deux comités ont recommandé que cette nomination se fasse après consultation du chef de chacun des partis reconnus et un vote de la chambre concernée, mais celui du Sénat a aussi recommandé d’exiger l’approbation des partis.  Ils ont aussi recommandé que leur mandat soit renouvelable.  En outre, le comité du Sénat a recommandé que l’on nomme un fonctionnaire spécialement attitré au Sénat.  Toutes ces recommandations ont été acceptées pour le projet de loi C-34 et pour le projet de loi le C-4 qui l’a ensuite remplacé (sauf celle qui proposait d’exiger aussi l’approbation des partis), ainsi que celles concernant la durée du mandat recommandée par chacun des comités pour le fonctionnaire de sa propre chambre.

Il faut souligner que le rapport d’avril 2003 du comité du Sénat sur l’avant-projet de loi montrait qu’il n’y avait pas consensus pour ce qui est de savoir si le bureau du conseiller sénatorial à l’éthique devait avoir une assise législative ou plutôt faire partie intégrante du Sénat.  En bref, ceux qui favorisaient l’approche non législative soutenaient qu’une loi entraînerait un risque important d’intervention judiciaire dans les activités du conseiller sénatorial.  Ceux qui favorisaient la création d’une charge au moyen d’une loi souhaitaient insister sur l’indépendance du poste et soulignaient que la plupart des provinces canadiennes avaient procédé par voie législative sans éprouver de difficulté.  Le projet de loi C-4 donne une assise législative au bureau du conseiller sénatorial en éthique, mais l’amendement à l’ancien projet de loi C-34 adopté par le Sénat en troisième lecture aurait eu pour effet de transformer la nomination ainsi que la teneur et la durée du mandat du conseiller en de simples questions de régie interne.

Le commissaire à l’éthique occupera un poste nouveau et sans précédent dans la législation canadienne.  Pour ce qui est de ses fonctions à l’égard des députés et de l’application du code de conduite de la Chambre des communes, le projet de loi comporte bon nombre de dispositions qui précisent que le titulaire de ce poste jouit des privilèges de la Chambre et qui font en sorte que ses activités ne seront assujetties à aucun contrôle judiciaire.  Puisque tous les pouvoirs du commissaire lui seront attribués par la Chambre des communes, le projet de loi ne précise aucune question de procédure relativement à ce contexte.

Par contre, pour ce qui est de ses fonctions à l’égard des titulaires de charge publique (dans le contexte parlementaire, les ministres et les secrétaires parlementaires), les pouvoirs du commissaire à l’éthique sont exposés en détail, y compris le même pouvoir dont dispose une cour d’archives en matière civile d’assigner des témoins et de les contraindre à déposer.  Les actions du commissaire à l’éthique dans ce contexte ne seront probablement pas protégées par les privilèges parlementaires, mais la modification à la Loi sur les Cours fédérales mentionnée précédemment empêchera tout contrôle judiciaire par la Cour fédérale.

Dans les provinces, dont la plupart ont un commissaire à l’éthique, tous les législateurs sont soumis au même code de conduite, qui comprend des exigences additionnelles à l’intention des ministres.  Comme nous l’avons déjà précisé, le commissaire à l’éthique sera chargé de l’application des deux codes.  Tous les simples députés de la Chambre des communes seront soumis au code de la Chambre, ainsi que les ministres dans l’exercice de leur charge de simple député.  Par contre, lorsqu’ils exerceront leur charge de ministre – selon toute vraisemblance, la plupart du temps –, c’est leCode du premier ministre qui s’appliquera.  Comme nous l’avons aussi souligné, un des aspects du code de la Chambre des communes qui pourrait s’appliquer aux ministres et aux secrétaires parlementaires est l’ensemble des dispositions en matière de divulgation.  Toutefois, s’il est statué que les règles concernant la divulgation des intérêts privés énoncées dans le projet de code dont il a été fait rapport à la Chambre le 30 octobre 2003(13) ne s’appliquent pas, il y aura anomalie en ce que le résumé des intérêts privés des conjoints et des enfants à charge sera rendu public dans le cas des députés, mais non dans celui des ministres et des secrétaires parlementaires.

On ne sait pas très bien quelle sera la politique concernant les contrats passés avec le gouvernement du Canada.  Le projet de loi C-4 supprime de la Loi sur le Parlement du Canada les dispositions actuelles relatives à la participation aux contrats fédéraux.  Les règles qui doivent remplacer ces dispositions figurent clairement dans le projet de code de la Chambre des communes, mais de manière indirecte dans le Code du premier ministre(14).  Cette question pourrait devoir être clarifiée.

La question des cadeaux est un autre domaine où il y a possibilité de chevauchement.  En vertu du Code du premier ministre, l’acceptation de cadeaux admissibles doit être déclarée publiquement si la valeur du cadeau est supérieure à 200 $.  Dans le projet de code de la Chambre, le seuil est fixé à 500 $.  Si un ministre accepte un cadeau d’une valeur de 300 $ d’un électeur, doit-il le déclarer?  L’ensemble du travail consacré à la circonscription d’un ministre sera-t-il considéré comme du travail effectué dans le cadre de sa charge de député, même si le premier ministre a établi des règles spéciales concernant le comportement que les ministres doivent adopter à cet égard?

Il faudra donc voir exactement quels résultats concrets donnera l’approche proposée pour les ministres et les secrétaires parlementaires



*       Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur.  Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur.

(1)     Par une motion adoptée le 10 février 2004, la Chambre des communes prévoit le rétablissement à la
3e session de projets de loi qui n’avaient pas reçu la sanction royale au cours de la 2e session de la
37e législature et qui sont morts au Feuilleton à la prorogation du Parlement, le 12 novembre 2003.  Ces projets de loi pourront être rétablis à l’étape du processus législatif à laquelle ils étaient rendus à la fin de la 2e session.

(2)     Cet amendement proposait que la nomination du conseiller sénatorial en éthique se fasse par voie de résolution du Sénat et avec le consentement des chefs des partis reconnus, alors que le projet de loi prévoyait que cette nomination serait faite par le gouverneur en conseil après consultation.  Cet amendement aurait éliminé l’assise législative du mécanisme de nomination et, selon plusieurs, réduit de beaucoup l’indépendance du titulaire.  L’amendement supprimait également du projet de loi toute mention du mandat, du mode de révocation, des frais, du personnel, etc.  On présume que ces aspects auraient été précisés dans le Règlement du Sénat ou considérés comme des questions internes qui auraient pu être réglées au moyen de contrats conclus avec le titulaire.

(3)     En plus de l’avant-projet de loi, l’initiative comprenait un projet de code de conduite basé à bien des égards sur le rapport de 1997 du Comité mixte spécial sur un code de conduite, aussi appelé rapport Oliver-Milliken, du nom de ses coprésidents.

(4)     Le projet de loi a été examiné au Sénat par le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, et à la Chambre des communes, par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

(5)     Il s’agit notamment du personnel politique des ministres et de la plupart des personnes nommées par le gouverneur en conseil.

(6)     Voir le site du conseiller en éthique.  Il existe aussi d’autres règles et obligations imposées aux titulaires de charge publique et établies par le premier ministre.

(7)     À la Chambre des communes, ce comité devrait être le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

(8)     Le 30 octobre 2003, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a présenté un rapport contenant le code qu’il recommandait d’adopter en matière de conflit d’intérêts, mais la Chambre ne l’avait pas encore adopté à la prorogation du Parlement, le 12 novembre 2003.

(9)     Contrairement à sa compétence relativement aux titulaires de charge publique.

(10)   Ces demandes ne doivent pas être formulées relativement au groupe plus large des titulaires de charge publique.

(11)   Dans l’avant-projet de loi d’octobre 2002, un seul rapport était exigé.  Cette disposition semble être une autre indication selon laquelle les différents rôles du commissaire à l’éthique seront aussi cloisonnés que possible.

(12)   Une des dispositions de coordination n’avait pas trait à une modification corrélative, mais plutôt au fait que si le projet de loi C-25 : Loi modernisant le régime de l’emploi et des relations de travail dans la fonction publique était adopté, la définition de « fonction publique » devrait être modifiée pour y inclure le personnel du bureau du conseiller sénatorial à l’éthique et du commissariat à l’éthique.  (Le projet de loi C-25 a reçu la sanction royale le 7 novembre 2003 et certaines de ses dispositions sont entrées en vigueur.)

(13)   Le projet de code prévoit la divulgation confidentielle des intérêts privés des conjoints et des personnes à charge et la publication de leur résumé de la même façon que pour les députés.

(14)   En vertu du Code du premier ministre, un intérêt dans une société qui passe des contrats avec le gouvernement serait considéré comme un actif contrôlé et il serait nécessaire de s’en départir par voie de vente ou de transfert en fiducie.  Il n’est pas interdit directement, comme dans le projet de code de la Chambre, de passer personnellement des contrats avec le gouvernement.


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