Résumé législatif du Projet de loi C-6

Résumé Législatif
PROJET DE LOI C-6 : LOI SUR LE RÈGLEMENT DES REVENDIATIONS PARTICULIÈRES
Mary C. Hurley, Division du droit et du gouvernement
Publication no 37-2-LS-431-F
PDF 533, (36 Pages) PDF
2002-10-10
Révisée le : 2003-11-05

TABLE DES MATIÈRES

CONTEXTE

A. Avant 1973

1. Les rapports parlementaires

2. Les lois fédérales

3. Le livre blanc

B. De 1973 à 1990

1. L’arrêt Calder

2. Le Bureau des revendications des autochtones

3. La nouvelle politique sur les revendications particulières

C. Depuis 1991

1. Une nouvelle réforme

2. La Commission des revendications particulières des Indiens

3. La Commission royale sur les peuples autochtones

4. Les groupes de travail mixtes APN-gouvernement

5. La réponse du gouvernement

D. Données sur les revendications particulières

DESCRIPTION ET ANALYSE

A. Dispositions introductives (art. 2 et 3)

B. Partie 1 : Centre canadien du règlement indépendant des revendications particulières
      des premières nations (art. 4 à 19; connexes : par. 20(3), 22(1), 43(1))

C. Partie 2 : La Commission (art. 20 à 40; connexe : art. 76.1)

1. Composition et attributions (art. 20 à 25)

2. Processus relatif aux revendications particulières (art. 26 à 40)

a. Dépôt des revendications (art. 26 et 27; connexes : par. 36(1), art. 36(1), 74)

b. Réunions préparatoires (art. 28 à 30)

c. Bien-fondé des revendications (par. 31 et 32; connexes : art. 37, 56)

d. Indemnisation (art. 33 à 35)

e. Dispositions générales (art. 36 à 40; connexes : art. 75 et 76.2)

D. Partie 3 : Le Tribunal (art. 41 à 73)

1. Composition et attributions (art. 41 à 46; connexe : par. 56(2))

2. Formations, audiences et décisions (art. 47 à 73)

a. Demandes interlocutoires et autres (art. 47 à 51)

b. Décisions sur le bien-fondé et l’indemnisation (art. 54 à 56)

i. Le bien-fondé (art. 54; connexe : art. 64)

ii. Indemnisation (art. 56; connexes : al. 46c) et 51a), art. 65, 73, 77)

iii. Disposition ou location illégale des terres d’une réserve (art. 57)

c. Diverses questions de procédure (art. 59 à 70)

d. Effet des décisions des formations (art. 71 et 72)

E. Partie 4 : Dispositions générales
(art. 74 à 77; connexes : par. 56(1), al. 32(1)c) et 35(1)d); annexe)

F. Partie 5 : Modifications corrélatives, disposition de coordination
et entrée en vigueur (art. 78 à 85)

COMMENTAIRE


PROJET DE LOI C-6 : LOI SUR LE RÈGLEMENT DES
REVENDICATIONS PARTICULIÈRES*

Le projet de loi C-6 : Loi constituant le Centre canadien du règlement indépendant des revendications particulières des premières nations en vue de permettre le dépôt, la négociation et le règlement des revendications particulières, et modifiant certaines lois en conséquence, a été présenté à la Chambre des communes, adopté en deuxième lecture et réputé avoir été renvoyé au Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles (le Comité de la Chambre) le 9 octobre 2002(1). Le projet de loi modifiela procédure en vigueur pour régler les revendications particulières en constituant un nouvel organe administratif composé d’une commission chargée de faciliter la négociation des revendications et de régler les différends, et d’un tribunal ayant le pouvoir de rendre des décisions exécutoires sur le bien-fondé des revendications et des indemnités accordées, jusqu’à concurrence du montant maximum prévu par revendication. Cette mesure est à l’étude depuis longtemps par les Autochtones, le gouvernement, d’autres parties intéressées et des observateurs.

Le Comité de la Chambre a entendu des témoins au cours d’audiences qui se sont déroulées du 26 au 28 novembre 2002, puis a fait rapport du projet de loi C-6 à la Chambre des communes le 6 décembre avec plusieurs amendements techniques du gouvernement et un amendement de l’opposition relatif au processus. Les débats à l’étape du rapport ont eu lieu les 7 et 8 février 2003, et le projet de loi amendé a été adopté par la Chambre le 18 mars 2003.

Le projet de loi a été adopté en première lecture au Sénat le 19 mars, puis renvoyé au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones (le Comité sénatorial) le 2 avril, après les débats en deuxième lecture. Le 12 juin, à la fin de ses audiences, qui se sont déroulées du 30 avril au 11 juin 2003, le Comité sénatorial a fait rapport du projet de loi au Sénat avec plusieurs amendements de fond approuvés par le gouvernement, ainsi que des observations supplémentaires. Les débats à l’étape du rapport ont commencé le 19 juin 2003, date à laquelle le Sénat a ajourné ses travaux pour l’été, et ont repris le 16 septembre.

Fait exceptionnel, le 25 septembre, le projet de loi a été renvoyé « de nouveau au Comité sénatorial afin que celui-ci étudie les répercussions, sur le projet de loi C-6, de la récente décision de la Cour suprême reconnaissant au peuple métis le statut de nation autochtone distincte ». D’autres audiences sur ce sujet ont eu lieu du 30 septembre au 2 octobre 2003. Le Comité sénatorial a fait rapport du projet de loi au Sénat sans autre amendement le 7 octobre et le projet de loi a été adopté, tel qu’amendé, le 21 octobre.

Sur le plan de la procédure, l’adoption par le Sénat de tous les amendements proposés par le Comité sénatorial a fait en sorte que le projet de loi a dû être renvoyé à la Chambre pour que celle-ci les examine. Par conséquent, le 21 octobre, un message du Sénat a été livré à la Chambre pour l’informer de ses amendements au projet de loi C‑6. Le 4 novembre 2003, la Chambre des communes a accepté les amendements du Sénat par un vote de 121 contre 104.

CONTEXTE

Depuis le début des années 1970, le Canada s’est doté de politiques établissant deux grandes catégories de « revendications » autochtones et les mesures à prendre pour les régler : d’une part, les revendications globales, qui concernent des titres ancestraux non éteints relatifs à des terres et à des ressources, et, d’autre part, les revendications particulières, quifont état de griefs selon lesquels le Canada aurait omis d’exécuter certaines obligations envers des Premières nations (appelées « bandes » dans la Loi sur les Indiens) sous certaines rubriques. Nous allons esquisser ci-après le contexte du projet de loi C‑6, qui propose de réformer le régime des revendications particulières(2).

A. Avant 1973

1. Les rapports parlementaires

Pendant une bonne partie du XXe siècle, le gouvernement ne s’est presque pas occupé des allégations d’obligations non exécutées du Canada envers les Premières nations. De 1927 à 1951, la Loi sur les Indiens interdisait aux bandes d’utiliser leur argent pour financer la présentation de revendications contre le gouvernement. En 1947, un comité spécial du Sénat et de la Chambre des communes, constitué pour étudier la Loi sur les Indiens et d’autres questions concernant les Autochtones, a recommandé notamment la création immédiate d’une « commission de revendications » « pour faire enquête […] sur les clauses de tous les traités conclus avec les Indiens […] et pour évaluer et régler de façon juste et équitable toutes revendications ou tous griefs qui en découlent »(3). Le comité mixte des affaires indiennes de 1959 à 1961 a aussi préconisé la création d’une commission des revendications autochtones pour entendre les questions territoriales de la Colombie-Britannique et d’Oka, de même que d’autres affaires(4).

2. Les lois fédérales

En 1963 et 1965, le gouvernement libéral, reprenant un projet de mesure législative du gouvernement conservateur qui l’avait précédé, présentait un projet de loi prévoyant le règlement des revendications des Indiens (projets de loi C‑130 et C‑123). Ce projet de loi aurait, entre autres, établi une commission, composée de cinq membres, qui aurait rendu des décisions exécutoires concernant cinq grandes catégories de revendications(5) et qui aurait eu le pouvoir d’accorder une indemnité pécuniaire – sans plafond prévu par la loi – et de financer la recherche faite par les revendicateurs pour préparer leur dossier. Le projet de loi C‑123 est mort au Feuilleton à l’automne 1965 et n’a jamais été représenté.

3. Le livre blanc

En 1969, le gouvernement libéral a fait paraître son livre blanc sur la politique indienne, assez controversé, qu’il a ensuite retiré(6). Ce livre blanc proposait l’abrogation de la Loi sur les Indiens et la fin du statut juridique distinct d’Indien, tout en reconnaissant l’existence de certaines obligations restreintes du gouvernement envers les Autochtones. Un commissaire aux revendications indiennes a alors été nommé pour étudier les revendications et faire des recommandations sur le règlement de griefs particuliers. Ce poste a existé de 1969 à 1977. Les Premières nations ont contesté son mandat trop restreint et, à leur avis, peu utile.

B. De 1973 à 1990

1. L’arrêt Calder

Dans l’arrêt Calder c. P. G. Colombie-Britannique(7) qu’elle a rendu en 1973, la Cour suprême du Canada a confirmé que l’occupation de longue date du territoire par les Autochtones a fait naître des droits sur le territoire qui ont survécu à l’établissement des Européens. Cet arrêt a amené le gouvernement fédéral non seulement à instituer pour la première fois une procédure pour négocier le règlement de revendications territoriales globales, mais aussi à créer de nouvelles procédures pour régler les revendications particulières(8).

2. Le Bureau des revendications des autochtones

En 1974, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (MAINC) créait le Bureau des revendications des autochtones (BRA) au sein du Ministère et lui confiait un double rôle : étudier les revendications autochtones découlant du fait que le gouvernement avait omis d’exécuter ses obligations en droit et représenter le gouvernement dans les négociations avec les Premières nations. En 1979, une étude réalisée pour le BRA décrit une situation familière où un organisme gouvernemental exerce des fonctions incompatibles relativement aux revendications autochtones et conclut que l’impartialité, l’apparence d’impartialité et même l’irrévocabilité plaident pour la constitution d’un organisme indépendant, extérieur à la structure ministérielle, pour le règlement des revendications particulières(9).

3. La nouvelle politique sur les revendications particulières

En 1982, reconnaissant que sa politique en matière de revendications particulières laissait à désirer(10), le gouvernement fédéral a publié Dossier en souffrance – Une politique des revendications des autochtones – Revendications particulières(11). Selon cette politique, les requérants étaient tenus de prouver l’existence de l’une de quatre « obligations légales » en souffrance(12) ou de l’un de deux problèmes se rapportant aux réserves(13). La procédure d’évaluation des revendications comprenait un examen par le BRA, un avis juridique du ministère fédéral de la Justice, l’approbation ou le rejet de la revendication par le Ministre, puis la négociation du règlement définitif des revendications acceptées. Enfin, Dossier en souffrance énonçait les directives pour la présentation des revendications et les critères généraux régissant l’indemnisation, et aucun plafond monétaire n’était prévu.

Les Premières nations et d’autres ont dénoncé ces mesures et leur mise en application. Elles s’opposaient avant tout au fait que le gouvernement fédéral continuait d’être partie à la procédure de règlement des revendications, ce qui avait l’apparence d’un conflit d’intérêts intrinsèque. En 1983, le rapport Penner sur l’autonomie gouvernementale des Autochtones abordait les questions touchant les revendications, y compris le modèle de 1982, et recommandait fermement d’établir une nouvelle politique sur le règlement des revendications, le processus devant être confirmé par une loi après avoir été négocié par le gouvernement fédéral et des représentants des Premières nations. Le rapport faisait remarquer que le nouveau processus devait impérativement être à l’abri de toute intervention politique et il proposait que la loi adoptée prévoie à la fois une partie neutre qui faciliterait la négociation d’un règlement et une procédure quasi judiciaire pour les cas où la négociation échouerait(14).

Dans un rapport présenté en 1990, le Comité permanent des affaires autochtones de la Chambre des communes faisait observer, sans faire de recommandations précises, que « le mécontentement demeure très grand » au sujet des politiques sur les revendications, que le traitement des revendications est d’une « extrême lenteur » et que « selon l’une des critiques souvent réitérées, le processus de règlement […] devrait être administré ou surveillé par un ou plusieurs organismes sans lien avec les ministères des Affaires indiennes et de la Justice »(15).

C. Depuis 1991

1. Une nouvelle réforme

En 1986, la revendication particulière des Mohawks de Kanesatake a été rejetée. En 1990, une partie du territoire revendiqué a été au cœur d’un différend avec la municipalité voisine d’Oka. La crise de l’été 1990 a relancé le mouvement pour une réforme de la procédure de règlement des revendications et a permis d’évaluer la réaction du gouvernement.

Le Comité des Chefs sur les revendications, de l’Assemblée des Premières Nations (APN), a réalisé en décembre 1990, à la demande du ministre des Affaires indiennes, une étude dans laquelle il recommandait de réformer fondamentalement la politique des revendications globales(16), notamment en formant un groupe de travail mixte APN-MAINC qui serait chargé d’établir une procédure indépendante pour le règlement des revendications(17). Au nombre des initiatives annoncées ultérieurement, en avril 1991(18), par le premier ministre d’alors, Brian Mulroney, figurait la création d’un groupe de travail chargé de réviser la politique de règlement des revendications particulières et, comme mesure provisoire, la création d’une commission des revendications particulières des Autochtones qui servirait de mécanisme indépendant de règlement des différends.

2. La Commission des revendications particulières des Indiens

La Commission des revendications particulières des Indiens (CRPI) a été constituée par décret(19) sous le régime de la partie I de la Loi sur les enquêtes, à titre d’organisme consultatif indépendant et temporaire, composé de six commissaires chargés d’étudier certaines revendications rejetées par le gouvernement et de rendre des décisions n’ayant aucune force exécutoire. Dans les années qui ont suivi, ce mandat restreint et l’impression que le gouvernement ne donnait pas suite aux recommandations de la CRPI ont frustré tant les commissaires que les auteurs des revendications.

Dans son rapport annuel de 2000-2001(20), la CRPI a fait observer que le règlement des revendications particulières demeurait « désagréablement lent » et « dans une impasse ». Les commissaires réclamaient une augmentation du financement et des ressources pour améliorer la situation et réitéraient leur opinion de longue date sur la « nécessité pressante de créer un organisme indépendant d’examen des revendications » qui « éliminerait l’engorgement […] et [ferait avancer le règlement de] centaines de revendications territoriales actuelles et futures des Premières Nations »(21).

3. La Commission royale sur les peuples autochtones

Dans son rapport final publié en 1996, la Commission royale a souligné la nécessité de modifier la structure de règlement des revendications territoriales des Autochtones. Elle recommandait notamment l’adoption d’une loi constituant un tribunal indépendant des traités et des terres autochtones pour remplacer la CRPI et, relativement aux revendications particulières, réexaminer le financement des revendicateurs par le fédéral, contrôler les négociations, rendre des ordonnances exécutoires et statuer sur les revendications qui lui sont renvoyées par les revendicateurs, en accordant une réparation s’il y a lieu(22).

4. Les groupes de travail mixtes APN-gouvernement

En juillet 1992, le Canada et l’APN ont convenu d’examiner simultanément la politique des revendications particulières et la procédure de règlement en vue de présenter des recommandations. Le Groupe de travail n’est pas arrivé à un consensus sur toutes les questions avant l’échéance de son mandat en 1993, mais il y est arrivé en ce qui concerne la nécessité d’implanter une procédure indépendante, comme l’ont montré les projets de recommandations sur l’adoption d’une loi créant un organe indépendant pour le règlement des revendications (OIRR).

En 1996, un second groupe de travail mixte Premières Nations-Canada (GTM) a commencé à étudier la structure et la compétence d’un tel organisme. Le rapport de 1998 du GTM(23) comportait un projet de mesure législative visant à modifier la procédure de règlement des revendications particulières, dont certaines dispositions clés sont les suivantes :

  • neutraliser le conflit d’intérêts du gouvernement fédéral en instituant un mécanisme législatif indépendant qui relèverait directement du Parlement et des Premières nations;
  • établir à la fois une commission qui faciliterait les négociations et un tribunal qui résoudrait les litiges en cas d’échec des négociations;
  • conférer au tribunal le pouvoir de rendre des décisions exécutoires sur le bien-fondé des revendications, les critères d’indemnisation et le montant de l’indemnité, sous réserve
    • du budget quinquennal alloué au fonds de règlement;
  • définir les problèmes qui sont du ressort de la commission;
  • accorder un financement indépendant aux Premières nations pour la recherche et les négociations;
  • effectuer au bout de cinq ans un réexamen mixte, y compris l’étude des questions non résolues telles que les obligations en droit découlant des droits ancestraux.

5. La réponse du gouvernement

La création d’une forme d’OIRR possédant des pouvoirs plus étendus fait partie du programme du gouvernement libéral depuis le Livre rouge de la campagne électorale de 1993(24). En mai 2000, après avoir étudié une proposition du gouvernement fédéral comportant certaines caractéristiques du modèle proposé par le GTM en 1998, le comité exécutif de l’APN a manifesté de l’inquiétude en constatant toutefois des différences marquées, notamment le plafonnement à 5 millions de dollars des indemnités accordées par le tribunal(25) et les nominations décidées par le fédéral au lieu d’une prise de décision conjointe. Des discussions mixtes d’ordre technique sur la proposition fédérale ont suivi et, en octobre 2001, le Ministre a nommé un représentant en chef du gouvernement fédéral pour l’OIRR, chargé de renseigner les Premières nations et leurs organisations sur l’organisme proposé et de travailler avec les parties à régler les questions en suspens à propos de l’OIRR(26).

D. Données sur les revendications particulières

D’après le Mini-sommaire national publié par la Direction générale des revendications particulières du MAINC, 252 des 1 201 revendications particulières présentées entre le 1er avril 1970 et le 30 juin 2003 ont été réglées et 771 autres ne l’ont pas été – étant soit à divers stades d’étude (551), l’objet de négociations en cours ou suspendues (118), devant les tribunaux (73) ou devant la CRPI (29)(27). Plus de 50 p. 100 des revendications particulières non réglées ont été déposées par des Premières nations des provinces de l’Ouest. On estime que quelque 60 revendications particulières sont présentées chaque année au gouvernement fédéral(28).

On peut connaître les coûts engendrés par les règlements conclus en consultant diverses sources gouvernementales fédérales ou provinciales. Par exemple, la documentation concernant le règlement des revendications particulières en Saskatchewan et en Alberta depuis le milieu des années 1980 montre que :

  • Le règlement de 29 revendications de droits fonciers issus des traités (DFIT)(29) présentées par les Premières nations de la Saskatchewan ont coûté en tout plus de 539 millions de dollars aux gouvernements fédéral et provincial, le plus gros de cette somme ayant été acquitté par le fédéral. Le montant d’un règlement varie entre environ 3,1 et 62,4 millions de dollars, la moyenne se situant à plus de 18,5 millions(30).
  • Le coût de 11 revendications de DFIT réglées en Alberta est d’environ 160,7 millions de dollars, la part de la province correspondant à peu près au tiers de cette somme, et le montant des règlements varie entre 3 et 31 millions de dollars(31).
  • Le règlement de 12 revendications particulières ne portant pas sur des DFIT a coûté en tout quelque 128,6 millions de dollars en Saskatchewan, le montant accordé dans chaque cas variant entre un peu plus de 400 000 $ et 34,5 millions de dollars(32).

DESCRIPTION ET ANALYSE

Le projet de loi sur le règlement des revendications particulières (ci-après la LRRP ou le projet de loi) tel qu’amendé par le Comité sénatorial est composé de 88 articles et d’une annexe. Nous allons nous pencher sur certains de ses éléments importants, en renvoyant au rapport de 1998 du GTM et à son projet de mesure législative lorsqu’il y a lieu. Les dispositions connexes pourront être analysées ensemble plutôt que selon leur ordre numérique, ce qui pourra donner lieu à un certain chevauchement.

A. Dispositions introductives (art. 2 et 3)

Selon les définitions du projet de loi C‑6 (art. 2), « première nation » s’entend d’une Bande au sens de la Loi sur les Indiens (al. a)), d’une des quelques anciennes bandes qui ont maintenu leur droit de présenter une revendication particulière en vertu d’un accord sur des revendications territoriales (al. b)), ou encore d’un groupe de personnes qui n’est plus une bande au sens d’une loi ou d’un accord sur l’autonomie gouvernementale énuméré à l’annexe et qui n’a pas abandonné son droit de présenter une revendication particulière (al. c))(33). Une « partie » à une revendication particulière s’entend du « revendicateur » – par définition une Première nation –, de la Couronne fédérale et de toute province à qui la qualité de partie au sens du projet de loi est accordée. La LRRP a pour objet de constituer le Centre du règlement des revendications particulières, dont nous allons parler plus longuement (art. 3).

Le projet de loi ne renferme pas de disposition de non-dérogation interdisant que la loi soit interprétée de façon à porter atteinte aux droits ancestraux, comme le recommandait le GTM dans son projet de mesure législative(34).

B. Partie 1 : Centre canadien du règlement indépendant des revendications particulières
des premières nations (art. 4 à 19; connexes : par. 20(3), 22(1), 43(1))

La partie 1 traite essentiellement d’organisation et d’administration. Le Centre canadien du règlement indépendant des revendications particulières des premières nations (ci‑après le Centre) se composera du premier dirigeant, nommé par le gouverneur en conseil sur recommandation du premier ministre pour un mandat maximum de cinq ans reconductible, et de deux divisions : la Commission et le Tribunal dont les attributions sont prévues aux parties 2 et 3 respectivement de la LRRP (art. 5, par. 8(1) et (2)). Le projet de mesure législative du GTM ne prévoyait pas la création d’un poste de premier dirigeant distinct, mais plutôt que le président de la Commission et celui du Tribunal auraient été chacun le premier dirigeant de sa division(35).

Le Centre sera chargé « d’administrer les activités » de la Commission et celles du Tribunal hormis les exceptions prévues dans la LRRP(36), de fournir des services de traduction et d’interprétation, et de renseigner le public au sujet des revendications particulières, de la LRRP, de la Commission et du Tribunal (art. 6). Soulignons qu’en vertu des paragraphes 22(1) et 43(1), les présidents de la Commission et du Tribunal auront aussi comme fonction d’administrer les activités de leur division. Il n’est pas facile de prévoir les conséquences pratiques qu’aura pour le fonctionnement quotidien des deux divisions du Centre le fait d’attribuer à deux autorités distinctes la responsabilité des activités de la Commission et du Tribunal.

Le projet de loi C-6 prévoit que le premier dirigeant :

  • dirige le Centre et contrôle la gestion de son personnel (art. 7);
  • jouit du rang d’un administrateur général – normalement l’équivalent d’un sous-ministre(37) – pour l’application de la Loi sur la gestion des finances publiques (LGFP)(38) (par. 9(1));
  • peut occuper son poste à temps plein ou à temps partiel (par. 8(4) et (5));
  • ne peut agir d’une façon incompatible avec l’exercice de ses attributions, mais peut occuper en même temps le poste de président de la Commission (par. 8(6)).

Ces deux derniers points devraient être analysés en tenant compte du paragraphe 20(3), qui prévoit que le président de la Commission doit occuper son poste à temps plein. Ces trois dispositions conjuguées font apparaître un risque d’incompatibilité pour la personne qui occuperait à la fois le poste de premier dirigeant et celui de président de la Commission, puisque ces deux postes ensemble font plus qu’un poste à temps plein.

La LRRP établit que le Centre est un « employeur distinct » aux fins de la gestion du personnel (art. 10)(39) et qu’il a compétence exclusive en cette matière et en celle des relations de travail(40). Comme la CRPI, le Centre s’établira dans la région de la capitale nationale (art. 16). Le vérificateur général du Canada se chargera d’examiner chaque année les comptes du Centre pour en faire rapport et le Centre présentera au Ministre un rapport annuel qui sera déposé devant chaque chambre du Parlement dans les 30 jours de séance (art. 17 et 18). Le Centre est aussi tenu de présenter un rapport trimestriel détaillé sur les indemnités à payer par suite du règlement de revendications particulières, que celui-ci ait été décidé par le Tribunal ou qu’il ait résulté d’un autre processus (art. 19).

C. Partie 2 : La Commission (art. 20 à 40; connexe : art. 76.1)

1. Composition et attributions (art. 20 à 25)

La Commission est composée du président, du vice-président, tous les deux à temps plein pour un mandat reconductible d’au plus cinq ans, et d’au plus cinq autres membres(41) à temps plein ou partiel dont le mandat, aussi reconductible, est d’au plus trois ans. Les commissaires sont nommés par le gouverneur en conseil sur recommandation du Ministre (art. 20). Ce régime est généralement comparable à celui qui est prévu dans les autres lois fédérales(42). Toutefois, dans le domaine des revendications particulières, il diffère sur deux points importants de celui proposé par le GTM dans son projet de mesure législative : la nomination n’est pas subordonnée à une recommandation conjointe de l’APN et du Ministre, et elle ne tient pas compte de la représentation régionale(43).

À titre de réponse partielle aux préoccupations des Premières nations concernant l’absence d’un processus mixte de nomination dans le projet de loi C‑6, le Comité sénatorial a ajouté une nouvelle disposition exigeant que, avant de recommander des nominations au Centre(44), le Ministre « avise » les revendicateurs(45) qu’ils peuvent présenter leurs observations à l’égard des nominations dans le délai qu’il précise (art. 76.1). L’amendement n’oblige pas le Ministre à donner suite à ces observations ou à revoir le processus de nomination établi dans le projet de loi initial.

Le projet de loi C-6 prévoit que la Commission :

  • administre les sommes accordées à une Première nation pour la défense de ses revendications particulières et pour la recherche et la préparation nécessaires(46);
  • aide en tout temps les parties à faire emploi des mécanismes de règlement des différends pour régler des revendications particulières;
  • renvoie au Tribunal les questions concernant le bien-fondé et l’indemnisation (art. 23).
     

Dans l’exercice de ses fonctions, la Commission « peut » :

  • établir des règles de procédure pour les revendications particulières, mais pas pour la procédure devant le Tribunal;
  • établir des critères pour le financement d’une Première nation pour la préparation de ses dossiers de revendications et octroyer les fonds en conséquence;
  • faire effectuer les recherches et études « convenues par les parties »;
  • aider les parties à résoudre toute question interlocutoire [non finale](47);
  • favoriser l’emploi des mécanismes de règlement des différends, notamment la négociation, la médiation, l’arbitrage non obligatoire et, si les parties y consentent, l’arbitrage obligatoire (art. 24).

Le projet de mesure législative du GTM obligeait la Commission à établir des politiques sur le règlement des revendications par arbitrage obligatoire et à offrir cette formule sur demande des parties(48).

La Commission n’a pas le pouvoir exprès de fixer l’échéancier du traitement des revendications particulières. Or, il n’est pas certain que cet élément soit visé par l’expression « règles de procédure ». Les questions de délais ne sont traitées nulle part ailleurs à la partie 2.

2. Processus relatif aux revendications particulières (art. 26 à 40)

a. Dépôt des revendications (art. 26 et 27; connexes : par. 36(1), art. 74)

Selon le projet de loi C-6, une Première nation a le droit de déposer une revendication « en vue d’être indemnisée des pertes » résultant de l’un ou l’autre des six faits qui sont énumérés dans la LRRP et qui tournent autour de la violation ou l’inexécution d’une obligation en droit ou de transactions viciées concernant les terres d’une réserve (par. 26(1)). Les motifs énoncés à l’article 26 sont généralement les mêmes que ceux établis en 1982 dans Dossier en souffrance(49) et énumérés dans le projet de mesure législative du GTM(50). Il y a toutefois un ajout digne de mention, qu’avait d’ailleurs recommandé le GTM : la LRRP inclut expressément les obligations fiduciaires parmi les obligations en droit dont la violation ou l’inexécution peuvent faire l’objet d’une revendication particulière(51). Le projet de loi modifie d’ailleurs certains motifs actuellement reconnus. Sous le régime du projet de loi C‑6, une revendication fondée sur l’inexécution d’une obligation en droit créée par un traité ou un accord devra être « liée à la fourniture d’une terre ou de tout autre élément d’actif »(52). Bien que la plupart des revendications particulières liées à des traités mentionnées dans la documentation du MAINC concernent des terres, cet ajout a peut-être pour effet d’empêcher à l’avenir les revendications particulières fondées sur des clauses de traités qui sont sans rapport avec les terres et tout autre « élément d’actif »(53).

La LRRP ne définit pas l’indemnisation, ce qui donne à penser que, comme dans Dossier en souffrance, celle-ci ne s’entend pas exclusivement d’une indemnité pécuniaire(54). Le projet de loi ne plafonne pas non plus la valeur des revendications déposées. La documentation du MAINC confirme que « la Commission [sera] habilitée à traiter toutes les revendications particulières sans égard à leur valeur monétaire »(55) (souligné par l’auteure). Lorsqu’une partie l’informe qu’une revendication particulière est susceptible d’avoir des répercussions sur les intérêts d’une province, d’une Première nation ou d’une personne, la Commission doit aviser les intéressés du dépôt de la revendication (par. 36(1)).

Le projet de loi C-6 énumère aussi les catégories de revendications qui ne peuvent pas être déposées; ce sont les revendications :

  • fondées sur un accord prévoyant un autre mécanisme de règlement des différends;
  • fondées sur un accord sur des revendications territoriales conclu après 1973, sur une loi ou une entente mentionnée à l’annexe, ou sur une loi ou un accord connexe;
  • concernant la prestation ou le financement de services ou de programmes relatifs à l’éducation, à la santé ou à l’assistance sociale;
  • fondées sur des événements survenus au cours des 15 années précédentes;
  • fondées sur des droits ou titres ancestraux (par. 26(2)).

La raison pour laquelle les revendications concernant la prestation ou le financement des programmes publics(56) ou encore des événements du passé récent sont interdites est nébuleuse. Dans ce dernier cas, le délai de 15 ans reflète probablement la pratique du Ministère, bien qu’aucune politique en ce sens ne soit expressément énoncée dans Dossier en souffrance.

L’interdiction de déposer des revendications particulières alléguant l’existence d’un titre ancestral va dans le sens de la politique fédérale énoncée dans Dossier en souffrance et d’autres documents, qui considère le titre ancestral comme un sujet de revendication globale. La question des droits ancestraux rattachés à un lieu, c’est-à-dire ceux qui ne relèvent d’aucun titre comme tel, est abordée dans le rapport du GTM, qui note que les Premières nations estiment qu’une atteinte à de tels droits peut leur porter préjudice, mais qu’elles n’ont pas accès aux négociations de revendications globales pour y remédier, alors qu’il s’agit d’obligations en droit tout autant que les autres revendications particulières. Ce problème a été expressément inclus dans le sujet de l’examen quinquennal du nouveau processus recommandé(57). Le projet de mesure législative du GTM aurait autorisé la Commission à traiter une revendication fondée sur des droits ou titres ancestraux avec le consentement des parties(58).

Outre les interdictions qu’il énonce pour des motifs de fond, le projet de loi C‑6 interdit le dépôt d’une revendication (1) lorsque les mêmes éléments d’actif ou les mêmes faits font l’objet d’une instance à laquelle la Couronne et la Première nation sont parties devant une juridiction autre que le Tribunal et (2) que cette instance est susceptible de donner lieu à une décision incompatible (par. 26(3)). De même, une revendication ne sera pas maintenue si, au cours du processus prévu par la LRRP, le revendicateur introduit une telle instance, fait un nouvel acte de procédure à ce sujet ou ne continue pas d’en maintenir la suspension (art. 74).

Dans son projet de mesure législative, le GTM n’interdisait pas le dépôt de revendications visées au par. 26(2), à l’exception de celles fondées sur des droits ou titres ancestraux, mais il interdisait le dépôt de revendications faisant l’objet d’une action en instance comme celle visée au paragraphe 26(3)(59).

b. Réunions préparatoires (art. 28 à 30)

En vertu de la LRRP, la Commission doit convoquer les parties à une réunion préparatoire pour étudier la revendication déposée et les questions que celle-ci soulève (par. 28(1))(60). Le revendicateur peut modifier sa revendication au cours des réunions ou à la fin de celles-ci (art. 29). Une fois toutes les réunions utiles terminées, la Commission suspend le processus relatif à la revendication jusqu’à ce que le Ministre décide s’il va négocier ou non (par. 30(1)). Pour prendre sa décision, le Ministre fait abstraction de toute règle ou théorie de droit qui aurait pour effet de limiter la revendication en raison du temps écoulé ou d’un retard (par. 30(2)). Cette disposition est conforme à la politique d’évaluation des revendications énoncée dans Dossier en souffrance, qui prévoit en outre, toutefois, que, en cas de litige, le gouvernement se réserve le droit de se prévaloir de tous les moyens de défense à sa disposition, y compris la prescription(61).

Comme ailleurs à la partie 2, la LRRP ne fixe aucune échéance à la prise de décision du Ministre. Elle l’oblige toutefois à faire rapport à la Commission « au moins tous les six mois » sur l’état de son examen, la date prévue de sa décision et les raisons justifiant la nécessité d’un délai supplémentaire (par. 30(3)). Elle précise aussi qu’il ne faut pas présumer à partir du temps écoulé depuis le dépôt d’une revendication que le Ministre « a décidé de ne pas négocier le règlement » (par. 30(4)).

c. Bien-fondé des revendications (art. 31 et 32; connexes : art. 37, 56)

Si le Ministre décide de ne pas négocier, la Commission doit, à la demande du revendicateur, aider les parties à résoudre la question du bien-fondé de la revendication par des mécanismes de règlements des différends (art. 31)(62). À la demande des parties, elle permettra aussi à une province, à une Première nation ou à une personne d’être consultée dans le cadre de l’application du mécanisme et même à une province ou à une Première nation d’être partie au processus de règlement (art. 37).

La Commission est aussi tenue, si le revendicateur le demande, de renvoyer au Tribunal la question du bien-fondé, à condition d’être convaincue que le dossier de la revendication est complet et a été étudié par le Ministre, que les mécanismes de règlement des différends ont été épuisés et que le revendicateur a renoncé, pour sa revendication, à toute indemnité excédant l’indemnité maximale applicable que l’article 56 fixe actuellement à 7 millions de dollars (par. 32(1)). On ne sait pas vraiment pourquoi le renvoi au Tribunal est subordonné à une telle renonciation, puisque le bien-fondé de la revendication est une question préliminaire.

Dans Dossier en souffrance, une revendication rejetée pouvait être déposée de nouveau si de nouveaux éléments de preuve ou de nouveaux arguments de droit étaient découverts. Le projet de loi C‑6 ne traite pas de la question de savoir si une revendication retirée ou une revendication dont le Ministre a refusé de négocier le règlement peut être déposée de nouveau à une date ultérieure.

d. Indemnisation (art. 33 à 35)

Comme le montre clairement l’économie du projet de loi, la LRRP traite la détermination du bien-fondé de la revendication et celle de l’indemnité comme deux procédures distinctes. Si le Ministre accepte de négocier ou si le tribunal conclut au bien-fondé de la revendication, la Commission met à la disposition des parties des mécanismes de règlement des différends pour qu’elles règlent la question de l’indemnisation (art. 33)(63). La renonciation par le revendicateur prévue au paragraphe 32(1) relativement à l’indemnité n’est mentionnée nulle part ailleurs dans le projet de loi alors qu’elle est une condition au renvoi au Tribunal de la question du bien-fondé. Il y a donc lieu de se demander quel effet cette renonciation peut avoir sur l’étape de l’indemnisation qui se déroule devant la Commission pour les revendicateurs touchés, et même si elle a un effet.

À la demande du revendicateur, la Commission est obligée de renvoyer au Tribunal la question de l’indemnisation si elle est convaincue que :

  • le dossier de l’indemnisation est complet et a été examiné par le Ministre lors de la procédure de règlement des différends;
  • les mécanismes de règlement des différends ont été épuisés;
  • la réparation recherchée est strictement pécuniaire(64);
  • le revendicateur a renoncé à une indemnité excédant l’indemnité maximale applicable;
  • le montant qui reste dans le fonds d’indemnisation pour l’exercice est au moins égal à l’indemnité maximale suivant la formule mathématique prévue dans le projet de loi(65) (par. 35(1))(66).

En pratique, le dernier de ces critères pourrait empêcher la Commission de renvoyer une ou plusieurs revendications même si toutes les autres conditions sont réunies. Le projet de loi ne précise pas comment il faudra traiter les revendications dont la question de l’indemnisation ne sera pas réglée. Comme nous l’avons déjà signalé, le GTM, dans son rapport, recommandait un budget quinquennal en expliquant que lorsque le montant versé en règlements négociés ou décidés par le Tribunal au cours des cinq années aura atteint un seuil fixé à l’avance, le Tribunal cessera l’audition des renvois jusqu’à l’affectation d’un nouveau budget(67).

e. Dispositions générales (art. 36 à 40; connexes : art. 75 et 76.2)

La LRRP interdit aux personnes nommées au Centre, aux employés et aux contractuels de celui-ci de communiquer les documents ou renseignements liés à une revendication particulière qu’ils ont obtenus dans le cadre de leurs fonctions, ou de témoigner sur ceux-ci sans le consentement des parties (art. 38); cette interdiction est sujette à exception en raison du caractère public des documents déposés auprès de la Commission et du Tribunal (par. 75(1))(68). Une preuve produite dans le cadre d’un mécanisme de règlement des différends sous le régime de la partie 2 n’est pas admissible devant le Tribunal ni à toute autre procédure sans le consentement des parties (art. 40)).

En vertu du projet de loi C‑6, il est aussi interdit au personnel du Centre de représenter une partie devant le Tribunal, tandis que les contractuels dont les services ont été retenus pour une revendication particulière n’ont pas le droit de représenter devant le Tribunal une partie à cette revendication (art. 39). En vertu d’une disposition similaire adoptée par le Comité sénatorial, quiconque a été nommé au Centre ne peut agir pour le compte d’une partie relativement à une revendication particulière à l’égard de laquelle il a travaillé ou dont il a eu connaissance au cours de son mandat. L’amendement précise qu’aucune personne nommée ne peut travailler dans l’année qui suit la fin de son mandat pour le MAINC ou une Première nation qui avait une revendication particulière en instance durant son mandat (art. 76.2). Cette dernière disposition vise à répondre dans une certaine mesure aux préoccupations des Premières nations, qui craignaient que le Centre ne soit, dans la réalité, indûment influencé par les opinions de la fonction publique fédérale, mais il semble que les inquiétudes des témoins à ce sujet visaient tous les employés du Centre et non seulement les employés qui passent du Centre au MAINC.

D. Partie 3 : Le Tribunal (art. 41 à 73)

1. Composition et attributions (art. 41 à 46; connexe : par. 56(2))

Les dispositions administratives de la LRRP visant la nomination (par le gouverneur en conseil sur recommandation du Ministre), le nombre (au plus sept en comptant le président et le vice-président à temps plein), le mandat (reconductible, au plus cinq ou trois ans) et la rémunération des membres du Tribunal correspondent en gros à celles de la partie 2 qui s’appliquent à la Commission (art. 41 et 42) et sont généralement comparables aux mesures analogues prévues dans d’autres lois fédérales(69). Voici certaines dispositions spécifiques de la partie 3 : la majorité des membres nommés sont obligatoirement des avocats inscrits au barreau d’une province ou à la Chambre des notaires du Québec (par. 41(2)) et, en plus de la fonction générale d’administrateur des activités assignée au président de la Commission et au président du Tribunal, les attributions de ce dernier se rapportant à la constitution des formations et à l’établissement des règles de procédure sont prévues expressément (par. 43(1)).

La principale fonction du Tribunal consiste à tenir audience en vue de trancher toute question relative à des revendications particulières (art. 44). Il « peut » établir des règles de procédure pour les formations, notamment en ce qui concerne l’envoi d’avis, la présentation des arguments, l’assignation des témoins, la production de documents, la présentation d’éléments de preuve et la « fixation de délais » (par. 45(1))(70). Ces domaines correspondent de façon générale à ceux pour lesquels d’autres tribunaux ont aussi le pouvoir d’adopter des règles et à ceux prévus dans le projet de mesure législative du GTM(71). Alors que le GTM proposait que les règles fixant les délais visent expressément les périodes à l’intérieur desquelles les audiences doivent avoir lieu et les décisions doivent être rendues, le projet de loi C‑6 ne précise pas quelles activités pourraient faire l’objet de règles de procédure du Tribunal en la matière. Il autorise toutefois une formation du Tribunal à modifier tout délai fixé par ces règles, comme le faisait le projet de mesure législative du GTM (al. 46h)).

Les pouvoirs qui sont conférés aux formations et dont la liste exhaustive se trouve à l’article 46 peuvent être divisés, dans les grandes lignes, en deux catégories : les pouvoirs semblables à ceux des tribunaux administratifs en général et les pouvoirs propres au contexte des revendications particulières. Les premiers, qui figuraient pour la plupart dans le projet de mesure législative du GTM(72), comprennent ce qui suit : déterminer les questions de droit et de fait dans les affaires de sa compétence (al. 46a)), s’occuper de ce qui concerne les témoins et les éléments de preuve (al. 46e) et f)) et adjuger les dépens (al. 46i)).

Dans l’autre catégorie, on retrouve le pouvoir de suspendre une audience ou de retarder le prononcé d’une décision, pour attendre la décision d’une autre juridiction susceptible d’être utile, permettre aux parties de résoudre une question ou de mieux se préparer, etc. (al. 46d)), et de tenir compte de la diversité culturelle dans l’application des règles de procédure du Tribunal (al. 46g)). Les formations peuvent aussi ordonner : que des revendications ayant en commun certains points soient entendues ensemble ou consécutivement (al. 46b)), et que des revendications soient tranchées ensemble pour éviter qu’elles donnent lieu à des décisions incompatibles ou parce que la même indemnité maximale leur est applicable, qu’elles aient été présentées ou non par le même revendicateur (al. 46c), par. 56(2)). Aucune de ces questions n’est expressément traitée dans le projet de mesure législative du GTM(73).

2. Formations, audiences et décisions (art. 47 à 73)

Les dispositions sous cette rubrique établissent le cadre de fonctionnement du Tribunal et règlent des questions connexes.

a. Demandes interlocutoires et autres (art. 47 à 51)

Le projet de loi C-6 autorise le Tribunal à traiter certaines questions interlocutoires précises. Selon l’amendement proposé par le Comité sénatorial, une partie à une revendication particulière peut demander au Tribunal 1) relativement à une revendication particulière dont la Commission est saisie, d’assigner des témoins à comparaître ou d’ordonner la production de documents; 2) de décider si sa revendication et toute autre revendication devraient être entendues ensemble ou de façon consécutive ou être tranchées ensemble et 3) avec le consentement des autres parties, de trancher toute autre question qui permettra de faire avancer le règlement des différends (art. 47).

Selon le parrain du projet de loi au Sénat, l’amendement concernant le pouvoir du Tribunal de traiter certaines questions interlocutoires vise à accroître la capacité des parties d’amasser de l’information sur les revendications soumises à la Commission, tout en donnant au Tribunal, plutôt qu’à la Commission, le droit d’assigner des témoins et d’exiger la production de documents, afin de garder à la Commission son rôle de facilitatrice.

Les demandes présentées en vertu de l’article 47 seront jugées par une formation d’un ou trois membres (art. 48 et 49).

Une partie à une revendication peut aussi demander au Tribunal d’ordonner la radiation de tout ou partie d’une revendication pour les motifs énoncés(74) (art. 50), de décider si une seule indemnité maximale est applicable à leur revendication et à toute autre en vertu du paragraphe 56(2), ou de trancher toute autre question si les parties y consentent (art. 51). Les décisions rendues en vertu de l’article 51 sont sans appel. Toute décision sur l’indemnité maximale unique pour plusieurs revendications doit nécessairement être rendue avant que soit décidée et calculée l’indemnité conformément à l’article 56. Les demandes visées aux articles 50 et 51 de même que les renvois sur la validité et l’indemnisation seront jugés par des formations de trois ou cinq membres (art. 52).

b. Décisions sur le bien-fondé et l’indemnisation (art. 54 à 56)

i. Le bien-fondé (art. 54; connexe : art. 64)

Comme lorsque le Ministre décide s’il va négocier ou non le règlement d’une revendication particulière, une formation du Tribunal ne peut pas, lorsqu’elle statue sur le bien-fondé d’une telle revendication, tenir compte d’une règle ou théorie de droit qui aurait pour effet de limiter la revendication en raison du temps écoulé ou d’un retard (art. 54). Sous réserve de cette condition, la Couronne a le droit de faire valoir devant le Tribunal tout moyen de défense qu’elle pourrait invoquer dans une action judiciaire (art. 64)(75).

ii. Indemnisation (art. 56; connexes : al. 46c) et 51a), art. 65, 73 et 77)

Une formation du Tribunal qui statue sur l’indemnisation :

  • évalue les pertes pécuniaires qu’implique la revendication jusqu’à concurrence soit du plafond fixé par le gouverneur en conseil en vertu de son pouvoir de réglementation (art. 77), soit de 10 millions de dollars;
  • ne peut accorder de dommages exemplaires ni une indemnité autre que pécuniaire;
  • accorde à la charge de toute partie intimée une indemnité proportionnelle à sa part de responsabilité (par. 56(1))(76);
  • doit considérer comme une seule revendication, pour le calcul de l’indemnité maximale, les revendications (1) présentées par le même revendicateur et fondées sur les mêmes faits ou (2) présentées par des revendicateurs différents mais fondées sur les mêmes faits et portant sur les mêmes éléments d’actif(77) (par. 56(2)).

Le plafond initial imposé par le projet de loi est passé de 7 à 10 millions de dollars après un amendement du Comité sénatorial. Étant donné que les témoins des Premières nations qui ont comparu devant les comités de la Chambre et du Sénat ont indiqué que l’indemnité maximale prévue était un défaut du projet de loi C‑6, défaut qui empêchait la majorité des revendicateurs de s’adresser au Tribunal, cet amendement pourrait ne pas constituer un changement substantiel pour les Premières nations qui ont des revendications particulières.

Voici quelques observations sur les dispositions de la LRRP qui renvoient au paragraphe 56(2) et à son indemnité maximale unique pour plusieurs revendications :

  • le texte de l’alinéa 46c) qui confère au Tribunal le pouvoir d’ordonner que des revendications soient tranchées ensemble parce qu’elles sont considérées comme une seule pour l’application de l’indemnité maximale prévue au paragraphe 56(2) énonce une possibilité plutôt qu’une obligation;
  • l’article 46 n’autorise pas une formation à décider si les revendications sont effectivement soumises à la même indemnité maximale;
  • malgré l’alinéa 46c), une formation du Tribunal doit trancher les revendications ensemble, sauf décision contraire des parties, s’il conclut que les revendications sont soumises à une seule indemnité maximale en vertu du paragraphe 56(2) [ou qu’elles soulèvent les mêmes points, ce qui risque de donner lieu à des décisions incompatibles] (art. 65);
  • le Tribunal est autorisé en vertu de l’alinéa 51a) à décider, à la demande d’une partie, si des revendications sont soumises à la même indemnité maximale pour l’application du paragraphe 56(2).

La corrélation des alinéas 46c) et 51a), du paragraphe 56(2) et de l’article 65 et les conditions de leur application conjuguée en pratique sont assez nébuleuses.

Un autre élément digne de mention relativement à l’article 56 est qu’une Première nation qui a des revendications fondées peut décider de ne pas demander le renvoi au Tribunal des questions d’indemnisation, que ce soit parce que ses revendications dépassent le plafond fixé et qu’elle n’est pas disposée à procéder à la renonciation obligatoire ou pour toute autre raison. Cela pose le problème de la manière dont le processus prévu par la LRRP est susceptible d’influer sur les décisions d’une Première nation qui possède d’importantes revendications particulières.

En vertu du projet de loi C‑6, la Couronne peut payer une indemnité en versements échelonnés sur au plus cinq ans suivant la date de la décision du Tribunal (par. 73(1))(78).

iii. Disposition ou location illégale des terres d’une réserve (art. 57)

Selon l’article 39 de la Loi sur les Indiens, les intérêts d’une Première nation dans les terres d’une réserve ne peuvent être cédés en tout ni en partie, sauf si la cession est faite à la Couronne, approuvée par une majorité des électeurs de la Première nation et acceptée par le gouverneur en conseil. La LRRP permet de passer outre aux dispositions de l’article 39 dans le cas de certaines revendications particulières fondées sur la disposition ou la location illégale des terres d’une réserve. Elle prévoit en effet que, malgré l’article 39, l’octroi d’une indemnité à une Première nation revendicatrice en réparation des pertes qu’elle a subies par suite de la disposition illégale des terres d’une réserve sans qu’il y ait jamais eu restitution, éteint les intérêts du revendicateur sur les terres. En l’occurrence, le revendicateur conserve le droit de poursuivre une province qui n’était pas partie à la revendication (par. 57(1)). L’article 39 est aussi rendu inapplicable dans le cas d’une indemnité accordée pour la durée non écoulée d’un bail qui a été signé par la Couronne en contravention des droits du revendicateur, alors que les droits des tiers pour cette période non écoulée sont protégés (par. 57(2)).

c. Diverses questions de procédure (art. 59 à 70)

Selon d’autres dispositions de la LRRP applicables à la procédure du Tribunal :

  • Si une formation estime que sa décision pourrait avoir des répercussions sur les intérêts des tiers, le Tribunal avise du dépôt de la revendication les tiers qui ne l’ont pas déjà été par la Commission (art. 59). Il peut aussi accorder à une province la qualité de partie à une revendication, à condition qu’elle accepte de se soumettre à la compétence du Tribunal (art. 60)(79).
  • Les audiences des formations du Tribunal sont publiques, sauf si une formation décide, à la demande d’une partie, que les raisons justifiant la confidentialité l’emportent sur l’intérêt public (art. 62).
  • Si une formation saisie d’une revendication estime (1) qu’une Première nation a une autre revendication ou revendication potentielle fondée sur les mêmes faits ou éléments d’actif ou (2) que toute autre revendication ou revendication potentielle devrait être présentée au Tribunal afin de permettre la résolution de la revendication initiale, elle doit suspendre l’audition de la revendication jusqu’à ce que le Tribunal soit saisi de l’autre revendication ou revendication potentielle (art. 66).
L’article 66 du projet de loi vise les revendications connexes. Le projet de mesure législative du GTM aurait autorisé une formation, sans l’y obliger, à ajourner ou à interrompre l’audition d’une revendication si la formation concluait à l’existence d’une revendication concurrente(80). L’article 66 oblige la formation à « suspendre » l’audition. Le projet de loi semble présumer qu’une Première nation ayant une revendication particulière potentielle va la déposer pour faciliter la résolution de sa revendication initiale et il ne prévoit pas la possibilité que les choses se passent autrement. Il ne fixe pas non plus la durée maximale de la suspension.
  • Une partie peut retirer « la question » dont le Tribunal est saisi tant que celui-ci n’a pas statué sans pour autant que cela la rende irrecevable par la suite (art. 67). Sous le régime du projet de loi C‑6, le terme « question » vise le bien-fondé, l’indemnisation et les affaires interlocutoires à l’article 47 et « toute autre question » à l’article 51. Selon le projet de mesure législative du GTM, le fait de se retirer d’un renvoi sur le bien-fondé ou l’indemnisation empêchait tout renvoi ultérieur sur la même question(81).
  • Comme le recommandait le projet de mesure législative du GTM(82), la LRRP prévoit que tout élément de preuve produit aux audiences d’une formation est irrecevable dans toute autre procédure, exception faite d’une révision judiciaire (art. 68).
  • Les formations doivent rendre par écrit leurs décisions, que le Tribunal fera publier de la manière qu’il estime indiquée (art. 70).

d. Effet des décisions des formations (art. 71 et 72)

Selon le projet de loi C-6, les décisions des formations du Tribunal seront susceptibles de révision judiciaire par les juges de la Section de première instance de la Cour fédérale du Canada(83) au titre de la Loi sur la Cour fédérale(84) (par. 71(1)). Contrairement à un appel, la révision judiciaire n’autorise pas le juge à modifier la décision du tribunal administratif. Il doit plutôt, s’il arrive à la conclusion, après avoir appliqué les critères de droit établis, que cette décision est viciée, annuler celle-ci et renvoyer l’affaire au tribunal qui l’étudiera de nouveau.

Autrement, les décisions des formations sont sans appel et non susceptibles de révision et, à l’exception des décisions portant sur les questions interlocutoires visées à l’article 47, « sont définitives et ont l’autorité de la chose jugée entre les parties dans tout recours pris devant une autre juridiction » et fondé sur les mêmes faits (par. 71(2))(85). Il n’y a qu’une exception à la condition de l’autorité de la chose jugée(86) : la décision d’une formation établissant le bien-fondé d’une revendication n’a l’autorité de la chose jugée que pour l’application de la LRRP et elle est inadmissible en preuve sauf en ce qui touche la révision judiciaire(87) (par. 71(3)). Cette disposition s’appliquerait par exemple lorsqu’une Première nation dont la revendication a été déclarée fondée par une formation a choisi, pour quelque raison que ce soit, d’intenter une action judiciaire à l’étape de l’indemnisation.

Le projet de loi C-6 établit aussi des dispositions de « libération et garantie ». Ainsi, lorsqu’une formation rend une décision (1) établissant qu’une revendication est mal fondée ou (2) accordant une indemnité pour une revendication particulière :

  • toute partie intimée – par définition la Couronne fédérale ou provinciale – est libérée de toute responsabilité à l’égard de la Première nation revendicatrice ou de ses membres, découlant des mêmes faits que ceux sur lesquels la revendication initiale est fondée (al. 72a));
  • le revendicateur sera obligé de garantir chaque partie intimée contre toute somme dont elle pourrait être tenue par suite d’une action en dommages intentée par le revendicateur ou ses membres « contre un tiers » et fondée sur les mêmes faits que la revendication initiale (al. 72b)).

On peut supposer que l’alinéa 72b) ait pour objet d’empêcher qu’un revendicateur soit indemnisé deux fois pour la même revendication, mais il se pourrait que son effet soit légèrement plus étendu. En effet, cette disposition serait susceptible de s’appliquer, par exemple, à un revendicateur qui intenterait une action en dommages contre une province qui ne s’est pas soumise à la compétence du Tribunal et qui n’est donc pas partie à la revendication initiale(88). Pourtant, l’article 57 exposé précédemment autorise expressément un revendicateur à prendre un tel recours. Une telle situation et d’autres semblables peuvent soulever des questions au sujet de l’absence d’exceptions ou de plafond à cette obligation de garantie(89).

E. Partie 4 : Dispositions générales (art. 74 à 77; connexes : par. 56(1),
        al. 32(1)c) et 35(1)d); annexe)

Lorsqu’elle a été déposée, la LRRP obligeait le Ministre à effectuer une étude sur le Centre dans les trois à cinq ans suivant son entrée en vigueur et à en déposer le rapport, y compris toutes les recommandations de modification, au Parlement (art. 76). Le seul amendement de l’opposition retenu par le Comité de la Chambre aurait disposé que le rapport exigé du Ministre en application de l’article 76 soit examiné par le Comité permanent des affaires autochtones de la Chambre. Selon un amendement proposé ultérieurement par legouvernement à l’étape du rapport, « chaque chambre renvoie ce rapport [du ministre] à son comité compétent ».

Les dispositions du projet de loi visant cette étude sont quelque peu différentes de celles du projet de mesure législative du GTM, qui proposait un examen conjoint APN-MAINC aux cinq ans(90). Selon un amendement du Comité sénatorial, « au cours de l’examen, le ministre donne aux premières nations la possibilité de présenter leurs observations ».

En vertu du projet de loi C-6, le gouverneur en conseil peut, par règlement, ajouter à l’annexe tout accord relatif à l’autonomie gouvernementale autochtone et prendre toute mesure réglementaire prévue par la LRRP (art. 77). Parmi ces accords à ajouter, il y aura à court terme les accords avec les Premières nations du Yukon qui en sont aux dernières étapes de la négociation des revendications territoriales et de l’autonomie gouvernementale. Quant aux autres mesures réglementaires, il y aura le plafond du montant de l’indemnité visé au paragraphe 56(1), dont nous avons déjà parlé, et les formalités de renonciation que devra remplir un revendicateur pour avoir droit au renvoi au Tribunal, comme le prévoient les alinéas 32(1)c) et 35(1)d).

F. Partie 5 : Modifications corrélatives, disposition de coordination
et entrée en vigueur (art. 78 à 85)

Les modifications corrélatives consistent essentiellement à ajouter des renvois au Centre, qui devient un nouvel organisme public, dans des lois telles que la Loi sur l’accès à l’information, la Loi sur la gestion des finances publiques, la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, etc. (art. 78 à 83).

Les dispositions de la LRRP entreront en vigueur à la date fixée par décret (art. 85). Selon la documentation du MAINC, le Centre devrait être opérationnel environ un an après la sanction royale. Il remplacera alors la CRPI qui sera dissoute lorsque toutes les revendications déjà déposées devant elle auront été réglées(91).

COMMENTAIRE

Comme on pouvait s’y attendre, ce sont surtout les organisations des Premières nations dont les membres seront le plus touchés qui ont réagi le plus à la LRRP depuis sa présentation initiale, en juin 2002. À ce moment-là, le chef national de l’Assemblée des Premières Nations, alors Matthew Coon Come, a déclaré qu’en dépit de sérieuses réserves, il espérait que le processus législatif permettrait d’apporter au projet de loi les amendements importants qui s’imposaient. Entre autres problèmes soulevés par l’APN et d’autres groupes, il y avait le mode de nomination insuffisamment indépendant, le plafonnement de l’indemnisation et l’absence d’un engagement beaucoup plus fort sur le plan financier à régler les revendications particulières.

Lors du débat en deuxième lecture qui a eu lieu à la Chambre des communes après la présentation du projet de loi initial, le ministre des Affaires indiennes a fait remarquer qu’en simplifiant le processus de règlement des revendications, la LRRP favoriserait le développement économique des collectivités des Premières nations, et que la Commission et le Tribunal seraient des organes indépendants et impartiaux, ce qui augmenterait la transparence et dissiperait l’impression de conflits d’intérêts. La documentation du Ministère soulignait aussi que la LRRP n’empêcherait pas le Ministre de consulter les Premières nations au sujet de la nomination des membres du Centre et que le plafond des indemnités pourrait être revu lors des examens prévus par la LRRP.

En juillet 2002, l’APN a adopté, au cours de son assemblée générale annuelle, une résolution visant à ne pas appuyer le projet loi « dans sa forme actuelle », entre autres pour les raisons suivantes : le projet de loi ne rendrait pas le processus plus équitable, plus efficace ou plus transparent; il différait de façon importante des propositions du GTM; il ne créerait pas un processus indépendant et pourrait en fait créer un processus de règlement des revendications qui serait encore pire que le processus actuel.

Au cours des audiences tenues du 26 au 28 novembre 2002 par le Comité des affaires autochtones de la Chambre des communes, des témoins des Premières nations venant d’un bout à l’autre du pays et représentant des organismes nationaux et régionaux, ainsi que des collectivités, ont conclu unanimement que le projet de loi, dans la forme où il avait été présenté, n’avait pas conservé les éléments fondamentaux prévus dans le modèle du GTM et ne permettrait pas de mettre en place un processus satisfaisant pour le règlement des revendications particulières. Leurs principales préoccupations recoupaient en grande partie celles exprimées par le chef national de l’APN et dans la résolution de l’assemblée générale de l’APN, dont il est question ci-dessus, et portaient sur l’indépendance, l’équité et la rapidité des règlements. Les témoins des Premières nations ont laissé entendre que la mesure législative ne réussirait pas à réduire le nombre de litiges concernant les revendications, et ils ont formulé des critiques au sujet du manque de consultation avant le dépôt du projet de loi et de la précipitation avec laquelle étaient menés le processus législatif et l’examen par le Comité relativement au projet de loi C-6. Plusieurs ont déclaré que le projet de loi était « fondamentalement vicié » et ont demandé son retrait, au profit d’un processus conjoint renouvelé.

Le président d’alors de la Commission des revendications des Indiens (CRI), Phil Fontaine, a dit que le projet de loi avait à la fois des points forts – par exemple la création d’un Tribunal indépendant et l’accent mis sur le règlement distinct des différends – et des points faibles – par exemple le plafond des indemnités et le fait que le Ministère continue de contrôler le processus. Il a insisté sur l’importance de respecter les principes fondamentaux, notamment l’indépendance et l’accès à la justice, pour ce qui est de la création et du fonctionnement d’un organe chargé d’étudier les revendications particulières.

Les consultations plus longues du Comité sénatorial qui se sont déroulées d’avril à juin 2003 ont suscité de l’APN, des autres témoins des Premières nations et de la nouvelle présidente de la CRI, Renée Dupuis, des réactions semblables à celles signalées plus haut.

En règle générale, les porte-parole des Premières nations ont estimé que les amendements du Comité sénatorial au projet de loi C‑6 ne résoudraient pas les défauts et les omissions qu’ils y voyaient. Dans une lettre du 2 octobre 2003 adressée à la présidente du Comité sénatorial, le chef national nouvellement réélu de l’APN, Phil Fontaine, partageait ces préoccupations. Il a aussi critiqué la décision du gouvernement de ne pas rétablir un processus de travail conjoint avec l’APN dans le but de trouver un processus de résolution des revendications particulières plus satisfaisant.

Après que la Chambre des communes a approuvé les amendements proposés par le Sénat, le chef national s’est dit déçu que le gouvernement n’ait pas tenu compte de l’opposition des Premières nations au projet de loi C‑6. D’autres ont prédit que la LRRP serait contestée devant les tribunaux.

Le nombre relativement restreint d’éditoriaux sur le projet de loi comprennent, entre autres, l’observation selon laquelle s’il est vrai que certaines réformes du processus s’imposent et seraient opportunes, notamment en ce qui concerne l’irrévocabilité des décisions du Tribunal, on ne sait pas vraiment de quelle façon le nouveau régime permettra de traiter les revendications plus importantes.



* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur.

(1) Le projet de loi a été déposé pour la première fois au cours de la 1re session de la 37e législature sous le numéro C‑60, mais il est mort au Feuilleton à la prorogation du Parlement le 16 septembre 2002. Par une motion adoptée le 7 octobre 2002, la Chambre des communes prévoit le rétablissement à la 2e session des projets de loi qui n’avaient pas reçu la sanction royale au cours de la session précédente. Les projets de loi seront donc rétablis à l’étape du processus législatif à laquelle ils étaient rendus au moment de la prorogation de la 1re session.

(2) On peut se procurer tous les documents cités en les demandant soit à l’auteure, soit à la Direction de l’information et de la documentation de la Bibliothèque du Parlement.

(3) Comité spécial mixte du Sénat et de la Chambre des communes, Procès-verbaux et témoignages, no 41, 9 juillet 1947, recommandation 2. Ce n’est pas une coïncidence si, en 1946, le Congrès américain a adopté une loi établissant une commission sur les revendications des Indiens, chargée de régler un large éventail de revendications contre les États-Unis.

(4) Comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes chargé d’enquêter sur les affaires indiennes, Procès-verbaux, no 16, 30 mai-7 juillet 1961.

(5) C’est-à-dire les revendications se rapportant à des titres ancestraux non éteints, à l’aliénation des terres d’une réserve sans dédommagement ou avec un dédommagement insuffisant, à l’inexécution d’obligations prévues dans des accords, y compris des traités, à la mauvaise gestion des fonds en fiducie et à l’omission de la Couronne d’agir équitablement et honorablement envers les Indiens.

(6) La politique indienne du gouvernement du Canada, 1969.

(7) [1973] R.C.S. 313.

(8) Ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, « Déclaration de l’honorable Jean Chrétien, ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien sur les revendications des Indiens et des Inuit », communiqué, 8 août 1973.

(9) Gérard La Forest, Report on Administrative Processes for the Resolution of Specific Indian Claims, Ottawa, MAINC, 1979, inédit, p. 17, 64.

(10) Entre 1970 et la fin de 1981, seulement 12 des 250 revendications déposées ont été réglées.

(11) Ottawa, Ministre des Approvisionnements et Services, 1982. En 1981, le gouvernement fédéral avait publié En toute justice : une politique des revendications des autochtones.

(12) Ce sont : le non-respect d’un traité ou d’un accord; un manquement à une obligation découlant de la Loi sur les Indiens ou d’une autre loi relative aux Indiens; un manquement à une obligation découlant de l’administration des fonds ou d’autres biens appartenant aux Indiens; l’aliénation illégale de terres indiennes.

(13) Ce sont : le défaut d’indemnisation pour des terres indiennes endommagées ou prises par le gouvernement; toute fraude commise dans l’acquisition ou l’aliénation de terres indiennes par des employés ou mandataires du gouvernement fédéral.

(14) Rapport du Comité spécial de la Chambre des communes sur l’autonomie gouvernementale des Autochtones, Procès-verbal et délibérations, fascicule no 40, 12 et 20 octobre 1983, p. 115.

(15) Questions en suspens : programme d’action pour tous les Canadiens dans les années 90, Procès-verbaux et témoignages, fascicule no 20, 31 janvier-21 février 1990, p. 3.

(16) L’Assemblée des Premières Nations et les Premières nations en général n’ont pas souscrit à la distinction que fait le gouvernement fédéral entre revendications globales et revendications particulières dans sa politique, la jugeant arbitraire et dénuée de fondement en droit.

(17) Assemblée des Premières Nations, Comité des Chefs sur les revendications, Les revendications territoriales – Présentation des Premières Nations, Ottawa, 14 décembre 1990.

(18) Le gouvernement a proposé le règlement accéléré des revendications inférieures à 500 000 $, l’abolition de l’exclusion des revendications antérieures à la Confédération, l’augmentation de la valeur des règlements que le Ministre a le pouvoir d’autoriser et l’affectation de ressources additionnelles à la procédure de règlement des revendications particulières.

(19) C.P. 1991-1329, modifié par C.P. 1992-1730.

(20) Commission des revendications des Indiens, Rapport annuel 2000-2001, Ottawa, Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 2001. La CRPI note dans son rapport que, depuis sa création en 1991, elle a déposé des rapports d’enquête sur 55 revendications.

(21) En mai 2001, les coprésidents d’alors de la CRPI ont affirmé au Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles de la Chambre des communes que la situation des revendications particulières approchait de la crise et montrait bien qu’il fallait un tribunal des revendications indépendant, permanent et investi de tous les pouvoirs, Témoignages, fascicule no 18, 29 mai 2001.

(22) Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones, vol. 2, Une relation à redéfinir, deuxième partie, ch. 4, « Les terres et les ressources », p. 660 et s., recommandations 2.4.29 à 2.4.33.

(23) Assemblée des Premières Nations et Direction des revendications particulières, MAINC, Report of the Joint First Nations-Canada Task Force on Specific Claims Policy Reform (Rapport du GTM), Ottawa, 1998, p. 9-10.

(24) Parti libéral du Canada, Pour la création d’emplois/Pour la relance économique – Le plan d’action libéral pour le Canada, Ottawa, 1993, p. 103. Voir aussi Bâtir notre avenir ensemble : Préparer le Canada pour le XXIe siècle, Ottawa, 1997, p. 76; Rassembler nos forces : Le plan d’action du Canada pour les questions autochtones, 1998.

(25) En mai 2001, la résolution 10/2001 de la Confédération des nations indiennes de l’APN encourageait le Ministre à s’assurer de l’indépendance véritable du nouvel OIRR en supprimant le plafond des indemnités pécuniaires qu’il pourra accorder, et à faire en sorte que les ressources mises à sa disposition soient suffisantes.

(26) Ces faits sont attestés par la documentation de l’APN sur la procédure relative à l’OIRR. Les documents montrent qu’en février 2002, le Comité des Chefs sur les revendications de l’APN a conclu qu’il lui était impossible de recommander aux Premières nations d’approuver la proposition du fédéral sans amendements, et que ces questions devaient se régler au niveau politique.

(27) Les autres dossiers sont fermés (70), n’étaient pas assujettis à une obligation légale (73) ou ont fait l’objet d’un règlement d’ordre administratif (35). Voir le Mini-sommaire, et les mini-sommaires par province.

(28) Le commissaire et ancien coprésident de la CRPI, Daniel Bellegarde, dans son témoignage du 29 mai 2001 devant le Comité des affaires autochtones de la Chambre (voir note 21).

(29) Les DFIT forment une catégorie de revendications particulières selon lesquelles que le Canada n’aurait pas fourni les terres promises par traité pour constituer une réserve.

(30) Saskatchewan, Department of Intergovernmental and Aboriginal Affairs, « Treaty Land Entitlement First Nations ».

(31) Alberta, Ministry of Aboriginal Affairs and Northern Development, « Treaty Land Entitlement Claims ». Dans deux cas, le Canada a pris l’initiative de remettre un supplément de quelque 64,5 millions de dollars pour financer le coût des installations permanentes de nouvelles réserves de Premières nations dont la création a résulté du règlement.

(32) MAINC, Région de la Saskatchewan, document inédit, novembre 2001.

(33) Parmi les lois et accords énumérés à l’annexe figurent la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, la Loi sur le gouvernement du territoire provisoire de Kanesatake, la Loi sur l’Accord définitif nisga’a, la Loi sur l’autonomie gouvernementale des premières nations du Yukon et huit ententes sur l’autonomie gouvernementale de Premières nations du Yukon. Voir le projet de paragraphe 26(2) à la rubrique C.2 « Le processus relatif aux revendications particulières » de la présente section.

(34) Rapport du GTM, « Proposed Final Draft of Legislative Drafting Instructions for an Independent Claims Body », art. 4.

(35) Ibid., par. 6(1) et 21(1).

(36) Voir l’analyse de l’article 43 à la rubrique D.1 « Composition et attributions » de la présente section.

(37) Voir la définition au paragraphe 2(1) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.R.C. 1985, ch. P-33.

(38) En vertu du paragraphe 12(1) de la LGFP, L.R.C. 1985, ch. F-11, le Conseil du Trésor « peut, aux conditions et selon les modalités qu’il fixe, déléguer tel de ses pouvoirs en matière de gestion du personnel de la fonction publique à l’administrateur général d’un ministère ou au premier dirigeant d’un secteur de la fonction publique; cette délégation peut être annulée, modifiée ou rétablie à discrétion ».

(39) Tous les employés de la fonction publique fédérale sont des employés de la Couronne. Pour les organismes énumérés à la partie II de l’annexe I de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, les employeurs distincts énumérés agissent à titre de représentants de la Couronne. En pratique, cette désignation permet une certaine autonomie dans l’exercice de l’autorité en qualité d’employeur. Parmi les autres employeurs distincts, il y a l’Agence des douanes et du revenu du Canada, le S.C.R.S., le Conseil national de recherches, le Bureau du vérificateur général, l’Agence Parcs Canada, etc.

(40) Une liste non exhaustive de certaines formes d’exercice de ce pouvoir reflète en gros celle figurant dans la LGFP pour le Conseil du Trésor, et comprend notamment la rémunération, les heures de travail, les primes, les normes de discipline et la formation (art. 11).

(41) En vertu du paragraphe 20(2), le gouverneur en conseil peut modifier leur nombre.

(42) Voir par exemple la partie II de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H-6, portant sur la composition de la Commission canadienne des droits de la personne.

(43) Projet de mesure législative du GTM, par. 5(3) et (4).

(44) C’est-à-dire la nomination à titre de dirigeant principal en vertu de l’article 5, ou à la Commission ou au Tribunal en vertu respectivement des paragraphes 20(1) et 41(1).

(45) En vertu de la nouvelle disposition contenue dans un amendement supplémentaire du Comité sénatorial et applicable pendant la première année qui suit son entrée en vigueur, les « revendicateurs » sont les revendicateurs sous le régime de la LRRP ou celui de la politique sur le règlement des revendications particulières du gouvernement du Canada (nouvel art. 77.1).

(46) Selon l’article 25, quiconque participe à l’administration des sommes d’argent accordées pour une revendication particulière ne peut assister à une réunion préparatoire ni participer au mécanisme de règlement des différends se rapportant à cette revendication.

(47) Voir l’analyse de l’article 47 du projet de loi à la rubrique D.2 « Formations, audiences et décisions » de la présente section.

(48) Projet de mesure législative du GTM, alinéas 12(1)a) et g).

(49) Voir notes 12 et 13.

(50) Projet de mesure législative du GTM, par. 10(1). Contrairement au modèle du GTM, la LRRP n’inclut pas la violation d’une obligation en droit découlant d’une initiative unilatérale de la part de la Couronne.

(51) Un « fiduciaire » est une personne responsable de la garde en fiducie ou une personne qui occupe une situation de confiance par rapport à un tiers. Un « rapport de fiduciaire » existe lorsqu’une personne en situation de confiance a « des droits et des pouvoirs qu’elle est tenue d’exercer pour le compte d’autrui ». La Cour suprême a statué que, dans le contexte propre aux relations entre la Couronne et les Autochtones, l’obligation fiduciaire de la Couronne est unique en soi. Pour en savoir plus long, lire le document de l’auteure Le rapport de fiduciaire entre la Couronne et les peuples autochtones, PRB 00‑09, Ottawa, Bibliothèque du Parlement, Direction de la recherche parlementaire, août 2000.

(52) La location illégale de terres d’une réserve est aussi ajoutée au motif se rapportant à la disposition illégale de ces terres.

(53) Par exemple, de nombreux traités comportent des clauses visant l’éducation des signataires autochtones, et le traité 6 contient une clause expresse sur la santé. Cette condition, conjuguée à l’interdiction prévue à l’alinéa 26(2)d) contre le dépôt de revendications concernant la prestation ou le financement de programmes relatifs, entre autres, à la santé ou à l’éducation, ne semble pas permettre des revendications particulières fondées sur de telles dispositions.

(54) Le projet de loi semble toutefois limiter l’indemnisation aux pertes qui se sont produites; le projet de mesure législative du GTM aurait permis le dépôt de revendications concernant des pertes potentielles, avec le consentement du Ministre (Projet de mesure législative du GTM, par. 10(2)).

(55) MAINC, Fiche documentaire, « Le Centre canadien du règlement indépendant des revendications particulières des Premières nations », Ottawa, 13 juin 2002.

(56) Voir note 53.

(57) Rapport du GTM, p. 11.

(58) Projet de mesure législative du GTM, par. 12(4).

(59) Ibid., par. 10(3).

(60) D’autres réunions préparatoires « peuvent » être convoquées à la demande d’une partie, de même que des séances communautaires pour permettre une participation plus étendue à la préparation de la revendication (par. 28(2)).

(61) Voir l’analyse des articles 54 et 64 à la rubrique D.2 « Formations, audiences et décisions » de la présente section.

(62) À ce stade, le revendicateur peut aussi décider de se retirer du mécanisme prévu dans la LRRP, soit en retirant sa revendication, soit en optant pour une action judiciaire.

(63) Le revendicateur peut, comme au stade des réunions préparatoires, modifier la revendication pour préciser ou étoffer sa position sur l’élément indemnisation (art. 34).

(64) Cette disposition est conforme à ce qui était proposé dans le projet de mesure législative du GTM, par. 12(3).

(65) Le calcul consiste à (1) soustraire le montant des indemnités accordées par le Tribunal au cours de l’exercice du montant maximal des indemnités pouvant être accordées par exercice, (2) multiplier l’indemnité maximale par le nombre de renvois au Tribunal dans lesquels la question de l’indemnisation n’a pas encore été tranchée, (3) soustraire le produit de (2) du résultat de (1). Par exemple : 75 millions $ – 28 millions $ = 47 millions $; 4 x 7 millions $ = 28 millions $; 47 millions $ – 28 millions $ = 19 millions $.

(66) Qu’il porte sur le bien-fondé ou sur l’indemnisation, tout renvoi comporte une détermination de la part de responsabilité de chacune des parties intimées, si une partie en fait la demande (par. 32(3) et 35(3)).

(67) Rapport du GTM, p. 11. Le Rapport reconnaît qu’il a été très difficile d’en arriver à un accord sur le cadre financier du règlement des revendications particulières.

(68) La Commission ou le Tribunal peut, à la demande d’une partie, assurer la confidentialité d’un document produit, après avoir conclu que la non-divulgation dans l’intérêt du requérant l’emporte sur l’intérêt public (par. 75(2)).

(69) Voir partie III de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H-6, au sujet de la composition du Tribunal canadien des droits de la personne.

(70) Les règles du Tribunal doivent être à la disposition du public (par. 45(2)).

(71) Projet de mesure législative du GTM, par. 38(1).

(72) Ibid., art. 31.

(73) Le projet de mesure législative du GTM (par. 27(3)) empêchait une formation de tenir une audience en cas de revendications incompatibles.

(74) Une revendication peut être radiée parce qu’elle ne remplit pas les critères énoncés à l’article 26, qu’elle n’a pas été déposée par une Première nation, qu’elle est frivole ou prématurée, ou qu’elle ne peut être maintenue aux termes de l’article 74, c’est-à-dire parce qu’il y a, devant une autre juridiction, une instance non suspendue contre la Couronne qui se rapporte aux mêmes faits ou éléments d’actif.

(75) C’est ce que prévoit l’art. 24 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, auquel renvoie l’art. 64.

(76) Lorsqu’elle se prononce sur la part de responsabilité, une formation peut conclure qu’un intimé n’est pas responsable du dommage en cause ou n’en est responsable qu’en partie (art. 55).

(77) Si les revendications sont présentées par des revendicateurs différents, la formation répartit équitablement entre eux l’indemnité totale accordée (par. 56(3)).

(78) Tout solde impayé porte intérêt au taux bancaire le plus bas (par. 73(2)).

(79) Le projet de mesure législative du GTM (art. 29) aurait autorisé une formation du Tribunal à accorder la qualité d’intervenant à une province, à une Première nation ou à une personne, et la qualité de partie à une Première nation ou à une province.

(80) Ibid., art. 34.

(81) Ibid., par. 33(1).

(82) Ibid., art. 39.

(83) Dans son projet de mesure législative, le GTM recommandait que les révisions judiciaires soient du ressort de la Cour d’appel fédérale (ibid., art. 45).

(84) L.R.C. 1985, ch. F-7. La seule modification de coordination prévue par la LRRP, qui n’est pas une modification de fond, est apportée en prévision de la modification du titre de cette loi, qui deviendrait la Loi sur les Cours fédérales (art. 84).

(85) Dans son projet de mesure législative (par. 35(1)), le GTM proposait une disposition « privative » moins exhaustive selon laquelle les décisions des formations auraient été sans appel et exécutoires à toutes fins utiles.

(86) L’expression signifie qu’un jugement définitif été prononcé sur une affaire, qui ne peut donc plus faire l’objet d’un autre procès entre les mêmes parties.

(87) Dans son projet de mesure législative (par. 35(2)), le GTM proposait que les décisions des formations sur le bien-fondé et l’indemnisation ne puissent pas être soumises à un autre tribunal en vue d’obtenir une indemnité ou toute autre réparation.

(88) Voir art. 60.

(89) Étant donné que « toute autre personne » – par exemple une province en vertu de l’article 57 – pourrait ajouter la Couronne fédérale comme co-intimée à toute action intentée par le revendicateur sans le consentement ni même l’implication de celui-ci. De même, si le tribunal saisi d’une telle action n’était pas soumis à la LRRP, il pourrait imposer à la Couronne fédérale le paiement de dommages, même sans que le revendicateur en fasse la demande.

(90) Projet de mesure législative du GTM, art. 41.

(91) MAINC, « Questions and answers: Canadian Centre for the Independent Resolution of First Nations Specific Claims », trousse d’information distribuée le 13 juin 2002.


© Bibliothèque du Parlement