Résumé législatif du Projet de loi C-51

Résumé Législatif
Résumé législatif du projet de loi C-51 : Loi édictant la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada et la Loi sur la sûreté des déplacements aériens, modifiant le Code criminel, la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité et la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et apportant des modifications connexes et corrélatives à d'autres lois
Julie Béchard, Division de l'économie, des ressources et des affaires internationales
Tanya Dupuis, Division des affaires juridiques et sociales
Christine Morris, Division des affaires juridiques et sociales
Holly Porteous, Division des affaires juridiques et sociales
Dominique Valiquet, Division des affaires juridiques et sociales
Publication no 41-2-C51-F
PDF 500, (38 Pages) PDF
2015-06-19

Table des matières

Dans ce résumé législatif, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.


1 Introduction

Le 30 janvier 2015, le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile a déposé à la Chambre des communes le projet de loi C-51, Loi édictant la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada et la Loi sur la sûreté des déplacements aériens, modifiant le Code criminel, la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité et la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et apportant des modifications connexes et corrélatives à d'autres lois (titre abrégé : « Loi antiterroriste de 2015 »). Le 6 mai 2015, la Chambre des communes a adopté le projet de loi, avec amendements. Le Sénat l'a renvoyé au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, qui en a fait rapport, sans amendement, mais avec des observations, le 27 mai 20151 . Le projet de loi a reçu la sanction royale le 18 juin 2015.

1.1 Législation antiterroriste

Le cadre législatif canadien de la lutte antiterroriste repose à la base sur trois lois :

  • la Loi antiterroriste (2001);
  • la Loi modifiant la Loi sur l'aéronautique (2001);
  • la Loi sur la sécurité publique (2002).
Néanmoins, ces dernières années, d'autres mesures antiterroristes importantes sont venues compléter ce dispositif dans un certain nombre de lois, dont les suivantes :
  • la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés;
  • la Loi sur la justice pour les victimes d'actes de terrorismes;
  • la Loi sur la lutte contre le terrorisme;
  • la Loi sur le terrorisme nucléaire;
  • la Loi renforçant la citoyenneté canadienne;
  • la Loi sur la protection du Canada contre les terroristes;
  • la Loi sur la prévention des voyages de terroristes;
  • le projet de loi C-51.

1.2 Purpose Of Bill C-51

D'une façon générale, le projet de loi C-51 a pour effet :

  • d'élargir l'échange de renseignements entre les institutions fédérales qui sont compétentes ou qui ont des attributions à l'égard des activités portant atteinte à la sécurité nationale;
  • d'élargir la portée du Programme de protection des passagers afin d'y inclure toute personne soupçonnée de menacer la sécurité des transports ou susceptible de se déplacer en aéronef dans le but de commettre une infraction de terrorisme;
  • d'abaisser les exigences relatives à l'imposition d'un engagement de ne pas troubler l'ordre public en lien avec le terrorisme, de prolonger la durée de ces engagements et d'accroître la gamme des conditions qu'un juge peut imposer;
  • d'incriminer quiconque, sciemment, préconise ou fomente la perpétration d'infractions de terrorisme en général et d'habiliter les juges à ordonner la saisie ou le retrait de propagande terroriste, y compris les publications dans Internet;
  • d'améliorer la protection des témoins, en particulier de ceux qui témoignent dans des instances mettant en cause des renseignements en matière de sécurité ou de criminalité;
  • d'habiliter le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) à mener des opérations visant à perturber des menaces;
  • d'accroître la capacité du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile d'empêcher la divulgation de renseignements relatifs à la sécurité nationale dans des affaires de certificats de sécurité.

Le texte qui suit fournit des renseignements généraux et un aperçu des principales mesures proposées dans le projet de loi C-51 en résumant l'essentiel de chaque partie. Pour faciliter la consultation, l'information est présentée dans le même ordre que dans le projet de loi :

  • la section 2.1 traite de la communication d'information entre les institutions fédérales (partie 1 du projet de loi);
  • la section 2.2 traite de la sûreté des déplacements aériens et notamment de la « liste des personnes interdites de vol » (partie 2 du projet de loi);
  • la section 2.3 présente les modifications au Code criminel en matière d'infractions terroristes (partie 3 du projet de loi);
  • la section 2.4 présente les modifications à la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité relatives aux mesures de perturbation (partie 4 du projet de loi);
  • la section 2.5 présente les modifications à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés relatives notamment aux certificats de sécurité (partie 5 du projet de loi).

2 Description And Analysis

2.1 Édiction de la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada (partie 1 du projet de loi C-51, art. 2 à 10 et annexes 1 à 3)

Ces dernières années, les trois commissions d'enquête suivantes ont formulé, dans leurs conclusions et recommandations, des préoccupations relativement à la collecte de renseignements, aux enquêtes et à l'échange de renseignements dans le contexte de la sécurité nationale :

  • la Commission d'enquête concernant certaines activités de la Gendarmerie royale du Canada (la Commission McDonald)2 ;
  • la Commission d'enquête sur les actions des responsables canadiens relativement à Maher Arar (l'enquête sur l'affaire Arar)3 ;
  • la Commission d'enquête relative aux mesures d'investigation prises à la suite de l'attentat à la bombe commis contre le vol 182 d'Air India (l'enquête sur l'affaire Air India)4 .

Comme l'indique le rapport d'enquête sur l'affaire Air India, le SCRS commence généralement à enquêter sur une menace bien avant que les autres organismes (comme la police) n'interviennent5 . Dans son rapport, le juge Major, commissaire chargé de l'enquête sur l'affaire Air India, a expliqué de quelle façon la collecte et la communication d'information peuvent servir à évaluer les menaces contre la sécurité du Canada :

Le terrorisme constitue à la fois une menace sérieuse à la sécurité et un crime grave. Les renseignements secrets recueillis par les services de renseignement canadiens et étrangers peuvent servir à avertir le gouvernement des menaces terroristes et aider à prévenir les attentats terroristes. Ils peuvent également servir de preuve dans les poursuites pour infractions de terrorisme6 .

Dans cette optique, la « nécessité d'une réciprocité et d'une collaboration entre les États a des antécédents qui remontent très loin dans le temps; ce n'est pas un phénomène nouveau7 ». Dans le deuxième rapport de la Commission d'enquête concernant certaines activités de la Gendarmerie royale du Canada, le juge McDonald explique en ces termes l'importance, voire la nécessité de la communication d'information et de la collaboration entre les services du renseignement de sécurité du Canada et ceux de l'étranger : Les rapports avec les services étrangers de sécurité et de renseignements supposent inévitablement la mise en commun ou l'échange de renseignements : le Canada doit être disposé à leur fournir de l'information pour en recevoir. La réciprocité est donc essentielle au succès des ententes de coopération avec les services étrangers8 .

Il est peut-être nécessaire de disposer d'une marge de manœuvre dans le contexte de la sécurité nationale, car c'est en fonction de la nature de la situation qu'on pourra déterminer l'intervention qui convient le mieux. Le juge Major décrit l'analyse au cas par cas à appliquer pour réagir à une menace terroriste de la manière suivante :

La préservation de l'équilibre délicat entre la transparence et le secret présente des défis à chaque étape de l'intervention en réponse à la menace terroriste. Chaque menace terroriste est unique et nécessite une réaction adaptée aux circonstances qui lui sont propres, de sorte qu'il est impossible de définir en quoi consisterait l'intervention « idéale ». Dans certains cas, il conviendra clairement de faire intervenir la police dès le départ. Dans d'autres, on servira probablement mieux l'intérêt public en permettant aux services de renseignement de continuer à surveiller la menace et à faire rapport de la situation, ou encore en faisant appel à d'autres services non policiers pour perturber un complot qui se fomente. Il se peut donc que le meilleur moyen de mettre à profit les renseignements de sécurité n'ait rien à voir avec le système de justice pénale9 .

L'entrée en vigueur de la Loi antiterroriste, en 2001, a introduit des dispositions :

ayant une incidence particulière sur la capacité des Canadiens et des personnes qui vivent au Canada d'avoir accès à l'information qui les concerne ou qui concerne leur gouvernement, ainsi que des dispositions qui autorisent le gouvernement à recueillir des renseignements personnels au sujet des Canadiens et des personnes qui vivent au Canada et de les partager avec d'autres10 .

Le juge O'Connor, dans le cadre de l'enquête sur l'affaire Arar, a recommandé qu'un organisme indépendant examine les activités de communication d'information de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) (recommandation no 10). Il a également conseillé de manière plus générale que les organismes qui prennent part à la communication d'information relative à la sécurité nationale passent en revue les recommandations adressées à la GRC au sujet de la communication d'information, afin de s'assurer que leurs politiques en matière de partage d'information soient conformes, dans la mesure du possible, aux approches préconisées dans ces recommandations (recommandation no 11)11 . Dans son examen de la politique en la matière, le juge O'Connor a également recommandé un examen indépendant des activités relatives à la sécurité nationale de l'Agence des services frontaliers du Canada, de Citoyenneté et Immigration Canada, de Transports Canada, du Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada et d'Affaires étrangères et Commerce international Canada (recommandation no 9). En outre, il a recommandé de confier au Comité de surveil-lance des activités de renseignement de sécurité (CSARS) des pouvoirs élargis en matière de contrôle (recommandation no 10) et de créer des passerelles législatives entre les organismes d'examen des activités relatives à la sécurité nationale afin de permettre l'échange d'informations, le renvoi d'enquêtes à un autre organisme, l'institution d'enquêtes conjointes et la coordination de la préparation des rapports (recommandation no 11)12 .

Par ailleurs, les comités parlementaires qui ont étudié la Loi antiterroriste ont pour leur part réclamé la mise sur pied d'un comité de parlementaires sur la sécurité nationale13 , de même que l'adoption de dispositions prévoyant un autre examen de la loi14 .

Dans ce contexte, la partie 1 du projet de loi C-51 édicte la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada (LCISC), laquelle vise à renforcer la capacité de réaction du gouvernement aux menaces multidimensionnelles envers la sécurité en permettant l'échange de renseignements à l'échelle pluri-institutionnelle.

2.1.1 Préambule

La LCISC contient un préambule qui en établit l'intention législative. Bien que les articles 3 et 4 de cette loi présentent un énoncé plus substantiel de son objet et de ses principes, le préambule énumère certaines notions, dont les suivantes :

  • le Canada ne doit pas servir d'intermédiaire pour des activités qui menacent la sécurité d'un État étranger;
  • les activités qui portent atteinte à la sécurité du Canada sont souvent menées de manière clandestine, trompeuse ou hostile; elles sont de plus en plus globales, complexes et sophistiquées, et voient le jour et évoluent souvent rapidement;
  • la protection du Canada et de sa population excède souvent le mandat ou les capacités d'une seule institution fédérale;
  • le Parlement reconnaît la nécessité de communiquer de l'information et de regrouper des éléments d'information disparates, cette information devant être communiquée d'une manière conforme à la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte) et à la protection de la vie privée;
  • les institutions fédérales sont garantes d'une communication d'information responsable et efficace.

2.1.2 Objet et principes régissant la communication d'information (art. 3 et 4 de la LCISC)

L'article 3 de la LCISC énonce que cette mesure législative a pour objet d'encourager les institutions fédérales à communiquer entre elles de l'information et de faciliter une telle communication, afin de protéger le Canada contre des activités portant atteinte à sa sécurité.

Les principes guidant la communication de l'information énoncés à l'article 4 reposent notamment sur les notions suivantes :

  • la communication d'information responsable et efficace protège le Canada et les Canadiens;
  • le respect des mises en garde et du droit de regard de la source relativement à l'information ainsi communiquée est compatible avec une communication d'information responsable et efficace;
  • la conclusion d'ententes de communication d'information convient aux institutions fédérales qui communiquent régulièrement entre elles de l'information;
  • la fourniture de rétroaction sur la façon dont l'information qui est communiquée est utilisée et sur son utilité en matière de protection contre des activités portant atteinte à la sécurité du Canada facilite une communication d'information responsable et efficace;
  • seuls ceux qui, au sein d'une institution, exercent la compétence ou les attributions de celle ci à l'égard d'activités portant atteinte à la sécurité du Canada devraient recevoir l'information communiquée en vertu de la LCISC.

Les objets et principes énoncés aux articles 3 et 4 servent de source d'interprétation de la loi à ceux qui l'administrent.

En ce qui a trait aux réserves et au droit de regard de la source relativement à l'information communiquée, le juge O'Connor, dans le cadre de l'enquête sur l'affaire Arar, a formulé une recommandation particulière sur l'importance des réserves écrites (recommandation no 9). Il a fait observer ce qui suit :

Il est aussi important que la GRC, dans la mesure du possible, contrôle l'utilisation qui sera faite de l'information qu'elle fournit à d'autres organismes. Les réserves écrites utilisées par la GRC et les autres organismes qui partagent de l'information ont comme objet de tenter d'empêcher les destinataires de divulguer cette information et de s'en servir de façon inacceptable. Bien que de telles réserves ne fournissent aucune garantie de protection contre une telle utilisation, le sens commun nous dit qu'elles devraient grandement réduire le risque15 .

2.1.3 Communication d'information (art. 2 et 5 à 8 de la LCISC)

Le paragraphe 5(1) de la LCISC autorise une institution fédérale à communiquer de l'information au responsable d'une institution fédérale destinataire dont le titre figure à l'annexe 316 , de sa propre initiative ou sur demande, si l'information se rapporte à la compétence ou aux attributions de l'institution destinataire prévues par une loi fédérale ou une autre autorité légitime à l'égard d'activités portant atteinte à la sécurité du Canada, notamment en ce qui touche la détection, l'identification, l'analyse, la prévention ou la perturbation de ces activités ou une enquête sur celles-ci17 .

Un mécanisme de protection de la vie privée, au paragraphe 5(1), prévoit que la communication d'information est assujettie aux dispositions de « toute autre loi fédérale ou de tout règlement pris en vertu de l'une de celles-ci interdisant ou restreignant la communication d'information ». Le cadre d'interprétation prévu à l'article 4 semble établir une approche plus restrictive à l'égard des pratiques de communication d'information que les pouvoirs de communication d'information énoncés à l'article 5. La communication subséquente d'information par une institution fédérale, au sens du paragraphe 5(1) et conformément à celui-ci, est autorisée en vertu du paragraphe 5(2).

L'article 6 concerne le cas où l'utilisation et la communication subséquente de l'information communiquée au titre du paragraphe 5(1) ne sont pas régies par le cadre de communication d'information de la LCISC. Au cours de son étude du projet de loi C 51, le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes a modifié l'article 6 afin de préciser que l'utilisation et la communication subséquente de l'information communiquée au titre du paragraphe 5(1) qui se font en dehors du cadre de communication d'information de la loi demeurent assujetties aux exigences, restrictions et interdictions légales existantes.

La disposition de non-dérogation prévue à l'article 8 précise que la LCISC n'a pas pour effet de porter atteinte aux pouvoirs en matière de communication d'information qui découlent d'une autre loi fédérale ou d'une loi provinciale. Les pouvoirs existants en matière de communication d'information continuent donc de s'appliquer au cadre de communication d'information.

L'article 2 de la LCISC définit ce qui constitue une « activité portant atteinte à la sécurité du Canada » d'une façon large et plus détaillée que ne le fait la définition des « menaces envers la sécurité du Canada » qui figure à l'article 2 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité (Loi sur le SCRS). Le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes a modifié cette définition en supprimant le terme « licites » de l'exception qui y est prévue, et qui, à l'origine, excluait de la définition uniquement les activités « licites » de défense d'une cause, de protestation, de manifestation d'un désaccord ou d'expression artistique. Ainsi, toutes les activités de défense d'une cause, de protestation, de manifestation d'un désaccord ou d'expression artistique sont exclues de la définition d'une activité portant atteinte à la sécurité du Canada.

Le tableau 1 compare la terminologie employée dans la Loi sur le SCRS et la LCISC pour décrire les activités ciblées.

Tableau 1 – Comparaison de la terminologie employée dans la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité et la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada pour décrire les activités ciblées
Article 2 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité Article 2 de la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada

« [M]enaces envers la sécurité du Canada » signifie
a) l'espionnage ou le sabotage visant le Canada ou préjudiciables à ses intérêts, ainsi que les activités tendant à favoriser ce genre d'espionnage ou de sabotage,
b) les activités influencées par l'étranger qui touchent le Canada ou s'y déroulent et sont préjudiciables à ses intérêts, et qui sont d'une nature clandestine ou trompeuse ou comportent des menaces envers quiconque,
c) les activités qui touchent le Canada ou s'y déroulent et visent à favoriser l'usage de la violence grave ou de menaces de violence contre des personnes ou des biens dans le but d'atteindre un objectif politique, religieux ou idéologique au Canada ou dans un État étranger,
d) les activités qui, par des actions cachées et illicites, visent à saper le régime de gouvernement constitutionnellement établi au Canada ou dont le but immédiat ou ultime est sa destruction ou son renversement, par la violence.
La présente définition ne vise toutefois pas les activités licites de défense d'une cause, de protestation ou de manifestation d'un désaccord qui n'ont aucun lien avec les activités mentionnées aux alinéas a) à d).

[Italiques des auteurs]

« [A]ctivité portant atteinte à la sécurité du Canada » s'entend d'une activité qui porte atteinte à la souveraineté, à la sécurité ou à l'intégrité territoriale du Canada ou à la vie ou à la sécurité de la population du Canada, notamment les activités ci-après si elles entraînent une telle atteinte :
a) entraver la capacité du gouvernement fédéral – ou de son administration – en matière de renseignement, de défense, d'activités à la frontière, de sécurité publique, d'administration de la justice, de relations diplomatiques ou consulaires ou de stabilité économique ou financière du Canada;
b) entraîner un changement de gouvernement au Canada ou influer indûment sur un tel gouvernement par l'emploi de la force ou de moyens illégaux;
c) espionner, saboter ou se livrer à une activité secrète influencée par l'étranger;
d) se livrer au terrorisme;
e) se livrer à une activité qui a pour effet la prolifération d'armes nucléaires, chimiques, radiologiques ou biologiques;
f) entraver le fonctionnement d'infrastructures essentielles;
g) entraver le fonctionnement de l'infrastructure mondiale d'information, au sens de l'article 273.61 de la Loi sur la défense nationale;
h) causer des dommages graves à une personne ou à ses biens en raison de ses liens avec le Canada;
i) se livrer à une activité au Canada qui porte atteinte à la sécurité d'un autre État.
Il est entendu que sont exclues les activités de défense d'une cause, de protestation, de manifestation d'un désaccord ou d'expression artistique.

[Italiques des auteurs]

2.1.4 Modifications connexes (art. 3 à 8 du projet de loi)

La partie 1 du projet de loi C-51 apporte par ailleurs des modifications à la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur le ministère des Pêches et des Océans, la Loi sur le ministère des Pêches et des Océans, la Loi de l'impôt sur le revenu, la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques et la Loi de 2001 sur l'accise afin qu'elles cadrent avec le régime de la nouvelle loi, et ce, au moyen de modifications tenant compte des exigences de confidentialité propres à leurs mécanismes respectifs de partage d'information. Par exemple, les règles très strictes qui gouvernent la communication de l'information sur les contribuables obtenue dans le cadre de l'application de la Loi de l'impôt sur le revenu sont modifiées de façon à permettre la communication de tels renseignements s'il existe des motifs raisonnables de soupçonner qu'ils seraient utiles à une enquête visant à vérifier la présence de menaces (au sens de l'art. 2 de la Loi sur le SCRS) ou à toute enquête visant à établir si certaines infractions peuvent avoir été commises (terrorisme et recyclage des produits de la criminalité en rapport avec une infraction de terrorisme en vertu du Code criminel).

2.2 Édiction de la Loi sur la sûreté des déplacements aériens (partie 2 du projet de loi C-51, art. 11 à 14)

À la suite de l'édiction, en 2004, de la Loi de 2002 sur la sécurité publique, Transports Canada a créé en juin 2007 le Programme de protection des passagers et la « Liste des personnes précisées » s'y rapportant. Cette loi a entraîné de nombreuses modifications à la Loi sur l'aéronautique, notamment l'adoption du paragraphe 4.81(1), lequel autorise le ministre des Transports à demander à tout transporteur aérien qu'il fournisse des renseignements à l'égard de « toute personne qu'il précise ». Une fois communiqués, ces renseignements sont réunis dans la Liste des personnes précisées.

Conformément au Règlement sur le contrôle de l'identité18 de Transports Canada, l'information sur un voyageur qui est saisie dans le système de réservation d'un transporteur aérien est automatiquement comparée aux renseignements conservés dans une base de données contenant les noms des personnes figurant sur la Liste des personnes précisées. Si un passager se retrouve sur celle-ci, l'information est signalée et transmise à l'agent de sécurité du transporteur pour qu'il confirme la correspondance en comparant le nom du passager, sa date de naissance et son sexe aux renseignements contenus dans la liste.

Le pouvoir du ministre des Transports d'interdire à une personne inscrite de monter à bord d'un aéronef découle de l'article 4.76 de la Loi sur l'aéronautique, qui autorise le Ministre à donner des directives d'urgence en cas de risque de danger immédiat pour la sûreté de l'aviation, d'un aéronef, d'un aérodrome, d'autres installations aéronautiques ou la sécurité du public ou celle des passagers ou de l'équipage d'un aéronef. Ces directives d'urgence entrent en vigueur immédiatement et le demeurent pendant 72 heures (art. 4.771 de la Loi sur l'aéronautique).

Il existe un processus par lequel une personne précisée peut demander à faire retirer son nom de la liste. C'est en effet à la personne concernée qu'il incombe de démontrer au Bureau de réexamen pourquoi elle devrait être retirée de la liste et non au gouvernement de justifier le maintien du nom de cette personne sur la liste. Le Bureau de réexamen transmet ensuite sa recommandation au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, qui décide si le nom de la personne demeure sur la Liste des personnes précisées ou en est retiré. Bien qu'il soit possible de demander un contrôle judiciaire de la décision du Ministre, il est en revanche exclu de faire appel de celle-ci.

Dans son Rapport annuel 2011-2012, le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSARS) a fait remarquer que le Programme de protection des passagers (PPP) présentait des difficultés et des lacunes qui, selon lui, avaient « considérablement réduit la possibilité que la LPP [Liste des personnes précisées] soit un outil efficace pour la sûreté de l'aviation ». En effet :

Le CSARS a constaté que le seuil fixé dans la loi à l'égard du Programme est difficile à respecter en pratique. Pour les ministères chargés des désignations, cela a suscité des incertitudes quant aux critères d'inscription sur la LPP. En vertu du PPP, une personne inscrite sur la LPP peut se voir refuser l'embarquement si l'on croit qu'elle peut représenter une « menace immédiate » pour la sûreté de l'aviation, seuil qui s'enracine dans la Loi sur l'aéronautique. La notion de « menace immédiate » laisse place à interprétation, de sorte que les ministères et organismes chargés des désignations ont eu du mal avec le processus prévu à cette fin. Cette imprécision a aussi fait l'objet d'un débat public, les associations de défense des libertés civiles (entre autres) s'en étant prises au fait que la loi ne prévoyait pour le programme aucune limite ni mandat clair, à leur avis19 .

2.2.1 Établissement de la Liste des personnes inscrites et directives ministérielles (art. 8 et 9 de la Loi sur la sûreté des déplacements aériens)

La partie 2 du projet de loi C-51 édicte la Loi sur la sûreté des déplacements aériens (LSDA), laquelle remplace le cadre qui régissait auparavant l'inscription à la Liste des personnes précisées.

Le paragraphe 8(1) de la LSDA établit un cadre législatif autorisant le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile à établir une liste sur laquelle il peut inscrire toute personne dont il a des motifs raisonnables de soupçonner qu'elle :

  • soit participera ou tentera de participer à un acte qui menacerait la sûreté des transports;
  • soit se déplacera en aéronef dans le but de commettre une infraction de terrorisme précisée (participation aux activités d'un groupe terroriste, facilitation d'une activité terroriste ou perpétration d'une infraction au profit d'un groupe terroriste) ou un acte criminel dont l'élément matériel, acte ou omission, constitue également une activité terroriste20 , au Canada ou à l'étranger.

Il convient de noter que le sous-alinéa 8(1) b)(i) de la LSDA vise spécifiquement certaines infractions de terrorisme précisées, et non l'ensemble des infractions de terrorisme inscrites dans le Code criminel (le Code).

Le Ministre doit examiner la liste tous les 90 jours afin de déterminer si les motifs sur lesquels il s'est basé pour inscrire le nom de chaque personne existent encore. Toutefois, cet examen est sans effet sur la validité de la liste (par. 8(2)). Le Ministre peut en tout temps modifier l'information concernant une personne inscrite et modifier la liste en enlevant le nom d'une personne (et tous les renseignements s'y rapportant) si les motifs pour lesquels le nom a été inscrit sur la liste n'existent plus (par. 8(3)).

Conformément à l'article 9, le Ministre est habilité à donner les directives qu'il estime raisonnables et nécessaires en vue d'éviter qu'une personne inscrite commette un acte qui menacerait la sûreté des transports ou qui l'amènerait à se déplacer en aéronef pour se livrer à une activité terroriste (au sens des al. 8(1) a) et 8(1) b)). Ces directives incluent le refus de transporter une personne ou le contrôle d'une personne avant qu'elle n'entre dans une zone « stérile » (réglementée) d'un aéroport ou qu'elle monte à bord d'un aéronef (par. 9(1))21 . Il semble que, aux termes de l'article 9, le Ministre pourrait également donner une telle directive pour d'autres motifs qui ne sont pas précisés dans la disposition. La LSDA ne paraît contenir aucune disposition portant que les personnes doivent être avisées de leur inscription sur la liste avant de faire l'objet d'une directive.

Le Comité permanent de la sécurité publique et nationale a modifié le libellé de l'article 9. Dans sa forme originale, le projet de loi accordait au Ministre le pouvoir d'enjoindre à un transporteur aérien « de prendre toute mesure » que le Ministre estimait raisonnable et nécessaire en vue d'éviter qu'une personne inscrite com-mette les actes visés au paragraphe 8(1). Dans sa version modifiée, cette disposition confère au Ministre le pouvoir d'« enjoindre à un transporteur aérien de prendre la mesure raisonnable et nécessaire qu'il précise en vue d'éviter qu'une personne inscrite commette les actes visés au paragraphe 8(1) » [ITALIQUES DES AUTEURS].

2.2.2 Application de la loi et collecte et communication des renseignements (art. 6, 10 à 14 et 18 de la LSDA)

La LSDA prévoit un cadre selon lequel le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile peut obtenir l'assistance du ministre des Transports, du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, d'un membre de la Gendarmerie royale du Canada ou d'un membre du personnel civil de celle-ci, du directeur ou d'un employé du Service canadien du renseignement de sécurité, d'un dirigeant ou d'un employé de l'Agence des services frontaliers du Canada et de toute autre personne ou entité réglementaire. Cette assistance peut consister à recueillir des renseignements auprès du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile ou de ces personnes ou entités ou à communiquer des renseignements au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile ou à ces personnes ou entités (art. 10).

La loi prévoit expressément que l'Agence des services frontaliers du Canada assistera le Ministre dans l'application et l'exécution de la loi (1) en communiquant les renseignements relatifs à une personne inscrite qui sont recueillis auprès des transporteurs aériens et des exploitants de systèmes de réservation de services aériens au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et à toute autre personne ou entité qui contribue à l'application et à l'exécution de la loi (c.-à-d. les personnes et entités citées à l'art. 10 de la LSDA) et (2) en avisant les transporteurs aériens et les exploitants de systèmes de réservation de services aériens que le nom d'un passager est le même que celui d'une personne inscrite (art. 14).

En outre, l'alinéa 13b) de la LSDA prévoit que le ministre des Transports peut assister le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile en recueillant auprès des transporteurs aériens et des exploitants de systèmes de réservation de services aériens les renseignements qu'ils possèdent sur une personne inscrite (ces renseignements sont précisés à l'annexe de la Loi sur l'aéronautique) 22 . Le ministre des Transports doit détruire les renseignements reçus dans les sept jours suivant leur obtention s'ils ne sont pas raisonnablement nécessaires pour l'application de la LSDA (art. 18).

Le projet de loi prévoit que non seulement les transporteurs aériens, mais aussi les exploitants de systèmes de réservation de services aériens sont tenus de fournir les renseignements dont ils disposent visés à l'annexe de la Loi sur l'aéronautique à l'égard des personnes qui sont ou seront vraisemblablement à bord d'un aéronef pour tout vol (par. 6(2))23 .

Le ministre des Transports est autorisé à communiquer les renseignements recueillis auprès des transporteurs aériens et des exploitants de systèmes de réservation de services aériens au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et à toute autre personne ou entité citée à l'article 10 (al. 13d)). De plus, le ministre des Transports est autorisé à communiquer la liste des personnes inscrites aux transpor¬teurs aériens et aux exploitants de systèmes de réservation de services aériens, et à communiquer aux transporteurs aériens toute directive du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile prise en vertu de l'article 9 (al. 13a) et 13c)).

Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile est habilité à communi-quer les renseignements obtenus dans l'exercice des attributions qui lui sont confé-rées au titre de la LSDA en vue d'assurer la sûreté des transports ou de prévenir un déplacement aérien dont l'objet est la perpétration d'une activité terroriste24 au Canada ou à l'étranger (art. 11). Par ailleurs, la LSDA autorise le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile à conclure, avec le gouvernement d'un État étran¬ger ou un organisme international, une entente écrite concernant la communication de tels renseignements, et le Ministre ne peut communiquer la liste des personnes inscrites, en tout ou en partie, que conformément à l'entente écrite (art. 12).

2.2.3 Recours administratif et Appels (art. 15 à 17 de la LSDA)

Une personne inscrite peut demander au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile que son nom soit retiré de la liste dans les 60 jours suivant un refus de transport, et elle doit se voir accorder la possibilité de faire des observations25 . Le Ministre est alors tenu de décider s'il existe encore des motifs raisonnables qui justifient l'inscription du nom du demandeur sur la liste et de donner sans délai à celui-ci un avis de la décision qu'il a rendue (mais pas des motifs qui la justifient). Si le Ministre ne rend pas sa décision dans les 90 jours suivant la réception de la demande, ou dans tout autre délai supplémentaire convenu par lui et le demandeur, il est réputé avoir refusé la demande (art. 15).

La LSDA autorise une personne inscrite à présenter une demande d'appel à la Cour fédérale relativement à une directive ministérielle (donnée en vertu de l'article 9 de la loi) et à une décision ministérielle d'ajouter ou de conserver le nom de la personne sur la liste (prise en vertu des art. 8 ou 15 de la LSDA). Lors de tels appels, la Cour fédérale décide si la décision est raisonnable compte tenu de l'information dont elle dispose. Une personne inscrite qui a fait l'objet d'un refus de transport en consé¬quence d'une directive donnée en vertu de l'article 9 peut interjeter appel unique¬ment après qu'on a refusé de retirer son nom de la liste des personnes inscrites à l'issue du recours administratif prévu à l'article 15 de la LSDA. L'intéressé a alors 60 jours pour faire appel (art. 16)26 .

Les règles habituelles en matière de preuve ne s'appliquent pas à l'instance d'appel, car la LSDA permet l'admission d'une preuve par ouï-dire. En effet, « [le juge] peut recevoir et admettre en preuve tout élément – même inadmissible en justice – qu'il estime digne de foi et utile et peut fonder sa décision sur celui-ci » (al. 16(6)e))27 .

Plusieurs dispositions ayant trait aux instances d'appel initiales (en application de l'art. 16) et à tout appel subséquent de la décision originale visent à protéger la sécurité nationale et la sécurité d'autrui (par. 16(6) et art. 17). Plus précisément :

  • il incombe au juge de garantir la confidentialité des renseignements et autres éléments de preuve que lui fournit le Ministre et dont la divulgation porterait atteinte à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui;
  • à la demande du Ministre, le juge tient une audience à huis clos et en l'absence de l'appelant et de son conseil dans le cas où la divulgation des renseignements ou autres éléments de preuve en cause pourrait porter atteinte à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui;
  • le juge veille à ce que soit fourni à l'appelant un résumé de la preuve qui ne comporte aucun élément dont la divulgation porterait atteinte à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui et qui permet à l'appelant d'être suffisamment informé de la thèse du Ministre à l'égard de l'instance en cause;
  • enfin, le juge peut fonder sa décision sur des renseignements et autres éléments de preuve même si un résumé de ces derniers n'est pas fourni à l'appelant.

La procédure d'appel prévue dans la LSDA est très similaire au régime d'examen des certificats de sécurité et des ordonnances de détention établi aux termes de la Loi sur l'immigration et la protection de réfugiés qui existait avant 2008 et qui a été examiné par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Charkaoui c. Canada (Citoyenneté et Immigration). La Cour a statué que le régime de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (LIPR) portait atteinte au droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne d'une manière qui n'est pas conforme aux principes de justice fondamentale, ce qui contrevient aux dispositions énoncées à l'article 7 de la Charte28 .

Malgré la similitude entre les dispositions relatives à l'appel prévues dans la LSDA et les dispositions de l'ancien régime (inconstitutionnel) de la LIPR, l'ampleur de l'entrave à la liberté et à la sécurité découlant de l'application des dispositions relatives à l'appel de la LSDA est le pivot d'une réflexion visant à établir si l'article 7 de la Charte s'applique à ces nouvelles dispositions. L'analyse fondée sur l'article 7 doit se faire en fonction du contexte, la question étant de savoir si « les principes de justice fondamentale pertinents ont été respectés pour l'essentiel, compte tenu du contexte et de la gravité de l'atteinte29 ».

2.2.4 Interdictions (art. 20 à 22 de la LSDA)

La LSDA dispose qu'il est interdit de communiquer la liste des personnes inscrites, sauf pour l'application des articles 10 à 14 de cette loi. Il est également interdit de communiquer le fait qu'une personne est ou a été une personne inscrite, sauf pour l'application des articles 10 à 16 de la LSDA30 ou si cela est nécessaire à des fins d'exécution de la loi ou pour la tenue d'activités licites. Par contre, il est permis de communiquer le fait qu'une personne est ou a été une personne inscrite en conformité avec un subpoena, un document ou une ordonnance d'un tribunal, d'une personne ou d'un organisme ayant le pouvoir de contraindre à la production de renseignements, ou si la personne communique le fait qu'elle-même est ou a été une personne inscrite (art. 20).

L'interdiction de communiquer toute information concernant une personne inscrite ou le fait qu'une personne est ou a été une personne inscrite s'applique également aux transporteurs aériens et aux exploitants de systèmes de réservation de services aériens, sauf si une telle communication vise l'exécution des fonctions que leur attribue la loi (décrites aux art. 6, 13 et 30).

Il est interdit aux transporteurs aériens de transporter une personne faisant l'objet d'une directive de contrôle donnée en vertu de l'article 9, à moins qu'elle n'ait subi les contrôles exigés (par. 21(2)).

2.2.5 Infractions et peines (art. 22 à 27 de la LSDA et art. 12 du projet de loi)

Toute personne qui contrevient aux articles 6 (Obligation des transporteurs aériens), 20 ou 21 (Interdictions), à une directive donnée en vertu de l'article 9 ou à une dispo¬sition d'un règlement pris en vertu de la loi est coupable d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. L'infraction d'entrave à l'action d'une personne exerçant ses attributions au titre de la loi (art. 22) est une infraction mixte punissable par mise en accusation ou par procédure sommaire31 .

Il convient également de noter que l'alinéa 7.6(1) a) de la Loi sur l'aéronautique fait l'objet d'une modification corrélative permettant de désigner toute disposition de la LSDA à titre de disposition dont la transgression est traitée conformément à la procédure prévue dans la Loi sur l'aéronautique visant l'établissement des sanctions pécuniaires.

Une personne physique déclarée coupable d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par voie de mise en accusation encourt un emprisonnement maximal d'un an et une amende maximale de 5 000 $ ou l'une de ces peines. Une personne morale déclarée coupable d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par mise en accusation encourt une amende maximale de 500 000 $. L'emprisonnement est exclu lorsqu'une personne est déclarée coupable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire ou se trouve en défaut de paiement de l'amende en question (art. 23).

Une amende non payée est recouvrable. Dès que la déclaration de culpabilité est enregistrée, elle est assimilée à un jugement obtenu par Sa Majesté du chef du Canada contre la personne en cause pour une dette dont le montant équivaut à l'amende. En outre, tous les frais liés à l'enregistrement de la déclaration de culpabilité à la Cour supérieure d'une province sont recouvrables comme s'ils avaient été enregistrés avec la déclaration de culpabilité (par. 23(6) et (7)).

La défense de diligence raisonnable s'applique à toute contravention à la LSDA, à ses règlements ou à une directive donnée en vertu de l'article 9, si la personne a pris toutes les précautions voulues pour s'y conformer (art. 24). Cependant, cette défense ne s'applique pas à l'infraction d'entrave prévue à l'article 22 de la LSDA.

L'article 25 impose un délai de prescription de 12 mois aux poursuites visant une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

2.2.6 Pouvoirs d'inspection (art. 28 à 31 de la LSDA))

L'article 28 habilite le ministre des Transports à entrer dans tout lieu (notamment dans un aéronef, des installations aéroportuaires ou tout autre lieu utilisé par l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien) et à saisir et conserver des renseignements. Dans l'exercice de ces pouvoirs d'inspection et de vérification, le ministre des Transports peut, notamment, utiliser tout ordinateur ou système informatique pour prendre connaissance des données qu'il contient ou auxquelles il donne accès (par. 28(2)).

Les articles 487 à 492 du Code s'appliquent aux infractions – prétendues ou commises – à la LSDA (par. 28(3)). Ils comprennent un éventail de dispositions concernant les mandats de perquisition, le prélèvement de substances corporelles à des fins d'analyse génétique et le registre des délinquants sexuels. L'inclusion des infractions prétendues au seuil de preuve requis pour l'application des dispositions de perquisition et de saisie du Code constitue un seuil de preuve moins exigeant que l'obligation, aux termes de certaines autres dispositions du Code, d'avoir des « motifs raisonnables de croire » qu'une infraction a été commise. Le fait que le paragraphe 28(3) s'inscrive dans la section de la LSDA régissant les pouvoirs d'inspection du ministre des Transports peut donner à penser que le législateur entend limiter les dispositions applicables du Code à celles qui ont un rapport avec les activités d'inspection.

Aux termes de l'article 31, le ministre des Transports peut, s'il estime qu'un transporteur aérien contrevient à une disposition de la LSDA, à ses règlements ou à une directive donnée en vertu de l'article 9, prendre des mesures enjoignant à quiconque de faire (ou de cesser de faire) quoi que ce soit qui lui paraît raisonnable et nécessaire en vue du respect de la loi, de ses règlements ou des directives et rendre des ordonnances concernant notamment le déplacement des personnes ou le mouvement des aéronefs dans les aérogares et le déroutement d'aéronefs vers un lieu d'atterrissage déterminé.

2.2.7 Pouvoirs de réglementation (art. 32 de la LSDA)

L'article 32 de la LSDA habilite le gouverneur en conseil à prendre des règlements pour « prendre toute mesure d'ordre réglementaire prévue par la présente loi », notamment pour régir la vérification de l'identité des passagers aériens ou l'utilisation et la protection des directives (données en vertu de l'art. 9) et l'utilisation et la protection des renseignements fournis par le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, le ministre des Transports ou l'Agence des services frontaliers du Canada aux transporteurs aériens et aux exploitants de systèmes de réservation de services aériens. Le gouverneur en conseil peut également prendre des règlements interdisant à un transporteur aérien de transporter un passager dont l'apparence ne correspond pas à son identification.

2.3 Modification du Code criminel (partie 3 du projet de loi C-51, art. 15 à 39)

La Loi antiterroriste32 , qui est entrée en vigueur en trois étapes successives entre 2001 et 2003, a créé plusieurs infractions relatives au terrorisme aux termes de la partie II.1 du Code : financer le terrorisme (art. 83.02 et 83.03 du Code), participer à une activité d'un groupe terroriste (comme recruter une personne pour le compte d'un groupe terroriste ou mettre des compétences à la disposition d'un tel groupe) (art. 83.18), faciliter une activité terroriste (art. 83.19), commettre une infraction au profit d'un groupe terroriste (art. 83.2), charger une personne de se livrer à une activité pour un groupe terroriste (art. 83.21) et cacher une personne susceptible de se livrer à une activité terroriste (art. 83.23).

La Loi antiterroriste a aussi eu pour effet de modifier les dispositions législatives relatives aux crimes haineux. Entre autres, elle a ajouté l'article 320.1 aux dispositions du Code concernant la propagande haineuse, pour permettre la saisie, la suppression et la destruction de toute matière qui constitue de la propagande haineuse emmagasinée et rendue accessible au moyen d'un ordinateur.

Néanmoins, les menaces terroristes sont en constante évolution. Les signes précoces de la radicalisation d'une personne ne sont pas faciles à déceler, et les signes avant-coureurs d'un attentat peuvent être limités ou inexistants. De ce fait, il est difficile de réunir les éléments de preuve qui permettraient d'appuyer des poursuites judiciaires33 . La partie 3 du projet de loi C-51 modifie le Code de façon à accorder aux forces de l'ordre des pouvoirs accrus pour mieux contrer la menace terroriste actuelle.

2.3.1 Apologie du terrorisme (art. 16 du projet de loi)

Comme on l'a déjà fait dans d'autres pays comme l'Australie, la France et le Royaume-Uni34 , le projet de loi C-51 prévoit la création d'une nouvelle infraction liée à l'apologie du terrorisme : préconiser ou fomenter la perpétration d'infractions de terrorisme. Le nouvel article 83.221 du Code, qui requiert une intention coupable (mens rea35 ), punit d'un emprisonnement maximal de cinq ans quiconque, sciemment, par la communication de déclarations36 , préconise ou fomente la perpétration d'infractions de terrorisme en général37 , sachant que la communication entraînera la perpétration de l'une de ces infractions ou sans se soucier du fait que la communication puisse ou non entraîner la perpétration de l'une de ces infractions.

Le nouvel article 83.221 du Code prévoit une exception qui a peut-être été incluse dans le projet de loi afin de tenir compte du droit à la liberté d'expression garanti à l'alinéa 2b) de la Charte. Ainsi, la personne qui préconise ou fomente la perpétration de l'apologie du terrorisme ne sera pas déclarée coupable de la nouvelle infraction visée à l'article 83.221.

D'après l'ancien ministre de la Justice, Peter MacKay :

Cette nouvelle infraction comblera une lacune dans la législation criminelle en érigeant en infraction le fait pour une personne de sciemment préconiser ou fomenter la perpétration d'infractions de terrorisme en général, sachant que la communication entraînera la perpétration de l'une de ces infractions ou sans se soucier du fait que la communication puisse ou non entraîner la perpétration de l'une de ces infractions. À l'heure actuelle, le droit criminel s'applique uniquement au fait de conseiller la perpétration d'un acte terroriste précis, comme le fait de dire à quelqu'un d'aller faire sauter une gare de train. Cependant, la loi actuelle ne s'appliquerait pas nécessairement à une personne qui encourage activement d'autres personnes à commettre des infractions de terrorisme de manière plus générale38 .
2.3.1.1 Saisie et importation de propagande terroriste (art. 15, 16 et 31 du projet de loi)

Le projet de loi C-51 prévoit l'obtention de mandats judiciaires pour saisir et confisquer des publications (nouvel art. 83.222 du Code) ou pour effacer d'un ordinateur toutes données électroniques (nouvel art. 83.223 du Code) qui constituent de la « propagande terroriste39 ». L'application de ce dernier mandat est toutefois limitée aux ordinateurs situés dans le ressort du tribunal.

Par ailleurs – comme c'est actuellement le cas à l'égard de la pornographie juvénile, d'un enregistrement voyeuriste, de la publicité de services sexuels et de la propagande haineuse –, aucune accusation criminelle n'est nécessaire pour obtenir de tels mandats de saisie. Le policier doit, par contre, avoir des motifs raisonnables de croire que la publication ou le matériel électronique constituent de la propagande terroriste. Comme dans les cas de saisie de propagande haineuse, le consentement préalable du procureur général est requis.

La création de la nouvelle infraction d'apologie du terrorisme entraîne également un certain nombre de modifications corrélatives, par exemple l'interdiction d'importer de la propagande terroriste au Canada (art. 31 du projet de loi)40 . Les autres modifications corrélatives sont présentées ci-dessous.

2.3.1.2 Écoute électronique (art. 19 du projet de loi)

L'article 183 du Code énumère les infractions pour lesquelles les organismes d'appli¬cation de la loi peuvent, de façon générale par mandat, procéder à de l'écoute électronique. Le projet de loi modifie l'article 183 afin d'ajouter à la liste d'infractions énumérées la nouvelle infraction d'apologie du terrorisme.

2.3.1.3 Prélèvement d'ADN (art. 23 du projet de loi)

L'article 487.04 du Code contient une liste d'infractions pour lesquelles est autorisé le prélèvement d'échantillons de substances corporelles du délinquant après sa condamnation, et ce, à des fins d'analyse génétique. L'article 23 du projet de loi modifie l'art. 487.04 de telle sorte qu'une condamnation relative à la nouvelle infraction d'apologie du terrorisme entraînera le prélèvement d'ADN, sauf si le délinquant établit que le prélèvement aurait un effet nettement démesuré sur sa vie privée et sa sécurité.

2.3.1.4 Assignation à résidence et maintien en incarcération (art. 30 du projet de loi)

Si un détenu présente un risque inacceptable de commettre la nouvelle infraction d'apologie du terrorisme avant l'expiration légale de sa peine, la Commission nationale des libérations conditionnelles pourra, en vertu de l'article 30 du projet de loi, ordonner qu'il demeure dans un établissement résidentiel communautaire ou un établissement psychiatrique pendant sa libération d'office.

De plus, la Commission nationale des libérations conditionnelles pourra, dans certaines conditions, décider de maintenir en incarcération pendant toute la durée de sa peine un délinquant reconnu coupable d'apologie du terrorisme (c.-à-d. lui refuser la libération d'office)41 .

2.3.2 Engagement assorti de conditions/arrestation à titre préventif (art. 17, 18, 26, 27 et 32 du projet de loi)

L'article 83.3 du Code permet à un agent de la paix d'arrêter une personne à titre préventif ou de demander à la cour d'imposer à celle-ci un engagement assorti de conditions lorsqu'il a des motifs raisonnables de croire que cela est nécessaire pour éviter qu'une activité terroriste ne soit entreprise. Cette disposition avait été ajoutée au Code lors de l'entrée en vigueur de la Loi antiterroriste en décembre 2001, mais avait cessé de s'appliquer en 2007 en raison d'une disposition de temporarisation.

En 2013, la Loi sur la lutte contre le terrorisme a rétabli dans le Code l'art. 83.3, mais celui-ci est toujours subordonné à une disposition de temporarisation. Cet article doit donc expirer le 15e jour de séance suivant le 15 juillet 2018, sauf prorogation au moyen d'une résolution des deux Chambres du Parlement (art. 83.32 du Code).

L'article 17 du projet de loi abaisse le fardeau de la preuve nécessaire pour imposer à une personne un engagement assorti de conditions (nouveau par. 83.3(2) du Code)42 et pour arrêter sans mandat une personne qui est susceptible de commettre une activité terroriste (nouveau par. 83.3(4) du Code). Le tableau 2 présente les modifi¬cations apportées par le projet de loi aux paragraphes 83.3(2) et 83.3(4) du Code.

Tableau 2 – Fardeau de la preuve prévu par le Code criminel relativement à l'imposition d'un engagement assorti de conditions et à l'arrestation à titre préventif, avant et après les modifications apportées par le projet de loi C-51
Avant les modifications apportées par le projet de loi C 51 Après les modifications apportées par le projet de loi C 51

par. 83.3(2)
Sous réserve du paragraphe (1), l'agent de la paix peut déposer une dénonciation devant un juge de la cour provinciale si, à la fois :
a) il a des motifs raisonnables de croire qu'une activité terroriste sera entreprise;

b) il a des motifs raisonnables de soupçonner que l'imposition, à une personne, d'un engagement assorti de conditions ou son arrestation est nécessaire pour éviter que l'activité terroriste ne soit entreprise.

par. 83.3(2)
Sous réserve du paragraphe (1), l'agent de la paix peut déposer une dénonciation devant un juge de la cour provinciale si, à la fois :
a) il a des motifs raisonnables de croire à la possibilité qu'une activité terroriste soit entreprise;

b) il a des motifs raisonnables de soupçonner que l'imposition, à une personne, d'un engagement assorti de conditions ou son arrestation aura vraisemblablement pour effet d'empêcher que l'activité terroriste ne soit entreprise.

par. 83.3(4)
Par dérogation aux paragraphes (2) et (3), l'agent de la paix, s'il a des motifs raisonnables de soupçonner que la mise sous garde de la personne est nécessaire afin de l'empêcher de se livrer à une activité terroriste, peut, sans mandat, arrêter la personne et la faire mettre sous garde en vue de la conduire devant un juge de la cour provinciale en conformité avec le paragraphe (6) dans l'un ou l'autre des cas suivants :
a) l'urgence de la situation rend difficilement réalisable le dépôt d'une dénonciation au titre du paragraphe (2) et les motifs visés aux alinéas (2)a) et b) sont réunis;
b) une sommation a été décernée par suite de la dénonciation déposée au titre du paragraphe (2)

[Italiques des auteurs]

par. 83.3(4)
Par dérogation aux paragraphes (2) et (3), l'agent de la paix, s'il a des motifs raisonnables de soupçonner que la mise sous garde de la personne aura vraisemblablement pour effet de l'empêcher de se livrer à une activité terroriste, peut, sans mandat, arrêter la personne et la faire mettre sous garde en vue de la conduire devant un juge de la cour provinciale en conformité avec le paragraphe (6) dans l'un ou l'autre des cas suivants :
a) l'urgence de la situation rend difficilement réalisable le dépôt d'une dénonciation au titre du paragraphe (2) et les motifs visés aux alinéas (2)a) et b) sont réunis;
b) une sommation a été décernée par suite de la dénonciation déposée au titre du paragraphe (2).

[Italiques des auteurs]

L'article 17 du projet de loi fait passer de trois à sept jours le délai maximum pendant lequel la personne arrêtée peut être détenue (nouveaux par. 83.3(7.1) et 83.3(7.2) du Code)43 . Toutefois, la personne conserve son droit à l'assistance d'un avocat44 et le projet de loi prévoit une nouvelle condition pour autoriser un ajournement pour une période d'au plus sept jours : le policier doit convaincre le juge que « l'enquête sur laquelle s'appuie [la] mise sous garde est menée de façon diligente ». Par ailleurs, le procureur général et le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile devront faire état, dans leurs rapports annuels sur l'application de l'article 83.3 du Code, du nombre d'ajournements autorisés après trois jours de détention (art. 18 du projet de loi).

Les paragraphes 17(4) et 17(6) du projet de loi permettent au juge d'assortir l'enga-gement d'une caution et de conditions supplémentaires : le dépôt du passeport (ou tout autre document de voyage) et l'obligation de rester dans une région désignée. Si le juge n'assortit pas son ordonnance de ces deux conditions, il devra consigner ses motifs dans le dossier de cour.

La durée maximale de l'engagement passe d'un à deux ans si la personne a déjà été reconnue coupable d'une infraction de terrorisme (par. 17(5) du projet de loi). La peine d'emprisonnement maximale en cas de violation de l'engagement augmente également, passant de deux à quatre ans (mise en accusation) et de 6 à 18 mois (procédure sommaire) (art. 27 du projet de loi).

2.3.3 Engagement de ne pas troubler l'ordre public (art. 25, 26 et 27 du projet de loi)

L'engagement de ne pas troubler l'ordre public (art. 810 et suivants du Code) est assez similaire à l'engagement assorti de conditions prévu à l'article 83.3. Ces mesures visent à prévenir la perpétration d'une infraction, et c'est pourquoi nombre des modifications apportées par le projet de loi à l'article 83.3 (arrestation à titre préventif et engagement assorti de conditions pour prévenir un acte terroriste) s'appliquent également à l'engagement de ne pas troubler l'ordre public en cas de crainte qu'une infraction de terrorisme soit commise (crainte d'une infraction de terrorisme)45 . Cet engagement est prévu au nouvel article 810.011 du Code.

Ainsi, à l'instar des changements apportés aux conditions d'imposition d'un engagement assorti de conditions, l'article 25 du projet de loi abaisse le fardeau de preuve nécessaire pour imposer un engagement de ne pas troubler l'ordre public (crainte d'une infraction de terrorisme). Le tableau 3 présente le nouveau paragraphe 810.011(1) du Code, et le tableau 4 dresse une comparaison avec l'engagement assorti de conditions.

Tableau 3 – Fardeau de la preuve prévu par le Code criminel relativement à l'imposition d'un engagement de ne pas troubler l'ordre public (crainte d'une infraction de terrorisme), avant et après les modifications apportées par le projet de loi C-51
Before Bill C-51 Amendments After Bill C-51 Amendments

par. 810.01(1)
Quiconque a des motifs raisonnables de craindre qu'une personne commettra une infraction prévue à l'article 423.1, une infraction d'organisation criminelle ou une infraction de terrorisme peut, avec le consentement du procureur général, déposer une dénonciation devant un juge d'une cour provinciale.

[Italiques des auteurs]

par. 810.011(1)
Quiconque a des motifs raisonnables de craindre la possibilité qu'une personne commette une infraction de terrorisme peut, avec le consentement du procureur général, déposer une dénonciation devant un juge d'une cour provinciale.

[Italiques des auteurs]

 

Tableau 4 – Comparaison des dispositions du projet de loi C-51 sur l'engagement assorti de conditions (art. 83.3) avec celles sur l'engagement de ne pas troubler l'ordre public (crainte d'une infraction de terrorisme) (art. 810.011)
  Engagement assorti de conditions
(art. 83.3 du Code)
[art. 17 du projet de loi]
Engagement de ne pas troubler l'ordre public (crainte
d'une infraction de terrorisme)
(art. 810.011 du Code)
[art. 25 du projet de loi]
Motifs
  • Motifs raisonnables de croire à la possibilité qu'une activité terroriste soit entreprise
  • Motifs raisonnables de soupçonner que l'imposition, à une personne, d'un engagement assorti de conditions aura vraisemblablement pour effet d'empêcher que l'activité terroriste ne soit entreprise
  • Motifs raisonnables de craindre la possibilité qu'une personne commette une infraction de terrorisme
Consentement préalable du procureur général Oui Oui
Arrestation sans mandat et détention prolongée avant comparution Oui (maximum 7 jours de détention) Non
Possibilité d'assortir l'engagement d'une caution Oui Oui
Dépôt du passeport Oui Oui
Obligation de rester dans une région désignée Oui Oui
Toute condition raisonnable Oui Oui
Obligation de participer à un programme de traitement Oui, si raisonnable Oui
Obligation de porter un dispositif de surveillance à distance Oui, si raisonnable Oui
Obligation de regagner sa résidence et d'y rester aux moments précisés Oui, si raisonnable Oui
Obligation de s'abstenir de consommer des drogues et de l'alcool Oui, si raisonnable Oui
Obligation de fournir un échantillon d'une substance corporelle à des fins d'analyse a Oui, si raisonnable Oui
Interdiction d'avoir en sa possession une arme à feu ou une arme prohibée Oui Oui
Durée maximale de l'engagement 1 an (2 ans si condamnation antérieure pour terrorisme) 1 an (5 ans si condamnation antérieure pour terrorisme)
Peine d'emprisonnement en cas de violation
  • Pas de minimum
  • Maximum : 4 ans (acte criminel) ou 18 mois (procédure sommaire)
  • Pas de minimum
  • Maximum : 4 ans (acte criminel) ou 18 mois (procédure sommaire)

note a. :Cette condition tire son origine du projet de loi C-30 (Loi donnant suite à la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire R. c. Shoker, L.C. 2011, ch. 7), entré en vigueur le 12 mars 2015..

2.3.4 Sécurité des témoins (art. 15, 21, 22 et 24 du projet de loi)

2.3.4.1 Protection des témoins (art. 21 et 22 du projet de loi)

L'article 486 du Code établit la règle générale voulant que les procédures en droit criminel aient lieu en audience publique. Le juge peut exclure le public s'il est d'avis que cela est dans l'intérêt de la moralité publique, du maintien de l'ordre ou de la bonne administration de la justice.

L'article 21 du projet de loi précise que le juge peut ordonner le huis clos de sa propre initiative, mais aussi à la demande du poursuivant ou d'un témoin. Ce dernier pourra également être autorisé à témoigner derrière un écran ou tout dispositif lui permettant de ne pas être vu du public. La demande du poursuivant ou du témoin pourra être présentée avant ou pendant l'instance.

Les articles 486.1 à 486.5 du Code prévoient d'autres mesures spéciales pour protéger les témoins, en particulier les personnes vulnérables comme les enfants. Le juge peut donc, par exemple, permettre qu'une personne de confiance soit présente aux côtés du témoin, interdire à l'accusé de procéder lui-même au contre-interrogatoire et interdire la publication de tout renseignement qui permettrait d'établir l'identité du témoin.

L'article 22 du projet de loi ajoute que le juge peut, de sa propre initiative, rendre toute autre ordonnance pour assurer la sécurité d'un témoin. Par exemple, il pourrait permettre à une personne de témoigner de façon anonyme46 . Avant de rendre son ordonnance, le juge devra prendre en compte les facteurs énumérés au nouveau paragraphe 486.7(3) du Code, dont le droit à un procès public et équitable et l'intérêt de la société à encourager la dénonciation des infractions.

2.3.4.2 Intimidation d'une personne associée au système judiciaire (art. 15 et 24 du projet de loi)

L'article 423.1 du Code prévoit l'infraction d'intimidation d'une « personne associée au système judiciaire ». La définition de ce terme, à l'article 2 du Code, comprend notamment les témoins, les jurés et les poursuivants, qui jouent un rôle dans l'administration de la justice pénale.

Le projet de loi C-51 élargit la portée de l'infraction prévue à l'article 423.1 en ajoutant à la définition de « personne associée au système judiciaire » toute personne qui joue un rôle dans le cadre d'une instance mettant en cause des renseignements secrets ou sensibles en matière de criminalité, de relations internationales, de défense ou de sécurité nationale (par. 15(2) du projet de loi). Il peut s'agir, par exemple, de témoins dans une instance relative à l'imposition d'un certificat de sécurité en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés47 .

Parallèlement, le projet de loi élargit le champ d'application de l'engagement de ne pas troubler l'ordre public prévu à l'article 810.01 du Code. Un juge pourra donc ordonner à un défendeur qu'il contracte un engagement assorti de conditions s'il a des motifs raisonnables de craindre que celui-ci tente d'intimider une personne qui joue un rôle dans une instance mettant en cause des renseignements secrets ou sensibles (art. 24 du projet de loi).

2.4 Modification de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité (partie 4 du projet de loi, art. 40 à 51)

Avant l'adoption du projet de loi C-51, la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité (Loi sur le SCRS) n'avait pas subi de modifications en profondeur depuis la création du SCRS, en 198448 . En 2015, la Loi sur la protection du Canada contre les terroristes49 a eu pour effet de protéger, de façon générale, l'anonymat des sources humaines du SCRS, de préciser la portée du mandat du SCRS et de confirmer que la Cour fédérale est habilitée à décerner des mandats dont la portée s'étend à l'extérieur du Canada.

La partie 4 du projet de loi C-51 modifie l'article 12 de la Loi sur le SCRS afin de permettre au Service de prendre, au Canada ou à l'extérieur du Canada, des mesures pour réduire les menaces envers la sécurité du Canada. Aux fins du présent résumé législatif, ces mesures sont appelées « activités ou opérations de perturbation ».

2.4.1 Activités ou opérations de perturbation (art. 40 et 42 du projet de loi)

Les fonctions du SCRS sont énoncées aux articles 12 à 17 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité :

  • recueillir des renseignements sur les « menaces envers la sécurité du Canada », en faire rapport au gouvernement du Canada et conseiller celui-ci à cet égard (art. 12)50 ;
  • fournir des évaluations de sécurité aux ministères du gouvernement du Canada et mener les enquêtes nécessaires à cette fin (art. 13 et 15);
  • fournir des conseils et des informations à un ministre sur des questions de sécurité ou des activités criminelles dans la mesure où ces conseils et informations sont en rapport avec l'exercice, par le ministre en question, des pouvoirs et fonctions qui lui sont conférés en vertu de la Loi sur la citoyenneté ou de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, et mener les enquêtes nécessaires à cette fin (art. 14 et 15);
  • prêter son assistance au ministre de la Défense nationale ou au ministre des Affaires étrangères, dans les limites du Canada, à la collecte d'informations ou de renseignements sur les moyens, les intentions ou les activités d'un État étranger ou d'une personne qui n'est ni un citoyen canadien, ni un résident permanent (art. 16);
  • conclure, avec l'approbation du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, des ententes ou coopérer avec les ministères du gouvernement fédéral ou du gouvernement d'une province, un service de police en place dans une province, un gouvernement d'un État étranger ou une organisation internationale d'États (art. 17).

Cela fait longtemps que le SCRS participe, au moins de manière fortuite, à des activités de perturbation sur le territoire canadien51 . Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSARS) a d'ailleurs déjà dit craindre que les activités de perturbation du SCRS :

  • fassent double emploi avec les opérations de perturbation des services de police;
  • soient illégales, en ce sens que même si l'article 12 de la Loi sur le SCRS n'interdit pas le recours à la perturbation, le mandat du SCRS de recueillir et d'analyser des renseignements et de transmettre ces derniers au gouvernement du Canada et de le conseiller à cet égard ne semble pas englober ces activités;
  • ne soient pas soumises à une surveillance ministérielle suffisante52 .

Il est également manifeste que le SCRS a pris part à des activités de perturbation à l'extérieur du Canada. Par exemple, dans une déclaration préparée pour le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes, en 2010, le directeur du SCRS de l'époque, Richard Fadden, a indiqué que les enquêtes internationales du Service menées dans le cadre de la mission du Canada en Afghanistan avaient permis « [de] déstabiliser et [de] démanteler des réseaux d'insurgés qui étaient sur le point de commettre des attaques à l'engin explosif improvisé (EEI) et au véhicule piégé contre des cibles militaires et civiles53 ».

Selon le document d'information du gouvernement du Canada sur le projet de loi C 51, le SCRS ne disposait pas du « mandat légal de prendre des mesures concernant les menaces54 ». Par conséquent, l'article 42 du projet de loi C 51 prévoit que le SCRS peut, s'il existe des motifs raisonnables de croire55 qu'une activité donnée constitue une « menace envers la sécurité du Canada », « prendre des mesures, même à l'extérieur du Canada, pour réduire la menace » [ITALIQUES DES AUTEURS], par exemple dissuader une personne de participer à une activité terroriste (nouveau par. 12.1(1) de la Loi sur le SCRS).

Le projet de loi ne définit pas le terme « mesures pour réduire la menace ». Ces mesures sont toutefois limitées. En effet, avant d'exécuter des activités ou opérations de perturbation, le SCRS doit envisager les solutions de rechange acceptables pour réduire la menace. Dans tous les cas, ces mesures doivent « être justes et adaptées aux circonstances56 » et elles ne peuvent entraver le cours de la justice, causer des lésions corporelles ou porter atteinte à l'intégrité sexuelle d'un individu (nouveaux par. 12.1(2) et 12.2(1) de la Loi sur le SCRS).

Pendant son étude du projet de loi, le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes a modifié l'article 12.1 pour préciser que le pouvoir du SCRS de prendre des mesures pour réduire une menace ne confère à celui-ci aucun pouvoir de contrôle d'application de la loi (nouveau par. 12.1(4) de la Loi sur le SCRS).

Dans ses rapports périodiques au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, le directeur du SCRS devra désormais faire état du nombre des activités ou opérations de perturbation exécutées à l'égard de chacun des types de menaces envers la sécurité du Canada (espionnage, sabotage, activités influencées par l'étranger, terrorisme et subversion intérieure) et en donner une description (art. 40 du projet de loi; nouvel al. 6(5) a) de la Loi sur le SCRS).

2.4.2 Mandat de réduction des menaces (art. 40 à 49 du projet de loi)

Si le SCRS souhaite utiliser des mesures intrusives, comme l'installation de dispositifs d'écoute ou l'interception des communications en ligne d'une cible dans le cadre d'une enquête, l'article 21 de la Loi sur le SCRS exige qu'il obtienne au préalable un mandat de la Cour fédérale.

Le projet de loi C-51 ajoute un mandat pour autoriser l'exécution de certaines activités ou opérations de perturbation. Dans le cas d'une mesure de perturbation d'une menace à la sécurité du Canada qui portera atteinte à un droit ou à une liberté garantis par la Charte ou qui contreviendra à d'autres règles du droit canadien, le SCRS a l'obligation d'obtenir un mandat de la Cour fédérale (nouveau par. 12.1(3) de la Loi sur le SCRS)57 .

Le tableau 5 établit une comparaison entre les nouvelles dispositions relatives au mandat pour des activités ou des opérations de perturbation et les précédentes dispositions sur le mandat prévues à l'art. 21 de la Loi sur le SCRS, qui autorisent le recours à des moyens d'enquête intrusifs comme l'écoute électronique.

Tableau 5 – Comparaison des dispositions de la Loi sur le SCRS, avant et après les modifications apportées par le projet de loi C-51, en ce qui concerne les mandats autorisant des mesures de réduction des menaces
  Avant les modifications apportées par le projet de loi C-51 (art. 21 et suivants de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité) Après les modifications apportées par le projet de loi C-51 (art. 21.1 et suivants de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité)
Motifs pour demander un mandat
  • Motifs raisonnables de croire que le mandat est nécessaire pour permettre au SCRS de faire enquête sur des menaces envers la sécurité du Canada ou d'exercer les fonctions qui lui sont conférées en vertu de l'article 16 (prêter assistance aux ministres de la Défense nationale et des Affaires étrangères, dans les limites du Canada) (par. 21(1))
  • Motifs raisonnables de croire que le mandat est nécessaire pour permettre au SCRS de prendre des mesures pour réduire une menace envers la sécurité du Canada (nouveau par 21.1(1))
  • Nécessité d'obtenir un mandat dans le cas d'une mesure qui porte atteinte à un droit ou à une liberté garantis par la Charte ou qui est contraire à d'autres règles du droit canadien (nouveau par. 12.1(3))
La demande de mandat doit être présentée par le directeur du SCRS à la Cour fédérale (après consultation du sous-ministre) Oui Oui
Le consentement préalable du ministre de la Sécurité publique est requis Oui Oui
Éléments que doit contenir la demande de mandat
  • Le fait que d'autres méthodes d'enquête ont été essayées en vain, ou la raison pour laquelle ces méthodes semblent avoir peu de chances de succès (al. 21(2)b))
  • Le fait que les mesures envisagées sont justes et adaptées aux circonstances, compte tenu de la nature de la menace et des mesures, ainsi que des solutions de rechange acceptables pour réduire la menace (nouvel al. 21.1(2)c))
Audition des demandes de mandat À huis clos À huis clos
Autorisations pouvant être incluses dans le mandat
  • Le fait d'intercepter des communications ou d'acquérir des informations
  • L'accès à un lieu ou un objet ou l'ouverture d'un objet
  • La recherche, l'enlèvement ou la remise en place de tout document ou objet, leur examen, le prélèvement des informations qui s'y trouvent, ainsi que leur enregistrement et l'établissement de copies ou d'extraits par tout procédé
  • L'installation, l'entretien et l'enlèvement d'objets (par. 21(3))
  • Le fait de prendre des mesures de perturbation
  • L'accès à un lieu ou à un objet ou l'ouverture d'un objet
  • La recherche, l'enlèvement ou la remise en place de tout document ou objet, leur examen, le prélèvement des informations qui s'y trouvent, ainsi que leur enregistrement et l'établissement de copies ou d'extraits par tout procédé
  • L'installation, l'entretien et l'enlèvement d'objets
  • Les autres actes nécessaires dans les circonstances à la prise des mesures (nouveau par. 21.1(3))
Le mandat est exécutoire à l'extérieur du Canada Oui a Oui (« sans égard à toute autre règle de droit, notamment le droit de tout État étranger ») (nouveau par. 21.1(4))
Durée maximale du mandat
  • 60 jours dans les cas de subversion intérieure
  • Un an dans le cas des autres types de menace (comme l'espionnage et le terrorisme) (par. 21(5))
  • 60 jours dans les cas de subversion intérieure
  • 120 jours dans le cas des autres types de menace (comme l'espionnage et le terrorisme) (nouveau par. 21.1(6))
Renouvellement Pas de limite quant au nombre de renouvellements (art. 22) Maximum de deux renouvellements (nouveau par. 22.1(2))
Ordonnance d'assistance Non Oui
Application de la partie VI du Code criminel (Atteintes à la vie privée) b Non Non
Contenu des rapports périodiques du directeur du SCRS au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile
  • Activités opérationnelles du SCRS (par. 6(4)) c
  • Nombre de mandats décernés relativement à des mesures visant à contrer des menaces et nombre de demandes rejetées
  • Pour chacun des types de menaces, une description générale des mesures prises en vertu des mandats (nouveau par. 6(5))

Notes  : a. Le projet de loi C-44, Loi modifiant la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité et d'autres lois, a confirmé que la Cour fédérale peut décerner des mandats extraterritoriaux
b. La partie VI du Code encadre l'écoute électronique effectuée par les policiers. Cette partie comporte deux dispositions sur la reddition de comptes : la publication d'un rapport annuel du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile contenant des chiffres sur l'écoute électronique (art. 195) et l'envoi d'un avis écrit à la personne qui a fait l'objet d'une interception de communications (art. 196).
c. Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité présente occasionnellement des rapports sur le nombre de mandats délivrés.

2.4.3 Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (art. 50 et 51 du projet de loi)

Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité est chargé d'effectuer une surveillance indépendante des opérations passées du SCRS. Il devra désormais également examiner au moins un aspect des mesures prises par le SCRS pour réduire les menaces envers la sécurité du Canada (art. 50 du projet de loi).

À l'heure actuelle, le CSARS doit présenter au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile un rapport annuel sur ses activités de surveillance. Ce rapport est déposé devant chaque Chambre du Parlement. L'article 51 du projet de loi ajoute que ce rapport devra faire état du nombre de mandats décernés relativement à des mesures visant à contrer une menace envers la sécurité du Canada et du nombre de demandes de mandat rejetées.

2.5 Modification de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (partie 5 du projet de loi C-51, art. 52 à 62)

La partie 5 du projet de loi C-51 modifie les procédures, prévues aux sections 8 et 9 de la partie 1 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (LIPR), qui gouvernent l'interdiction de divulgation de renseignements relatifs à la sécurité nationale et de nature sensible et confidentielle dans les cas d'appels, de contrôles judiciaires et de certificats de sécurité.

Un certificat de sécurité58 est un moyen permettant de renvoyer du Canada un non citoyen interdit de territoire pour raison de sécurité ou pour atteinte aux droits de la personne ou internationaux, grande criminalité ou criminalité organisée qui, selon la détermination du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, présente un risque élevé pour la sécurité nationale. On peut recourir à ce moyen lorsque l'évaluation du risque est fondée sur des éléments de preuve obtenus sous le sceau du secret qui, selon le gouvernement, ne peuvent être divulgués à la personne visée par le renvoi. La personne nommée dans un certificat de sécurité est souvent détenue en attendant qu'on statue sur le caractère raisonnable du certificat. Dans le cas d'un résident permanent, un juge est tenu d'entreprendre, dans les 48 heures suivant le début de la détention, le contrôle des motifs justifiant le maintien en détention, contrôle qui est ensuite répété au moins une fois tous les six mois tant qu'il n'a pas été statué sur le certificat.

Pour déterminer si le certificat est raisonnable, le juge examine la preuve. Cet examen, qui est de nature administrative, ne s'assortit pas de l'éventail des droits et des garanties d'ordre procédural qu'on retrouve en droit pénal. Le juge nomme un avocat spécial dont le rôle est d'agir au nom de la personne visée par le certificat de sécurité. Depuis 2008, dans chaque cas de certificat de sécurité, un avocat spécial prend connaissance de la preuve qui pèse contre la personne incriminée et peut ensuite contester les affirmations du Ministre voulant que ces éléments de preuve confidentiels ne peuvent pas être communiqués à l'intéressé ou bien la pertinence, la fiabilité et la suffisance des éléments de preuve confidentiels, ou encore l'importance qu'on entend leur accorder. Ces renseignements sont ensuite communiqués à l'intéressé sous forme de résumé pour lui permettre d'être raisonnablement informé de la preuve retenue contre lui. Une fois que l'avocat spécial a obtenu les éléments de preuve confidentiels, il ne peut communiquer avec qui que ce soit au sujet de l'instance, y compris avec la personne nommée au certificat de sécurité, sans avoir d'abord obtenu du juge une autorisation en ce sens.

2.5.1 Section 9 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés : certificats et protection de renseignements

L'article 54 du projet de loi C-51 modifie l'étendue des renseignements qui doivent être communiqués au juge. On n'aura plus à divulguer l'intégralité du dossier, mais uniquement les éléments de preuve qui se rapportent aux motifs de l'interdiction de territoire précisés dans le certificat (nouveau par. 77(2) de la LIPR).

La modification qu'apporte l'article 55 du projet de loi à la LIPR facilite le proces-sus d'appel pour les ministres dans les affaires nécessitant la divulgation de rensei-gnements dans le cadre de procédures liées à un certificat de sécurité. Ainsi, lors d'une instance visant un certificat de sécurité, les ministres peuvent désormais interjeter appel de toute décision rendue en cours d'instance et exigeant la divulgation de renseignements sans que le juge soit tenu de certifier que l'affaire soulève une question grave de portée générale (nouvel art. 79.1 de la LIPR). L'appel des ministres a pour effet de suspendre la décision du juge de la Cour fédérale quant à savoir si le certificat est raisonnable, ainsi que l'exécution de la décision en question. En outre, une nouvelle disposition (art. 56 du projet de loi, nouvel art. 82.31 de la LIPR) permet plus facilement au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile d'interjeter appel de décisions exigeant la divulgation de renseignements au cours d'une instance liée au contrôle de la détention de la personne faisant l'objet d'un certificat de sécurité.

Les dispositions relatives à la protection des renseignements sont modifiées pour permettre au juge de la Cour fédérale d'exempter les ministres de l'obligation de fournir à l'avocat spécial des renseignements qui ne permettent pas à l'intéressé d'être raisonnablement informé de la thèse des ministres, lorsque le certificat ne repose pas sur ces renseignements et que ces renseignements ne sont pas déposés auprès de la Cour fédérale (art. 57(1), nouvel al. 83(1)c.1)). Si les considérations d'équité et de justice naturelle le requièrent, le juge peut demander à l'avocat spécial de présenter ses observations au sujet de l'exemption visant les renseignements en cause (par. 57(1) du projet de loi, nouvel al. 83(1)c.2)). Un juge ne peut pas décider du caractère raisonnable du certificat de sécurité sur la base de renseignements ayant fait l'objet d'une exemption (par. 57(2) du projet de loi, nouvel al. 83(1)k)). L'article 84 de la LIPR, qui porte sur la protection des renseignements lors d'une instance d'appel, est modifié de façon à s'appliquer à la nouvelle instance d'appel créée par le projet de loi C-51 (art. 58 du projet de loi).

L'article de la LIPR visant l'obligation des ministres de fournir des renseignements à l'avocat spécial est modifié pour tenir compte du nouveau mécanisme selon lequel l'avocat spécial ne peut plus avoir accès à l'intégralité du dossier. Il y a désormais deux types de renseignements : les renseignements déposés à la Cour fédérale qui sont pertinents (qu'il s'agisse ou non de renseignements sur lesquels repose le certificat) – qui doivent être fournis à l'avocat spécial – et les renseignements qui peuvent être exemptés de cette obligation par un juge de la Cour fédérale à la demande des ministres (art. 59 du projet de loi, nouvel art. 85.4; art. 57 du projet de loi, nouvel al. 83(1)c.1)).

Le projet de loi C-51 modifie la LIPR de façon que les ministres puissent, sans avoir à en demander l'autorisation, demander le contrôle judiciaire d'une décision rendue au cours d'une instance, notamment une enquête, un contrôle de détention ou un appel devant la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, et nécessitant la divulgation de renseignements ou d'autres éléments de preuve si, selon eux, la divulgation porterait atteinte à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui (nouvel art. 86.1 de la LIPR). De la même façon, les ministres peuvent faire appel de toute décision rendue au cours d'un contrôle judiciaire et nécessitant la divulgation de tels renseignements ou éléments de preuve à la Cour d'appel fédérale sans que le juge soit tenu de certifier que l'affaire soulève une question grave de portée générale (art. 60 du projet de loi, nouvel article 87.01 de la LIPR).

Les dispositions existantes qui permettent aux ministres de demander l'interdiction de la divulgation de renseignements et autres éléments de preuve au cours d'un contrôle judiciaire sont applicables à tout appel de l'instance de contrôle judiciaire (art. 87 modifié de la LIPR).

2.5.2 Section 8 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés : contrôle judiciaire

La LIPR prévoit des règles précises relativement au contrôle judiciaire par la Cour fédérale de toute mesure – décision, ordonnance, question ou affaire – prise dans le cadre de la loi. Le projet de loi C-51 modifie certaines dispositions ayant trait à l'interdiction de divulgation des renseignements décrits à l'article 76 de la LIPR, à savoir les « renseignements en matière de sécurité ou de criminalité et ceux obtenus, sous le sceau du secret, de source canadienne ou du gouvernement d'un État étranger, d'une organisation internationale mise sur pied par des États ou de l'un de leurs organismes ».

Le projet de loi modifie l'article 72 de la LIPR pour permettre au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile de renvoyer une demande d'interdiction de divulgation de rensei-gnements à la Cour fédérale aux fins d'un contrôle judiciaire sans qu'elle soit subordonnée au dépôt d'une demande d'autorisation exigeant que le demandeur démontre l'existence d'une situation grave (art. 52 du projet de loi).

Dans les cas ayant trait à l'interdiction de divulgation, la procédure pour les ministres est simplifiée davantage grâce à une modification de l'article 74 de la LIPR qui leur permet, en tout temps au cours d'une instance, d'interjeter appel auprès de la Cour d'appel fédérale d'une décision rendue par la Cour fédérale, sans qu'il soit nécessaire que le juge de la Cour fédérale certifie que l'affaire soulève une question grave de portée générale (art. 53 du projet de loi).


Notes

*  Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur.Retour au texte ]

  1. Observations au quatorzième rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense (projet de loi C-51), 27 mai 2015. [ Retour au texte ]
  2. Commission d'enquête sur certaines activités de la Gendarmerie royale du Canada (Commission McDonald), La liberté et la sécurité devant la loi, deuxième rapport, Ottawa, 1981. [ Retour au texte ]
  3. Commission d'enquête sur les actions des responsables canadiens relativement à Maher Arar (Enquête sur l'affaire Arar), Rapport sur les événements concernant Maher Arar : analyse et recommandations pdf (1,3 Mo, 412 pages), Ottawa, 2006. [ Retour au texte ]
  4. Commission d'enquête relative aux mesures d'investigation prises à la suite de l'attentat à la bombe commis contre le vol 182 d'Air India (Enquête sur l'affaire Air India),Le vol 182 d'Air India, Une tragédie canadienne, Volume un – Aperçu, Ottawa, 2010. [ Retour au texte ]
  5. Ibid., p. 162. [ Retour au texte ]
  6. Ibid., p. 159. [ Retour au texte ]
  7. Stanley A. Cohen, Privacy, Crime and Terror – Legal Rights and Security in a Time of Peril, Lexis Nexis Butterworths, 2005 [traduction]. [ Retour au texte ]
  8. Commission McDonald (1981), p. 666. [ Retour au texte ]
  9. Enquête sur l'affaire Air India (2010), p. 159. [ Retour au texte ]
  10. Comité sénatorial spécial sur la Loi antiterroriste (Comité sénatorial spécial), Justice fondamentale dans des temps exceptionnels : Rapport principal du Comité sénatorial spécial sur la Loi antiterroriste, février 2007. [ Retour au texte ]
  11. Enquête sur l'affaire Arar (2006). [ Retour au texte ]
  12. Commission d'enquête sur les actions des responsables canadiens relativement à Maher Arar, Un nouveau mécanisme d'examen des activités de la GRC en matière de sécurité nationale pdf (9,4 Mo, 704 pages), Ottawa, 2006. [ Retour au texte ]
  13. Comité permanent de la sécurité publique et nationale, Examen des constats et recommandations émanant des enquêtes Iacobucci et O'Connor pdf (237 ko, 56 pages), 2e session, 40e législature, juin 2009, recommandation no 5. Voir également les recommandations no 58, 59 et 60 du rapport final du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes, Droits, restrictions et sécurité : un examen complet de la Loi antiterroriste et des questions connexes, 1re session, 39e législature, mars 2007, et la recommandation no 16 du rapport intérimaire du Comité sénatorial spécial sur l'antiterrorisme, Liberté, sécurité et la menace complexe du terrorisme : des défis pour l'avenir pdf (978 ko, 56 pages), 3e session, 40e législature, mars 2011. [ Retour au texte ]
  14. Recommandation no 57 du rapport final du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes, Droits, restrictions et sécurité : un examen complet de la Loi antiterroriste et des questions connexes, 1re session, 39e législature, mars 2007. Voir également Comité sénatorial spécial (2007), recommandation no 40. [ Retour au texte ]
  15. Enquête sur l'affaire Arar (2006), p. 24. [ Retour au texte ]
  16. L'annexe 3 cible précisément les organismes suivants : Agence des services frontaliers du Canada; Agence du revenu du Canada; Forces armées canadiennes; Agence canadienne d'inspection des aliments; Commission canadienne de sûreté nucléaire; Service canadien du renseignement de sécurité; Centre de la sécurité des télécommu­nications; ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration; ministère des Finances; ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement; ministère de la Santé; ministère de la Défense nationale; ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile; ministère des Transports; Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada; Agence de la santé publique du Canada; Gendarmerie royale du Canada. [ Retour au texte ]
  17. Le terme « perturbation » n'est pas défini dans la loi. [ Retour au texte ]
  18. Règlement sur le contrôle de l'identité, DORS/2007-82. [ Retour au texte ]
  19. Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSARS), Rapport annuel 2011-2012 : Relever le défi, « Section 2 : Résumés des études du CSARS et des plaintes », 2012. [ Retour au texte ]
  20. Au sens de l'art. 2 et du par. 83.01(1) du Code criminel. [ Retour au texte ]
  21. Le terme « zone stérile » est défini à l'art. 3 de la Loi sur la sûreté des déplacements aériens. [ Retour au texte ]
  22. Ces renseignements comprennent 34 éléments, dont le nom de la personne, sa date de naissance, sa citoyenneté, son sexe, les noms de l'agence de voyages et de l'agent de voyage ayant effectué les arrangements de voyage de la personne, une indication que le billet de la personne pour le vol est un billet aller simple, la ville ou le pays où le voyage débute, les villes inscrites à l'itinéraire, la destination de la personne, la place attribuée à la personne avant le départ, les numéros d'étiquette des bagages de la personne, l'adresse de la personne, l'adresse de l'agence de voyages ayant effectué les arrangements de voyage et le mode de paiement du billet de la personne. [ Retour au texte ]
  23. Loi sur l'aéronautique, « Annexe ». [ Retour au texte ]
  24. Au sens de l'al. 8(1)b). [ Retour au texte ]
  25. Le Ministre peut prolonger ce délai en des circonstances exceptionnelles (par. 15(2)). [ Retour au texte ]
  26. Cette période peut être prolongée d'un délai supplémentaire accordé par un juge (par. 16(3)). Il convient de noter qu'une disposition transitoire énoncée à l'art. 33 de la Loi sur la sûreté des déplacements aériens prévoit que l'art. 16 s'applique à toute décision concernant une personne inscrite et prise avant l'entrée en vigueur de cette loi par le Ministre (aux termes de l'al. 4.81(1)b) de la Loi sur l'aéronautique) après le transfert par décret des attributions du ministre des Transports au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile. [ Retour au texte ]
  27. Dans la décision Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Harkat [2014] 2 RCS 33, aux par. 74 à 76, la Cour suprême du Canada a statué, au sujet d'une disposition similaire, que cette dernière ne portait pas atteinte au droit fondamental à une audition équitable garanti par l'art. 7 de la Charte canadienne des droits et libertés. [ Retour au texte ]
  28. Charkaoui c. Canada (Citoyenneté et Immigration), [2007] 1 RCS 350. [ Retour au texte ]
  29. Ibid., par. 22. [ Retour au texte ]
  30. Les art. 10 à 16 de la Loi sur la sûreté des déplacements aériens concernent la collecte et la communication de renseignements, les recours administratifs et les dispositions relatives à l'appel. [ Retour au texte ]
  31. Nombre d'infractions peuvent faire l'objet d'une poursuite soit par procédure sommaire ou par mise en accusation, au gré de la Couronne. Ces infractions sont dites « mixtes », « hybrides » ou « sujettes à option de procédure » et sont considérées comme faisant l'objet d'une mise en accusation jusqu'à ce que la Couronne fasse connaître sa décision. Aux termes du Code criminel, les infractions donnant lieu à une procédure sommaire sont généralement considérées comme moins graves que les infractions donnant lieu à une mise en accusation. Elles se distinguent essentiellement de celles-ci en ce qu'elles font l'objet d'une procédure plus simple et de peines moins lourdes. [ Retour au texte ]
  32. Loi antiterroriste, L.C. 2001, ch. 41. [ Retour au texte ]
  33. Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, Témoignages, 2e session, 41e législature, 27 octobre 2014 (Bob Paulson, commissaire, Gendarmerie royale du Canada). [ Retour au texte ]
  34. Voir l'art. 80.2C du Criminal Code Act 1995 de l'Australie, l'art. 421-2-5 du
    Code pénal français et l'art. 1 du Terrorism Act 2006du Royaume-Uni. Voir aussi l'art. 5 (« Provocation publique à commettre une infraction terroriste ») de la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme. Pour plus d'informations, voir Craig Forcese et Kent Roach, Terrorist Babble and the Limits of the Law: Assessing a Prospective Canadian Terrorism Glorification Offence pdf (1 Mo, 51 pages), document de travail no 15-02 du Canadian Network for Research on Terrorism, Security, and Society (TSAS), 2015. [ Retour au texte ]
  35. C'est-à-dire l'élément mental nécessaire à la commission de l'infraction. L'élément matériel se nomme l'actus reus. [ Retour au texte ]
  36. Le projet de loi renvoie aux définitions des termes « communiquer » et « déclarations » figurant au par. 319(7) du Code, qui traite des infractions de propagande haineuse. Le par. 319(7) définit ces termes très largement en faisant référence essentiellement à tous moyens de communication et toutes formes de déclaration, ce qui englobe, par exemple, toutes déclarations sous forme électronique communiquées en utilisant un ordinateur ou un téléphone intelligent. Les tribunaux qui auront à interpréter le nouvel art. 83.221 se reporteront possiblement à la jurisprudence en matière de propagande haineuse (voir, par exemple, R. c. Keegstra, [1990] 3 R.C.S. 697). Il est important de noter que le nouvel art. 83.221 ne prévoit pas de défenses à l'infraction consistant à préconiser ou fomenter la perpétration d'infractions de terrorisme comme le fait le par. 319(3) du Code à l'égard de l'infraction consistant à fomenter volontairement la haine. [ Retour au texte ]
  37. Il n'est donc pas nécessaire de préconiser ou de fomenter la perpétration d'une infraction de terrorisme particulière. La définition du terme « infraction de terrorisme » figure à l'art. 2 du Code et celle du terme « activité terroriste », au par. 83.01(1), tandis que les infractions relatives au terrorisme se trouvent aux art. 83.02 à 83.04, 83.12 et 83.18 à 83.231 du Code. [ Retour au texte ]
  38. Sénat, Comité permanent de la sécurité nationale et de la défense, Témoignages, 2e session, 41e législature, 30 mars 2015. [ Retour au texte ]
  39. Le nouveau par. 83.222(8) du Code définit « propagande terroriste » de façon très large : « Tout écrit, signe, représentation visible ou enregistrement sonore qui préconise ou fomente la perpétration d'infractions de terrorisme en général – exception faite de l'infraction visée au par. 83.221(1) [apologie du terrorisme] – ou qui conseille la perpétration d'une infraction de terrorisme ». [ Retour au texte ]
  40. Voir l'art. 136 du Tarif des douanes, L.C. 1997, ch. 36. [ Retour au texte ]
  41. Voir l'al. 130(3)a) et le par. 133(4.1) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20. [ Retour au texte ]
  42. L'engagement sera ordonné par un juge de la cour provinciale. L'art. 32 du projet de loi précise que le tribunal pour adolescents a compétence pour ordonner un tel engagement à l'égard d'un adolescent. [ Retour au texte ]
  43. Le délai pour la comparution devant un juge pour toute autre infraction est généralement de 24 heures (art. 503 du Code). [ Retour au texte ]
  44. Charte canadienne des droits et libertés, al. 10b).

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  45. Par exemple, il est possible que le défendeur comparaisse par vidéoconférence (art. 26 du projet de loi). [ Retour au texte ]
  46. Voir les dispositions relatives aux moyens destinés à faciliter le témoignage figurant dans la Loi sur la Charte des droits des victimes, en particulier en ce qui a trait au nouvel art. 486.31 du Code criminel. [ Retour au texte ]
  47. Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, voir les art. 76 et suivants. [ Retour au texte ]
  48. Jusqu'à tout récemment, la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité contenait également le fondement législatif du Bureau de l'inspecteur général. Nommé par le gouverneur en conseil, l'inspecteur général était chargé d'examiner les activités opérationnelles du SCRS pour le ministre de la Sécurité publique afin de l'appuyer dans son rôle de responsable du SCRS. Le poste d'inspecteur général a été aboli en juin 2012 par la Loi sur l'emploi, la croissance et la prospérité durable. [ Retour au texte ]
  49. Loi protégeant Canada contre les terroristes, L.C. 2015, ch. 9. [ Retour au texte ]
  50. Une modification apportée par le projet de loi C-44, Loi modifiant la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité et d'autres lois, permet au SCRS de mener ses enquêtes sur les menaces envers la sécurité du Canada autant à l'intérieur qu'à l'extérieur du Canada. [ Retour au texte ]
  51. Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, Rapport annuel 2009-2010 – Un temps de réflexion : prendre la mesure du renseignement de sécurité pdf (3 Mo, 36 pages), Ottawa, 30 septembre 2010, p. 16. [ Retour au texte ]
  52. Ibid., p. 16. [ Retour au texte ]
  53. Il convient de noter que ce texte a en fait été cité par Phil McColeman, car M. Fadden n'a pas lu cette partie de sa présentation lorsqu'il a comparu devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes. Voir Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes, Témoignages(M. McColeman, lisant une partie de la présentation de M. Fadden), 3e session, 40e législature, 11 mai 2010. [ Retour au texte ]
  54. Gouvernement du Canada, « Modification de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité visant à accorder au SCRS le mandat d'intervenir afin de perturber les complots terroristes pendant qu'ils sont au stade de la planification », Document d'information, 30 janvier 2015. [ Retour au texte ]
  55. Cette condition est plus exigeante que celle qui est actuellement nécessaire pour autoriser le SCRS à recueillir des renseignements de sécurité en vertu de l'art. 12 de la Loi sur le SCRS, soit l'existence de « motifs raisonnables de soupçonner ». Dans l'affaire R. c. Chehil, la Cour suprême du Canada a abordé la question des motifs raisonnables : « […] bien que les motifs raisonnables de soupçonner, d'une part, et les motifs raisonnables et probables de croire, d'autre part, soient semblables en ce sens qu'ils doivent, dans les deux cas, être fondés sur des faits objectifs, les premiers constituent une norme moins rigoureuse, puisqu'ils évoquent la possibilité – plutôt que la probabilité – raisonnable d'un crime » ([2013] 3 R.C.S. 220, par. 27). [ Retour au texte ]
  56. Voir aussi le nouvel art. 22.2 de la Loi sur le SCRS. [ Retour au texte ]
  57. Témoignant devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale, Michael Duffy, avocat général principal, Droit de la sécurité nationale au ministère de la Justice, a déclaré :
    Tout est lié à l'article 1 de la Charte, qui prévoit que les droits prévus dans la Charte sont garantis seulement dans la mesure où ils ne sont pas restreints par des limites raisonnables prévues par la loi dans une société libre et démocratique.
    Le juge peut déterminer qu'un droit particulier prévu par la Charte, qu'il s'agisse de la mobilité ou d'un autre droit, est violé, et c'est dans un sens l'étape préliminaire. Le juge doit [ensuite] déterminer si cette violation est [justifiable] en raison d'une limite [raisonnable] prévue par la loi dans une société libre et démocratique. C'est [là] l'enquête judiciaire qui doit être menée dans le cadre du processus lié aux mandats […] Un droit peut sembler avoir été violé ou être violé, et le juge doit déterminer si cette violation est raisonnable ou s'il s'agit d'une limite raisonnable (Chambre des communes, Comité permanent de la sécurité publique et nationale, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015). John Davies, directeur général de la Politique de sécurité nationale, Secteur de la sécurité et de la cybersécurité nationale (Sécurité publique Canada), a ajouté qu'« essentiellement, [il en était] déjà ainsi » (Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 mai 2015). [ Retour au texte ]
  58. Pour des renseignements sur les dispositions relatives aux certificats de sécurité, voir Sécurité publique Canada, Certificats de sécurité. Les dispositions relatives au certificat de sécurité font partie de la législation en matière d'immigration depuis 1978. Au total, 27 certificats de sécurité ont été délivrés depuis 1991, dont 19 ont donné lieu à un renvoi du Canada. Les deux plus récents renvois remontent à décembre 2006, quand un homme connu sous le nom d'emprunt Paul William Hampel a été renvoyé en Russie pour s'être livré à de l'espionnage, et à mars 2005, quand Ernst Zündel a été déporté en Allemagne pour des motifs de violence politique (extrémisme de droite). [ Retour au texte ]

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